Olivia resserre sa veste autour de son corps, frigorifiée à cette heure du soir où l'air est glacial. Elle porte une robe courte vert sapin, et même si elle a mis des collants assez épais ce n'est pas suffisant pour se protéger du froid. A vrai dire, elle ne pensait pas rentrer chez elle avant le lendemain matin, et à ce moment-là elle n'aurait pas eu besoin de marcher pendant dix minutes et de prendre le métro, rempli de microbes et de bactéries en tout genre. Elle était en effet partie passer la soirée chez des amis et  devait dormir chez eux, puis être raccompagnée le matin en voiture jusque chez elle. Son véhicule étant au garage, elle n'avait pas d'autres choix que de compter sur ses amis, puisque leur appartement est assez loin du sien. Mais au cours de la soirée, ils avaient reçu un appel leur informant qu'un membre de leur famille était à l'hôpital et son état était jugé assez sérieux. Olivia n'avait pas voulu s'imposer après cette mauvaise nouvelle et avait donc décidé de rentrer par ses propres moyens et ne pas déranger plus longtemps. Elle a un peu bu mais a encore les idées claires, et elle ne devrait pas avoir trop de problèmes à rentrer chez elle. Cependant, pour elle qui déteste par dessus tout les transports en commun, c'est une vraie épreuve que de prendre le métro. Elle préférerais presque traverser la ville en talons plutôt que d'entrer dans cette engin sale, bruyant, où on est tous entassés les uns sur les autres. A Los Angeles, elle n'a d'ailleurs jamais emprunté ce moyen de transport, elle avait son chauffeur personnel en cas de pépin avec sa voiture et c'était bien plus confortable. Depuis qu'elle est à White Oak Station, elle doit se débrouiller par elle même et elle a dû utiliser une ou deux fois les transports en commun, à contrecœur.
Prendre le métro en soirée, c'est deux fois pire : on ne sait jamais les personnes tordues que l'on peut rencontrer à vingt-trois heures, et Olivia n'est pas du tout rassurée en s'enfonçant dans la station de métro, sous la terre. Heureusement, elle a toujours une bombe lacrymogène sur elle et la jeune héritière ne l'a pas oublié aujourd'hui, mais si on l'attaque à plusieurs, elle ne pourra pas se défendre, avec ses cinquante kilos au maximum. Et puis, courir en escarpins pour s'échapper n'est pas la chose la plus aisée qui soit.
Secouant la tête pour se changer les idées et ne pas céder à la paranoïa, la jeune californienne descends les escaliers, quand elle entend le bruit caractéristique du métro qui arrive. Pressant le pas, elle manque de trébucher sur une marche et se rattrape difficilement à la rambarde. Son talon cède sous le choc et Olivia se retrouver avec une paire de chaussures cassées. « Merde, c'est pas vrai ! » Quelle soirée géniale, vraiment.
Pour ne rien arranger, le métro s'éloigne lentement, et Olivia le regarde partir, impuissante. Elle a envie de pleurer, elle ne peut rejoindre son appartement que par ce transport, sinon elle en a pour plus d'une heure de marche. Enfin, elle n'est pas la seule à être dans ce cas, puisqu'elle aperçoit un homme un petit peu plus loin, qui peste également contre le départ du métro. Descendant les escaliers difficilement, la jeune femme rejoint un des sièges de la station, devant le quai. Amèrement, elle s'adresse à l'inconnu. « Pas de chance, n'est-ce pas ? Bordel, faut toujours que ces trucs là m'arrivent ! » Oubliées, ses craintes de se faire agresser, de toute façon s'il voulait l'attaquer, il l'aurait déjà fait, non ?  Il a l'air plutôt inoffensif, malgré tous ses tatouages qui lui recouvrent le corps. Par expérience, Olivia sait que les tatoués sont souvent les plus doux. Elle a rencontré une fois un homme qui donnait l'impression d'être un vrai dur, avec sa barbe, son crâne rasé et ses tatouages, et pourtant à l'intérieur, c'était un vrai nounours. Elle espère que c'est la même chose pour l'autre personne malchanceuse. Posant sa tête entre ses mains, Olivia se demande comment elle va bien pouvoir faire pour rentrer chez elle. Elle songe à appeler quelqu'un, mais qui ? A cette heure-ci, peu peuvent se déplacer à travers la ville pour lui venir à la rescousse.

