~ À QUOI RESSEMBLAIT TA VIE AU LYCÉE?
La vie au lycée ? Ca ressemblait à l’extérieur, bébés dreads au vent. Je venais de décider de succomber à la mode familiale. Un moyen sans doute de gagner en originalité et de marquer un peu plus la ressemblance avec mes parents, une façon de me rattacher à eux. La famille rasta. Je ne crois pas avoir suivi beaucoup de cours, parce que j'aimais mieux traîner dehors, plutôt que d'étudier. J'étais un collectionneur de petits animaux morts, de peaux de serpent, de cailloux rigolos et colorés, de prospectus de toutes les villes ou on pouvait aller, les cartes postales, les tickets de bus, de métro, de train ou d'avion, et j'étais aussi un collectionneur de mots et d'heures de colles. J'étais un élément perturbateur, je crois, a cause de mes questions et de ma manie de tout pousser au débat. Les salles de cours ne sont pas faites pour moi, c'est d'un ennui mortel. J'ai toujours eu des opinions plutôt tranchées, parce qu'on ne m'a jamais empêché. Je n'aime pas quand je parle à une machine et je n'aime pas les téléphones et je n'aime pas qu'on me flique, et je n'aime pas l'autorité, et je n'aime pas les professeurs qui me regardent avec leur air paternaliste comme si j'avais eu les pires parents du monde, je n'aime pas qu'on me juge. Il y a tout un tas de choses que je n'aime pas. Je n'aime pas le lycée. Je m'entend bien avec les élèves de ma classe, je ne reste jamais assez longtemps pour me disputer, donc j'ai de bons rapports avec mes camarades de classe, mais je ne suis pas quelqu'un qui tient en place longtemps. Je dois surement ca à mes parents : déracinés tout les deux, ils ne supportent pas de rester au même endroit et déménagent tout les ans, changent de pays. Je n'ai jamais eu d'amitié durable, et je n'en ai jamais réellement cherché, comblé par ce mode de vie. J'ai vécu le lycée comme une mauvaise grippe, terré au fond de mon lit tard le matin. J'ai vécu le lycée comme un claustrophobe. Enfin, les lycées. J'avais de bons résultats scolaires dans les matières qui me plaisaient : la littérature, les langues, les mathématiques. Pour le reste, je ne faisais pas vraiment d'efforts. Mes parents ont estimé que je devais avoir le bac, au minimum. Ils sont cools, franchement, un peu hippie sur les bord, et ne m'ont jamais contraint a rien, ne m'ont jamais puni pour une sale note ou pour mes absences a répétition. Mes parents ne pensent pas que les études prévalent sur la vie. Ils pensent par contre qu'avoir le bac est nécessaire à l'heure actuelle pour trouver du travail. Alors j'ai passé mon bac, et je l'ai eu, sans avoir des notes exceptionnelles, ni affreusement mauvaises. J'ai rayé ce passage de ma vie de ma mémoire, comme on chasse un souvenir gênant.

   ~ ES-TU HEUREUX PRÉSENTEMENT?
La maintenant tout de suite, je me suis fait mal au petit doigt de pied en cognant contre un caillou, donc je sautille comme un demeuré en grommelant. Je ne suis pas heureux, mais en colère contre tout les cailloux de la terre. Et le reste du temps ? Il est tellement fragmenté, le temps, comment répondre à cette question ? Je suis souvent en colère, parce que souvent, je ne comprend pas. Je suis curieux, alors je veux comprendre, je veux voir et découvrir, mais je suis amoureux des questions et les réponses me rendent souvent triste. On devrait pouvoir donner plusieurs réponses aux questions, se serait plus joyeux. On devrait pouvoir choisir tout le temps. Je n'aime pas manquer de choix. Il y a des hauts, des bas, je ne suis pas malheureux, là maintenant, mais peut être demain, je ne suis pas heureux, mais peut être que je le serais tout à l'heure ? Je suis vivant, c'est bien suffisant, et c'est une aventure palpitante.

