Devant les portes grandes ouvertes de sa penderie, Biddy était perplexe. Elle n’avait aucune idée de comment s’habiller pour la sortie qu’elle avait de prévu avec Fleur. Hier, quand Biddy eut fini de terminer le ménage, les deux amies avaient papoté autour d’un thé et, un peu sur un coup de tête, elles avaient décidé de partir en balade le lendemain – aujourd’hui, donc. Elles avaient toutes les deux leur week-end de libre, alors elles en avaient profité. Elles s’étaient rencontrés tout bêtement chez Fleur, où Biddy faisait le ménage une fois par semaine, et elles avaient sympathisé. C’était la première fois que Biddy s’entendait aussi bien avec un de ses clients, qui se montraient d’ordinaire simplement cordiales. Certains étaient adorables comme tout, mais elle n’était jamais très intime avec eux. Avec Fleur, elles avaient accroché dès le début. Elles en étaient venues à se raconter leur vie respective alors que Biddy faisait la poussière sur les meubles du salon, mais pas les choses banales qu’elle sortait à tous les petits vieux chez qui elle travaillait ; non, Biddy lui avait fait part de choses personnelles, du genre qu’on ne dit qu’à ses amis proches. Voilà comment leur amitié était partie ; mais, au-delà des séances de ménage où elles papotaient, les deux ne s’étaient jamais vraiment vues. Cette balade était donc l’occasion de se retrouver en dehors des heures de ménage et d’apprendre à se connaître davantage encore. Biddy avait proposé une balade, instinctivement. Cela permettait d’être tranquille, de ne pas être dérangé par les bavardages des gens sur la terrasse d’un café, de se ressourcer aussi, et de ne pas être obligé de parler sans arrêt. Dans une conversation en face à face, attablé à une table, un blanc était toujours plus gênant que lorsque l’on marchait – avec une personne dont on n’était pas encore très proche, en tout cas. Et puis, cela faisait longtemps que Biddy n’avait pas fait de balades à la campagne et cela lui manquait. Quand elle voyageait, elle visitait bien sûr, mais elle découvrait aussi beaucoup le paysage en randonnant, ou les villes et villages en marchant. Elle avait toujours une tenue pour ça, à la fois sportive pour l’occasion mais aussi classe et distinguée, pour coller à son image. Or là, Biddy n’arrivait pas à mettre la main sur la moindre tenue qui associait sport et chic. Elle ne comprenait pas pourquoi, parce qu’elle ne se rappelait pas avoir jeté quoique ce soit. Tout ce qu’elle trouvait, c’était ses habits du quotidien ou ses haillons pour faire le ménage. Il n’y avait pas d’entre deux. C’était donc une des rares fois où Biddy était perdue en ce qui concernait la tenue vestimentaire à adopter. Elle parcouru du regard une énième fois l’ensemble de ses habits, avant d’opter pour un short en jersey de coton assez souple pour qu’elle soit à l’aise, et un débardeur basique, qui moulait ses formes sans être trop décolleté. Ce n’était pas l’idéal, elle aurait préféré son short Nike et sa brassière de sport, mais il fallait faire avec ce qu’elle avait. Dix minutes plus tard, elle se trouvait en bas de son immeuble, vérifiant son téléphone pour s’assurer que Fleur n’avait pas annoncé de retard. La voiture de Biddy étant chez le garagiste, Fleur s’était proposée pour conduire jusqu’à la forêt, à quelques kilomètres de White Oak Station. Biddy se passa la main dans les cheveux, verrouilla son téléphone et esquissa un grand sourire, en apercevant la voiture de son amie.
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