just want to see you

sarah & juliet

Ce matin là en arrivant au travail et après avoir déposé Louys Timéo chez sa nourrice, mon patron était venu me voir pour me proposer de m'occuper d'une nouvelle affaire. Une femme, battue par son mari qui avait été admise quelques jours plus tôt à l'hôpital de la ville, et étant actuellement dans le coma. Sans hésitation, j'avais accepté de m'en occuper. Les affaires familiales, c'est mon avenir même si pour le moment je m'occupe un peu de tout. Après avoir passé toute la matinée à lire le dossier, j'avais décidé d'aller manger rapidement un baggel à la cafétéria du cabinet histoire de ne pas perdre de temps, et retourner immédiatement dans mon bureau. Je croque dans mon baggel, et reçoit une photo de la nourrice comme d'habitude, ce qui me fait sourire. C'est notre petit rituel depuis le début du mois de septembre. Chaque midi, elle m'envoie une photo pour me rassurer, me dire que tout va bien. Et pour rien au monde je ne voudrais changer cela.

Au alentour de midi et demi, je reçois un coup de téléphone de la part de l'hôpital dans lequel la femme est hospitalisé. C'est le chef de service, qui m'annonce que la jeune femme vient de se réveiller mais qu'elle a des lésions cérébrales importantes, et de nombreux os brisés. Ne voulant pas montrer mon angoisse au téléphone, je demande quand est-ce que je pourrais m'entretenir avec elle, car il n'est pas dans mes habitudes de défendre un dossier sans même avoir parlé à la personne avant. Et puis, c'est sa famille qui a porté plainte, et pas elle, et il me faut l'accord de la victime avant même de commencer les démarches. Le médecin m'annonce que je ne pourrais pas la voir avant quelques jours, le temps qu'elle se remette un peu et qu'elle reprenne ses esprits. J’acquiesce, et le remercie. « Merci beaucoup. Au revoir. » Je repose mon téléphone sur son socle, et me retourne en écarquillant les yeux.

Ma meilleure amie est là, avec un sourire comme je l'aime. « Surprise ! » Je lui fais un immense sourire, et me lève afin d'aller la serrer dans mes bras. Sa visite tombe très bien, puisque j'allais justement prendre une pause histoire de me changer un peu les idées. Sarah, c'est la personne qui a été là pour moi dans les moments les plus difficiles. Peut être même plus présente que ma propre mère. C'est elle qui m'a tenu la main lors de mon accouchement, c'est elle qui m'a rassuré lorsque j'ai découvert ma grossesse, c'est elle qui est devenu ma première amie en étant enfant. Et surtout, c'est elle qui arrive à me faire sourire lorsque rien ne va. Sarah, c'est vraiment un petit ange gardien, et le fait de la voir, ici, au Canada me retire déjà quelques angoisses que j'ai pu me faire lorsque j'étais seule dans ce pays. « Sarah ! Comment ça va ? » Je la serre encore un peu, puis me retire de ses bras pour me mettre en face d'elle. « Je suis tellement contente de te voir... tu tombes à pic en plus. » Je lui souris, à mon tour.

 

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sarah & juliet

Sarah me serre elle aussi, puis s’écarte un peu et répond à ma question en regardant mon collègue de bureau, Mikaels. « Tout va bien, j'avais un peu de temps avant que mon service au café ne démarre et je me disais que je pouvais en profiter pour passer te voir... vous voir. » Mikaels lui souris, et je fais de même. La visite de Sarah allait me permettre de me détendre un peu avant de repartir me noyer dans le code pénal, et mes yeux s’écarquillent quand je m’aperçois qu’elle a apporté en sa compagnie du chocolat chaud… et des petits gâteaux. Si Sarah n’était pas étudiante en littérature, elle aurait facilement pu faire cuisinière. « J'ai pensé que tu aurais besoin de réconfort et de force. » Je la regarde en souriant. Il est vrai que l’affaire de la femme battue m’a un peu plombé le moral, mais heureusement, Sarah est là pour me mettre à nouveau de bonne humeur. Je la regarde. « Oh c’est adorable, merci beaucoup ! C’est exactement ce que j’avais besoin. » Elle poursuit juste après à voix basse, et je m’assoie sur mon siège en lui faisant signe de s’asseoir en face de moi sur les fauteuils des clients à la base. « Tu vas réussir à éblouir tes collègues, il suffit juste que tu ne lâches rien. » Je rougie un peu. Il est vrai qu’être avocate, c’est d’abord un rêve de gamine, qui devient désormais de plus en plus réelle, et parfois j’ai peur que cela ne redevienne qu’un rêve. Même si je travaillais encore à mi temps il y a encore quelques semaines, je suis désormais officiellement avocate dans ce cabinet, et le travail s’accumule. J’ai parfois même l’impression de ne plus profiter de mon petit garçon suite à la fatigue de la fin de la journée. Je bois un peu de chocolat chaud. « Je ne compte pas lâcher… mais parfois j’ai vraiment besoin d’une pause dans la journée. » Je baisse un peu la tête. Depuis mon officialisation d’emploi ici, les dossiers s’accumulent. M’occupant du familial, j’ai reçu la semaine dernière une petite fille de sept ans qui était maltraitée par ses parents. Au début, j’avais du mal à me rendre neutre face à elle, et puis finalement, c’est  une question d’habitude désormais. « C'était un coup de fil professionnel ? » Elle attrape un gâteau, et je fais de même en croquant dans une des petites sardines, tout en hochant la tête. « Oui, c’était l’hôpital. » Je me tourne un instant vers Mikaels, pour savoir si j’avais le droit de parler de l’affaire un peu, sans pour autant en donner les détails, histoire d’être sur. Il hoche la tête, puis me dit qu’il va prendre sa pause de midi, et part en nous souhaitant un bon rendez vous en rigolant. Je rigole aussi, puis me tourne à nouveau vers Sarah. « Je découvre une nouvelle facette de la société depuis quelques semaines, c’est assez terrifiant parfois. » Je baisse un peu la tête, en pensant à ma nouvelle affaire.