   ~ OÙ TE VOIS-TU DANS DIX ANS?
Au dessus de mes pieds, si possible. Parce que je les aime bien, mes pieds, j'aimerais les garder. Et eux, ou seront ils ? Peut être ici, peut être ailleurs, peut être revenus, peut être plantés et enracinés. Peut être accompagnés d'autres pieds, peut être solitaires. Peut être engoncés dans des palmes au fond d'une mer bleue turquoise, peut être dans des chaussures de randonnée en train d'escalader une montagne, peut être tout nus dans un lit, en train de s'étirer les orteilles pour faire la grasse matinée. Dans 10 ans, même jour, même heure, ou serais-je ? Je ne vois pas si loin. Je n'aime pas le determinisme. Le point d'interrogation me plait plus que la réponse, la réponse sera toujours imparfaite, tronquée, assujettie, le point d'interrogation est multipl, infini. J'aime mieux répondre ca, alors. Dans dis ans, je serais là : ?.

PRÉNOM ET/OU PSEUDO: ailesnoires ÂGE: 21 PAYS: France PRÉSENCE: Aléatoire ? COMMENT AVEZ-VOUS CONNU LE FORUM? A force de recherches internet, mais ce n'est pas moi qui l'ai trouvé, c'est Abimael (qui commencera sa fiche ce soir)  PERSONNAGE INVENTÉ OU SCÉNARIO? Inventé AUTRE CHOSE À AJOUTER? Joli forum, et jolie bannière, même si pour le reste je ne suis pas fan du rose    

Je crois que les étoiles murmurent. Je crois que mon oreiller cache un troupeau de chevaux, ca galope quand je pose l'oreille contre, mais mon oreiller ne cache le troupeau que quand il fait bien noir. Je crois que mon coeur palpite a mes oreilles quand je cours trop fort. Je crois que le noir a été inventé par un sadique pour qu'on se cogne partout, et qu'un génie a inventé la lumière, je crois que le feu de bois sentirait meilleur si on avait tout le temps des marshmallows a faire griller dedans. Je crois que je voudrais bien un copain de mon âge, parce que doudou il est pas très doué pour s'exprimer, il a jamais voulu parler. Peut être que doudou aime le silence. J'aime le silence aussi, faut dire, mais parfois, j'aimerais bien pouvoir discuter. Maman discute, mais je ne peut pas tout lui dire. Je ne peux pas tout dire à papa non plus. Je parle aux gens qu'on rencontre. Je crois que je voudrais dormir ailleurs qu'à l'arrière du van, j'ai envie d'un hamac. Je crois que je voudrais arréter de tourner comme une toupie, je crois que je voudrais... Je ne sais pas ce que je veux. Je pense très fort, mais je ne parle pas assez bien pour tout dire, alors papa me met sur ses épaules et se met à courir. Je crois que je voudrais des jambes aussi grandes que les siennes, parce qu'il va si vite. Je crois que j'oublie ce que je pensais, j'étend juste les bras très haut et je crie, j'ai la voix aigue, parce que j'ai 5 ans. Et je ne suis pas pressé de la perdre, hein. D'abord, je dois apprendre à faire exploser un verre en cristal, comme dans Tintin. C'est le vieux Emile qui m'a prété Tintin. Papa et Maman, ca fait deux jours qu'ils conduisent le Van, on s'arrète pas souvent. Juste pour le pipi et pour manger. Mais là, ils se sont arrétés plus longtemps, on est au bord de la mer, on a planté la tente. Il fait froit, on est en janvier, la plage est deserte. On est allés pêcher des coquillages, et on a fait un feu. Papa a fait bouillir l'eau pour le riz en tenant la bouilloire au dessus du feu avec un baton. Maman me montre des petites lumières de l'autre coté de l'eau. Elle me dit "tu vois ? C'est là bas qu'on va." Je dit d'accord. Je sais que là bas, on va y rester un peu. Alors je veux bien. Papa et Maman fument la cigarette magique qui les fait rire très fort. Moi je dois attendre ils m'ont dit, c'est un secret de grande personne. Moi je ne veux pas grandir, je ne suis pas pressé, alors. Je crois que les lumières dansent sur l'eau, elles valsent, c'est beau. Je m'endors.