Olivia est terriblement contrariée, la dernière chose qu'elle souhaite c'est être obligée de passer la nuit ici, sous terre. Elle refuse d'envisager cette possibilité, c'est au dessus de ses forces. Elle a l'habitude du confort, et ne sait pas dormir en dehors d'un lit avec un matelas de la meilleure qualité qui soit. Non, il doit bien y avoir une autre solution. Elle pourrait retourner chez ses amis, mais elle a peur de les déranger, ils doivent être encore sous le choc après la nouvelle qu'ils viennent d'apprendre, et après être partie de chez eux, elle ne veux pas revenir les embêter. Elle pense à appeler Devon, son voisin, qui lui rend régulièrement des services (en se moquant d'elle au passage), mais il doit être déjà couché, il ne veille pas tard. Constance, sa meilleure amie, pourrait peut-être venir l'aider, cependant elle aussi doit déjà être en train de dormir. Olivia songe à quelques autres personnes, mais elles lui semblent toutes être déjà endormies, ou alors la jeune femme craint de les déranger.
Au final, elle ne sait que faire, et cela l'angoisse énormément. Au moins, elle n'est pas toute seule et si jamais quelqu'un de mal intentionné vient, le jeune homme pourra sûrement prendre sa défense. Sauf si c'est lui même qui est mal intentionné, mais il n'a pas l'air de l'être, et Olivia se sent confiante en sa présence, ce qui est bon signe. Il lui répond qu'il se pensait être le plus malchanceux de la terre, ce qui faire légèrement sourire la jeune femme. Étant donné les circonstances, ce n'est pas un sourire franc, lumineux, mais c'est déjà quelque chose. Cela permet à Olivia de retenir ses larmes de colère et de fatigue, elle ne veut surtout pas pleurer devant un inconnu. Déjà qu'elle déteste montrer ses faiblesse devant sa famille et ses proches en général, alors se laisser devant quelqu'un qu'elle n'a jamais vu, c'est strictement inenvisageable. « Oui, on est tous les deux dans la même galère...» Elle soupire un grand coup et profite d'être assise pour retirer ses chaussures, ce qui lui permet de détendre ses pieds ankylosés et de regarder l'ampleur des dégâts sur ses escarpins. Une de ses plus jolies paires qui devient importable, cela ne peut qu'augmenter son irritation. Tout lui tombe dessus en une soirée, pour le coup sa bonne étoile n'est pas avec elle aujourd'hui.
Après un silence qui dure quelques instants, l'inconnu s'assied à proximité et lui demande si elle habite loin. Si seulement elle vivait près d'ici, tout serait bien moins compliqué. Elle ne se retrouverait pas dans cette situation, coincée dans une station de métro. « Malheureusement oui, j'habite à l'autre bout de la ville... Et c'est la même chose pour vous, j'imagine ? » Il serait déjà parti si il habitait à côté. Olivia s'appuie contre le dossier de son siège, essayant désespérément de trouver une solution. Rien ne lui venant à l'esprit, elle se dit que mieux vaut faire passer le temps, puisqu'elle est en compagnie de quelqu'un. « Je m'appelle Olivia, au fait. Et vous ? » Se massant les tempes, la jolie héritière essaie de faire partir le mal de crâne qui l'attaque soudainement, sûrement dû à l'alcool et au stress mélangés.

Olivia peste intérieurement contre ce qui lui arrive, il a fallu qu'elle rate le dernier métro à quelques secondes près, et la voilà dans un joli pétrin. Surtout, elle ne porte pas la tenue la plus adéquate pour rester toute la nuit à l'extérieur. En robe et talons, avec un manteau certes mais pas des plus épais, elle risque de mal supporter le froid. La station est bien tempérée, mais elle préférerait ne pas avoir à rester ici.
Le jeune homme lui dit à son tour comment il s'appelle, Orchid. C'est plutôt beau, et assez rare, en tout cas c'est la première fois que la jeune héritière entend ce prénom. « C'est très original. » Olivia trouve que les orchidées sont de très jolies fleurs. Travaillant chez un fleuriste, elle a appris à connaître le langage des fleurs et à les apprécier. Alors qu'au début elle ne les considérait que comme une simple décoration, désormais elle ne pourrait se passer de leurs effluves, et son appartement est rempli de bouquets en tout genre. Elle s'est intéressée particulièrement à ce que signifient les fleurs, et si sa mémoire est bonne les orchidées en général symbolisent l'amour et la séduction. Selon les couleurs, elles ont un message plus particulier. L'orchidée bleue est gage d'espoir, par exemple.
