Il faut répondre à l'appel de l'aventure ! Un peu, mais pas trop, se disait Sam. L'aventure l'avait tiré du lit il y avait quelques semaines, c'était même des mois qui s'étaient écoulés depuis qu'il avait quitté le domicile familial, et il s'en serait bien passé. L'aventure ça va bien un temps, mais faut pas poussé mémé dans les orties ! Il en avait plus qu'assez des imprévus, des inédits et de tout le reste. Il voulait se faire réveiller par un réveil, dans un lit avec une couette, pas par des pigeons trop téméraires sur le sol. Le seul appel auquel il comptait répondre c'était à celui de Yaël. Il était son sauveur, son héros dont unique pouvoir était de lui procurer un toit au dessus de la tête. Et si certains trouvent que ça n'est pas grand chose, c'était déjà énorme pour le jeune homme !
En prévision du grand jour où il emménagerait enfin, Samuel avait préparer ses affaires. Déjà il avait du les retrouver parce qu'il les avait planqué de peur qu'on ne les lui vole et il les avait un peu trop bien caché... Heureusement qu'il ne s'y était pas pris au dernier moment ! Du temps à perdre, il en avait eu, et il l'avait pleinement exploité dans la recherche active de ses effets personnels. Quand il eut remis la main sur sa valise pleine de fringue et d'autres trucs inutiles pour vivre dans la rue (comme un ordinateur portable ou une 3DS), il avait fait une dernière fois le tour du quartier qu'il squattait. Il avait partagé un petit déjeuner avec Creep, un vieux mendiant qui lui était sympathique, avait fumé quelques clopes avec Daisy, et finalement avait organisé une sorte de barbecue dont le feu était alimenter par le carton qui l'avait abrité pendant ces quelques temps sur le pavé. Ah ce bon vieux carton ! Consolidé avec de la tôle et planqué entre deux poubelles, à l'abri des intempéries mais pas des odeurs... à la fin du « repas », il leur souhaita à tous beaucoup de courage : lui s'en allait vers un futur qu'il espérait plus beau !
Il abordait le sourire du conquérant, de l'homme qui a marché sur la lune, de celui à qui la vie sourie et en profitait largement : ses joues lui faisaient même mal. Seulement, il avait trop peur de ne plus avoir de raison de se réjouir d'ici quelques jours. Il fallait qu'il fasse des réserves !
Quand il arriva à Stanford Alley, il se sentit étonnamment stressé. Il gara sa Vespa, gentiment offerte par Cass, dans la rue et chercha sa nouvelle maison. Il avait les mains moites tant il était excité et apeuré à la fois. Ça c'était la véritable aventure pour lui ! Il se jetait dans la gueule du loup, il essayait de nouvelles choses et il était prêt à se foirer. Au moins il le ferait dans le confort ! Maintenant que Sam était devant la porte, il restait immobile, il lui fallait sonner puisqu'il n'avait pas encore les clefs mais il ne fit aucun geste dans ce sens. Il prit une profonde inspiration, un sourire serein sur les lèvres, et leva les yeux au ciel. Il se sentit minuscule face à lui, pourquoi ne se faisait-il pas aspirer ? Ses pieds resté ancrés sur le sol, alors que tout aurait pu être dans un sens ou un autre.
Il suffisait souvent de voir les choses autrement pour les comprendre et Sam savait que de là haut, on devait en comprendre des choses ! C'était un endroit qui lui était donc interdit puisqu'il devait demeurer dans son ignorance crasse à vivre seconde par seconde sans rien savoir de son futur. Jamais on ne lui permettrait de préparer ses coups à l'avance : la vie n'était pas un jeu d'échec. De toute façon, Samuel était nul aux échecs.
Une dernière fois, il regarda derrière lui et puis il sonna. Sa grosse valise était dans un état pas possible, et lui-même portait plusieurs couches de fringues dont une couverture dont le bleu était devenu sale. Il avait la parfaite dégaine du mec qui débarque d'une autre planète, il était l'alien à la barbe pas rasée, aux cernes profondes et aux cheveux fous mais il possédait le sourire des hommes. C'était ce qu'il avait de plus précieux et il comptait bien le conserver quoiqu'il arrive.