Je crois que la Terre est plate. On me dit qu'elle est ronde, mais je n'ai jamais vu la terre d'assez loin pour l'attester, alors peut être qu'on me ment. Peut être qu'elle est plate ? Je voudrais qu'elle soit plate, alors je le crois. La Terre est plate. Je veux aller au bout du monde, là ou tout se précipite dans les étoiles, je veux voir voler les gouttes d'une planète à l'autre, c'est surement possible, et je construirait ma cabane sur pilotis aux portes de l'inconnu, et je m'envolerais accroché à une corde, je deviendrais un cerf-volant. J'ai 8 ans, et quand je serais grand, je serais explorateur. Et je trouverais le bout du monde.

Je crois que le soleil est amoureux de la lune, il court très vite autour de nous pour la rattraper mais comme la Terre est vraiment trop grande il n'y arrive pas, et il sombre chaque fois, ses pieds sanglants parrent les nuages de reflets rouges, roses, orangés, il crie sa peine en sombrant dans les flots ou entre deux montagnes, il s'éteint de chagrin. La lune, c'est une dame, je la crois précieuse, parce qu'elle brille, elle aime bien reluire. Elle est jalouse des étoiles, qui brillent plus qu'elle, alors elle décide d'être plus grande, plus ronde, plus jolie, et elle grossit, grossit, grossit. Puis elle ne peut plus, elle n'est plus présentable, alors elle cesse de courir, elle cesse de se montrer et de faire la maligne, elle va là ou vont les âmes égarées, les âmes qui se cherchent, elle va se baptiser aux vents d'ailleurs, elle va au bout du monde, et le soleil la trouve, une fois par mois. On ne les voit pas, ils sont plutôt discrets tout les deux. Le ciel est vide, ces soirs là. J'ai 14 ans, et je rêve du bout du monde paresseusement, je le fantasme et les jours passent.

Je crois que la poussière en prisme dans les rayons de lumière est un esprit malin. Il voyage et se pose, il s'envole, décolle, redécolle, cabriole. Je l'observe jusqu'à plus soif, assis derrière mon bureau d'écolier. Les heures de colle sont toujours longues à fini. Je dessine mon ailleurs, parce que j'ai établi un plan d'action : il me faut le bac, puis je dois travailler un peu, maman m'a expliqué. Pour pouvoir trouver assez facilement ensuite. Il faut du vrai boulot, une année ou deux consécutives, même à des endroits différents, pas juste le travail d'été ou le coup de main sur le marché, non, du vrai travail. J'ai commencé à cherché, parce que je passe le bac bientôt. Et je soupire sur mes feuilles que je n'ai jamais lues, parce que j'ai scanné les cours d'une fille de ma classe. Et je regarde ca sans rien voir, parce que je me languis. Il n'y a pas d'école d'explorateur de bout du monde, on a déjà trouvé tout les bouts du monde qu'on voulait, à croire qu'on en a plus soif. Alors je ne donne pas de projet d'avenir, moi je le connait, ca me suffit. Encore quelques mois. J'ai 18 ans.

J'ai 25 ans, et je suis parti. J'ai travaillé, j'ai gagné de l'argent, je l'ai perdu, j'ai marché, j'ai fait du stop, j'ai pris l'avion, le train et le bateau tout seul, je suis allé chercher le bout du monde, mais chaque fois, j'ai trouvé des endroits qui n'avaient pas de fin, alors je les ai visités. Je commence à me dire que peut être que le bout de mon monde n'existe pas. Je suis arrivé au Canada il y a presque un an, mais ce territoire est tellement vaste, je ne pouvais pas repartir si vite, alors je l'ai sillonné. Maintenant, je suis fatigué. J'ai trouvé un petit appartement, ici, et un job en tant que serveur, un petit cdd, le patron est gentil. J'ai besoin de reprendre mon souffle, j'ai besoin d'envoyer une carte postale, mais j'ai perdu le contact, j'ai perdu l'adresse, et mes parents ont un foyer map monde. J'ai besoin de contact, j'ai envie de gens, alors je me dit que je vais rester ici, un peu, on verra bien. Peut être que le bout du monde n'existe pas. Ou alors, peut être que c'est un point d'interrogation. Je n'aime pas les déterminismes. Je n'aime pas les réponses. Peut être ma réponse est elle un point d'interrogation. Peut être que c'est ca, le bout du monde.