Un monde parallèle semblait se dessiner sous ses yeux à demi clos. Il voyageait sans même bouger de sa place, planait sans avoir peur de se casser la gueule, pour une fois. Oh, ces soirées étaient courantes. Il se perdait un moment dans les méandres de la consommation, ne savait pas s’arrêter. Mais cette fois-là sans doute fut celle de trop, pour la fratrie Radulovich. Une nuit aux urgences, une sœur au bord de la mort. Jake n’avait jamais approché de si près l’au-delà et à vrai dire il n’avait jamais pensé à ça. Mais de voir que sa sœur avait si facilement frôlé l’inertie totale… l’avait clairement fait réfléchir. Quel grand frère aurait accepté que sa petite sœur consomme avec lui sans jamais refuser de la faire plonger dans son monde ? C’était lui qui lui avait fait découvrir ce petit paradis qui devenait à présent un enfer. C’était de sa faute et il le savait parfaitement. Le remord le prit, le rongea même, l’acheva presque. Jake pressa la main de la petite Radulovich, la serra fort dans la sienne. Elle dormait peut-être trop profondément pour l’entendre, mais il se devait de la prévenir. « Toutes nos conneries, c’est fini. On arrête. Plus jamais. Tu m’entends ? » La voix tremblante, il avait bien du mal à la regarder elle, et non les murs froids de cet hôpital de malheur. « Si je te reprends ne serait-ce qu’une fois avec de la drogue… je… ça se passera très mal. » Bien sûr que le tatoué aurait du mal à arrêter. Mais sa volonté était telle qu’il savait que ce serait faisable : perdre sa sœur était hors de question. Il l’aimait trop, avait trop besoin d’elle. L’histoire connut un nouveau Jake, protecteur, faisant attention. Peut-être un peu trop sur le dos de la cadette mais pour son bien.

Tu l’auras sans doute compris, Silke et Jake sont tout l’un pour l’autre. Oh, ils ne le diront que rarement avec des mots, mais se le prouveront sans cesse de façons bien particulières. Leur manière à eux. Jake est sans cesse là pour elle, peut-être trop, mais il veut la protéger et tient à ce qu’elle arrête la drogue comme lui bien que ce soit compliqué. Il le sait, et est sans cesse sur son dos. Silke ne finirait-elle pas par vouloir un peu de liberté ?