A plusieurs reprises, la jeune femme entend les gargouillis de l'estomac de son compère, et celui-ci lui propose d'ailleurs d'aller grignoter quelque chose, s'ils trouvent un endroit d'ouvert. Elle a déjà le ventre bien rempli, lorsqu'elle a quitté ses amis ils en étaient au dessert, mais à vrai dire un pancake ne serait pas de refus, et s'il y a du chocolat, c'est encore mieux. Manger peut lui permettre d'oublier un instant ses problèmes, cela ne lui fera pas de mal. Et puis, Orchid ajoute qu'il reste sept heures avant le passage du prochain métro, alors il faut bien faire quelque chose pour s'occuper. « Sept heures... Bon, je vous suis, manger remonte le moral, à ce qu'il paraît. J'espère que cela marche dans les cas désespérés. » La jeune femme remet prestement ses chaussures, avec son talon cassé elle n'a pas du tout fière allure.
Soudainement, le jeune homme part et remonte rapidement les escaliers, abandonnant un instant Olivia sur le quai. La californienne ne comprend pas ce qu'il se passe et reste ahurie un instant, jusqu'à ce qu'il revienne et lui dise qu'ils sont bloqués ici, dans le sous-terrain. « Quoi ?! Non, il doit y avoir une erreur, on n'a pas pu nous enfermer ici ! »  A son tour, elle rejoint la sortie, qui est bien fermée par une grille. Elle a beau la pousser, et crier, personne ne vient. Comment c'est possible ? Il n'y a pas un vigile qui fait le tour, pour vérifier justement que personne n'est resté coincé en bas ? Décidément, elle n'a pas de chance, et elle ne reprendra pas le métro de sitôt.
Rejoignant Orchid, elle s'effondre presque par terre, angoissant pour la suite de la nuit. Elle n'est pas claustrophobe, mais ressent quand même une sensation d'étouffement à l'idée de rester ici pendant plusieurs heures, dans ce tunnel sale. « On ne peut pas appeler quelqu'un, n'importe qui, pour qu'il nous ouvre ? » Elle n'a aucune idée de comment le système de sécurité marche, mais elle ne peut pas croire qu'il n'existe pas de solutions.

Olivia, paniquée à l'idée de rester une nuit entière sous terre, vire déjà à la paranoïa en imaginant le pire : un éboulement qui les rendrait tous les deux définitivement ensevelis sous les gravats, un homme en quête de proies faciles qui profiterait de l'enfermement des deux jeunes gens pour en faire ses prochaines victimes... Et puis, l'idée de devoir rester ici pour la nuit ne cesse de la tourmenter, elle aime le confort, et la station de métro est loin d'être des plus agréables pour se reposer. Heureusement qu'Orchid est là, il essaie de l'apaiser et de la rassurer, ce qui ne peut pas faire de mal étant donné la situation qui semble désespérée. Cependant, elle ne voie pas les choses sous le même angle que lui, qui assure que tout va aller. La voix tremblotante, elle rétorque : « Comment cela pourrait-il aller ? On est coincés ici, pour sept heures ! On va devoir dormir à même le sol, ou sur un de ces sièges dégoûtants ! » La jolie héritière devient presque hystérique, n'ayant plus aucun contrôle sur la situation. Elle a toujours du mal à garder son calme dans ce genre de situations, sauf à de rares occasions où elle arrive à rassembler toute sa force et ainsi garder le contrôle de son corps et de ses paroles, comme lors de la tempête récente à White Oak Station. Après avoir respiré lentement pendant de longs instants, elle arrive à éviter la crise d'angoisse et se rendant compte qu'elle a pu paraître agressive, se tourne vers le jeune homme qui vit la même chose qu'elle. « Excusez-moi, vous n'y êtes pour rien. » Il a l'air lui aussi d'être désemparé, bien qu'il ne cède pas à la panique. Ils sont sûrement tous les deux dans le même état, à la différence près que la jeune femme n'arrive pas à contrôler ses émotions.
