But there’s a story behind everything.
How a picture got on a wall. How a scar got on your face. Sometimes the stories are simple, and sometimes they are hard and heartbreaking.

2003 — Les rayons du soleil brûlaient sa peau délicate, la rendant plus olive, plus matte. Elle appuya un doigt sur son avant-bras, et observa la marque blanche sur sa peau qui s’effaça rapidement. Emma n’attrapait que rarement des coups de soleil. Contrairement à sa mère. Il suffisait qu’elle ne s’expose qu’une vingtaine de minutes, pour devenir rouge cramoisi. Elle ne leur ressemblait pas, à ses parents. Emma était petite, menue, avec de longues boucles brunes qui tombaient le long de ses épaules, des yeux sombres et le teint foncé. Ses parents, eux, avaient la peau claire et les yeux clairs. Elle savait qu’elle était adoptée. C’était flagrant, évident. Ils ne lui avaient jamais caché la vérité, avaient toujours été ouverts au dialogue. Ils l’avaient emmené loin de la famille qui ne voulait pas d’elle. Du haut de ses quinze ans, Emma n’y prêtait pas plus d’importance. L’amour que les Peltier lui portaient était suffisant. Elle n’avait pas besoin de plus. Ne souhaitait rien de plus. « Emma ! Viens voir ce que j’ai trouvé ! » Son attention se reporta sur la mine enjouée de son père. Elle pouvait lire dans son regard brillant, qu’il venait de trouver quelque chose d’étonnant. La passion de ce dernier pour son métier, pour l’archéologie, la faisait vibrer. Un sourire se dessina sur ses lèvres, alors qu’elle posa son bouquin pour le rejoindre.  

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2008 — Les musées sont fascinants. Des siècles d’histoire sont regroupés dans ces derniers. Des milliers de tableaux, de sculptures, d’objets insolites. Elle ne pouvait pas être à Paris, et ne pas aller au Louvre. Elle arpentait les galeries d’un pas lent et paresseux. Ce n'était pas sa première fois ici. Les couloirs de l’Antiquité égyptienne ne connaissaient aucun secret pour elle. Elle connaissait les allées par cœur. Emma pouvait passer des heures, ici, sans se lasser. Ses prunelles sombres étudiaient chaque détail de La Grande Odalisque avec attention. Chaque coup de pinceau était captivant, chaque ombré apportait un petit plus. Le regard de la jeune femme sur le tableau était presque hypnotisant. Le réalisme était surprenant. Elle avait presque l’impression d’être en face d’une photographie. « Magnifique, n’est-ce pas ? » Ses yeux se posèrent sur l’inconnu à ses côtés. « Oui, il est vraiment à couper le souffle. » Souffla-t-elle, un sourire aux lèvres. « Connaissez-vous l’histoire de ce tableau ? » Elle lâcha un rire en secouant la tête. En réalité, elle connaissait parfaitement l’histoire de ce tableau. En tant qu’étudiante en histoire de l’art, elle se devait de la connaître. Mais quelque chose dans l’aisance de cet homme lui donnait envie de l’écouter. « Finn. » Déclara-t-il, en tendant une main large. « Emma. »

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2015 — Les doigts potelés de Wyatt jouaient avec ses mèches de cheveux. Ils s’enroulaient, se perdaient dans la masse, dans la courbe parfaite de ses boucles. Ils tiraient, touchaient et jouaient. Sa voix chantonnait légèrement des paroles incompréhensibles. Mais Emma n’y prêtait pas attention. Son regard était posé sur son mari, sur l’homme qu’elle avait aimé. L’homme en qui elle avait eu une confiance aveugle. Celui qui venait de briser leur mariage. Elle cherchait, bêtement. Elle cherchait une raison, une explication. Mais peut-être qu’il n’y en avait pas. Il s’était perdu dans les bras d’une autre, dans un lit qui n’était pas le leur. Depuis plusieurs mois. Elle lui en voulait, elle le détestait presque. Pour Wyatt, pour avoir détruit cette famille. « Tu passeras par mon avocate pour tes requêtes. » Le divorce était la seule solution. Elle ne voulait plus avoir à faire à lui. Le dégoût, c’est tout ce qu’il lui inspirait. Ses lèvres déposèrent un baiser sur le front de son fils. Leurs bagages traînaient dans l’entrée. Elle avait trouvé un appartement, à quelques heures d’ici, dans une ville qu’elle ne connaissait pas. Un nouveau départ. Finn tourna la tête, et leurs regards se croisèrent. « Emma…s’il te plait. On peut discuter, trouver un compromis…» Elle secoua la tête, avant de prendre la direction de la porte.

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2016 — Il faisait sombre. Un rayon de lumière traversait la fenêtre crasseuse. On pouvait voir des particules de poussière, voler à travers ce rayon. L’endroit était délabré, l’odeur de renfermé bien présente. Le parquet craquait légèrement quand on s’aventurer dans la pièce. Emma lâcha un soupire de contentement. Elle la voulait, cette boutique abandonnée. Bien sûr, il faudrait un travail de rénovation conséquent. Ça ne lui faisait pas peur. Bien au contraire. Elle voulait ouvrir une librairie, parce que les livres avaient toujours fait partis de sa vie. Elle voulait faire partager sa passion pour la littérature, pour cet art. Ses économies étaient suffisantes pour racheter l’endroit et pour faire une partie des rénovations. Son divorce aurait été l’occasion de ruiner son ex-mari. Mais ce n’était pas elle, ce n’était pas ce qu’elle voulait. Elle avait refusé le moindre centime de cet argent qu’elle considérait comme sale. « Alors, mademoiselle ? » Elle tourna légèrement la tête pour poser ses yeux sur l’agent immobilier. Un sourire se dessina sur ses lèvres. « Je la prends. » Déclara-t-elle, déterminée. Elle pouvait déjà imaginer les rangées remplies d’étagères, de livres. L’odeur de renfermé remplacée par celle spécifique des livres. C’était un rêve, un rêve qu’elle pouvait enfin réaliser.

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2016 — Le soleil pointait enfin le bout de son nez. Ses rayons réchauffaient sa peau. C’était agréable. White Oak Station était une ville qu’elle avait appris à aimer. Son charme et ses habitants y étaient pour beaucoup. Débarquer ici, seule, avait été une sorte de défi. Mais sa bonne humeur et sa détermination l’avaient encouragé à s’intégrer. La lanière du sac qu’elle portait, lui coupait légèrement la circulation de ses doigts. Les yeux plissés, elle avançait dans les rues pour retourner à son appartement. Elle s’arrêta net quand elle aperçut la silhouette familière d’un homme. Son front se plissa. L’incompréhension colorait les traits de son visage. A chaque fois qu’elle croisait son regard, une sensation étrange s’emparait d’elle. Un mélange entre l’exaspération et la confusion. Ils ne se connaissaient pas. Emma était en ville que depuis six mois. Elle ignorait tout de lui, sauf qu’il était l’auteur de livres qu’elle lisait à Wyatt. Un auteur et dessinateur à succès. Et pourtant, à chaque fois, il la fuyait. Il l’évitait, il se faisait discret, presque invisible. Son comportement était agaçant. Il avait même été jusqu’à refuser de signer un de ses livres. Emma était perdue. Elle cherchait ce qu’elle aurait pu faire. Mais demander une explication semblait relever de l’impossible. Elle soupira quand il détourna le regard, et partit dans la direction opposée. Il était une énigme, qu’elle ne pouvait s’empêcher de vouloir déchiffrer.