Après un moment de réflexion, Orchid dit qu'il y a peut-être une solution, et Olivia espère qu'il a raison. « Oui, on devrait chercher. Vous savez où cela se trouve en général ? » La jeune californienne soupire, elle ne connaît absolument pas le plan du métro et ne sait donc pas où est situé le poste d'appel d'urgence. Elle ne pensait pas qu'un jour elle aurait à l'utiliser, à vrai dire. Ils ne sont pas loin de la sortie et ils sentent donc un appel d'air glacial les envelopper. Le jeune homme lui demande si elle n'a pas trop froid, et lui propose de regagner le bas de la station. « Un petit peu, je n'avais pas prévu que je me retrouverai dans cette situation. Oui, redescendons, de toute façon je ne vois pas quoi faire d'autre. » Elle fouille dans son sac pour sortir son foulard afin de le mettre sur ses épaules, quand elle aperçoit une barre chocolatée au fond. Elle est sûrement là depuis quelques jours, mais comme le jeune homme a l'air affamé, elle lui en propose. « Je viens de retrouver une barre de céréales, vous en voulez ? » Elle avait dû la prendre pour aller travailler, et elle l'avait oubliée dans son sac à main.

Alors que le jeune homme refuse poliment l'offre d'Olivia, celle-ci en profite pour grignoter elle-même sa barre de céréales. Un peu de sucre ne pourra pas lui faire de mal étant donné la situation, et tant pis si la barre est restée plusieurs jours dans son sac. Elle a envie de douceur et le chocolat a des vertus apaisantes, il paraît. Pendant un court instant, elle ne se concentre que sur les saveurs sucrées de son en-cas, ce qui lui permet d'oublier momentanément les circonstances dans lesquelles ils se trouvent.
Orchid décide ensuite d'appeler un annuaire téléphonique afin d'obtenir de l'aide et pouvoir enfin sortir de ce pétrin. La jeune californienne croise les doigts, souhaitant de tout cœur rentrer chez elle. Cependant, elle assiste impuissante à la destruction du mince espoir qui leur restait, alors qu'Orchid perd son sang-froid devant l'incompétence de son interlocutrice au téléphone. Elle soupire en comprenant qu'il n'y a plus de solution possible à leur problème, et pose sa tête entre ses mains, totalement dépassée par les événements. Le jeune tatoué laisse échapper sa colère et Olivia aimerait bien se joindre à lui mais la fatigue est plus forte qu'autre chose. Au final elle est pleine de lassitude ce qui l'empêche d'exprimer sa fureur vis-à-vis de la situation insensée. Elle n'a qu'une envie : dormir, mais elle sait bien que c'est impossible ici, dans cet endroit qu'elle juge insalubre.
Après avoir tourné en rond quelques instants, le jeune homme se rassoit auprès d'elle et un silence pesant dure plusieurs minutes. Olivia ne sait que dire, elle ne le connaît pas et il est difficile d'engager une conversation avec un étranger. Hormis son prénom, elle ne sait strictement rien de lui. Elle ne lui aurait sûrement jamais parlé s'ils ne s'étaient pas tous les deux retrouvés dans cette situation, et les mots lui manquent, elle la bavarde. Heureusement, c'est lui qui prend la parole et il lui demande alors la pire histoire qu'elle a vécue. Orchid n'a pas posé la question la plus facile qu'il soit étant donné le passif de la californienne, il y a beaucoup de choses à raconter. Elle hausse les épaules avec un sourire et essaie de chercher dans sa mémoire ce qu'elle peut bien répondre. Elle ne veut pas lui dévoiler quelque chose de trop personnel, comme la fois où elle s'est rendue compte que son petit-ami n'était qu'un charognard cherchant le buzz, et qu'il avait donc décidé de côtoyer une starlette, trouvant en Olivia la parfaite candidate. En plus de se servir d'elle, il couchait avec une de ses "amies" et c'est en lisant la presse qu'elle l'avait appris. Mais c'est quelque chose qu'elle souhaite garder pour elle et une autre histoire lui vient en tête. « Un jour, j'avais accepté de poser pour un ami peintre et ses collègues. Il m'avait payée à l'avance et je pensais qu'il voulait juste peindre mon portrait. J'avoue que je ne m'étais jamais intéressée à ses œuvres, mais j'aurais dû. Il s'avère qu'il peignait des modèles nus et je devais donc poser totalement déshabillée... Je n'étais pas spécialement pudique mais tous ces regards tournés vers moi, c'était terriblement gênant. Et cela a duré très longtemps, plusieurs heures. » Elle sourit en y repensant, maintenant cela la fait rire mais sur le moment elle avait vécu cette situation très difficilement. Pourtant, elle avait déjà fait la une des magazines people californiens partiellement dénudée mais le plus important était caché, et même si les regards des peintres étaient professionnels cette séance de peinture l'avait rendue terriblement mal à l'aise. « Et vous ? » La jolie héritière est très curieuse et elle a hâte d'entendre l'histoire du jeune homme.