☆ a handful of laugh (may-line)

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a handful of laugh

Hey, America, Let's turn it up, Yeah, check out our style 'Cause you know you're never fully dressed without a smile. Your clothes may be Chanel, Gucci, Your shoes crocodile, But baby, you're never fully dressed without a smile. But if you stand for nothing, you'll fall for it all 'Cause we got all we need, got love and more. You're never fully dressed without a smile. And if you stand for something, you can have it all 'Cause if it's real, you'll open every door. You're never fully dressed without a smile. Ready or not, Give all we got, Yeah, you can't deny. That baby, you're never fully dressed without a smile.

Nina ne pouvait pas s'empêcher de sourire et c'était tout juste si elle ne se frottait pas les mains à la manière d'une personne machiavélique ; elle l'était presque, pourtant. La pauvre, pensa-t-elle. La blonde avait bien prévu le coup, et c'était May-Line qui n'en serait sûrement pas enjouée. Mais peu importe, il fallait bien qu'elle sorte un petit peu, qu'elle relève la tête de ses bouquins et qu'elle profite de la vie qui s'offrait à elle. Il y avait trop de choses à faire à White Oak Station pour qu'elle reste enfermée chez elle avec ses livres et ses classeurs. Nina l'adorait et c'était bien pour ça qu'elle faisait ça. Elle avait envie de faire des soirées avec elle, elle avait envie de s'amuser avec elle ; mais May-Line était loin de se mettre en mini-jupe et de se rendre à l'Aurora, la boîte de nuit de la ville. Il fallait y aller en douceur, et Nina avait trouvé l'occasion rêvée. Elle trépignait d'impatience. Elle avait donné rendez-vous à son amie devant l'université, pour ne pas qu'elle se doute de quoique ce soit et fasse demi-tour. Elles iraient au Music More en bus : à cette heure-ci, il y en avait encore. Pour le retour, Nina avait demandé à Edi de venir les chercher, et il avait accepté. Il n'avait pas bien d'autre choix, en même temps. Au début, quand il avait apparu dans l'embrasure de la porte d'entrée, elle avait accueilli son frère avec grand plaisir. Elle avait été si heureuse de le retrouver après quatre ans de silence radio qu'elle n'avait pas pu lui refuser l'hébergement. Elle n'avait pas non plus pu refuser de tenir le secret de sa présence à White Oak Station vis à vis de ses parents... Mais cela faisait huit mois. Huit mois pendant lesquels elle l'avait laissé prendre une chambre de la maison que ses parents payaient, huit mois qu'elle avait dû leur cacher le fait que son frère était revenu, huit mois qu'il était là, huit mois qu'il n'avait aucune intention de partir. Elle commençait sérieusement à en avoir marre, Nina. Elle en avait marre parce que, si au début Edi s'était plié à toutes les volontés de sa sœur, ce n'était plus vraiment le cas à présent. Il ne faisait plus aussi souvent à manger, ni aussi souvent le ménage, et il osait même se plaindre lorsque Nina ramenait des amies qui riaient un peu trop fort. Elle le lui avait fait remarquer, tout ça, que c'était n'importe quoi, qu'il n'était pas chez lui -ce à quoi il avait répondu qu'il n'était pas plus chez lui qu'elle était chez elle, parce qu'à sa connaissance ce n'était pas elle qui payait la maison dans laquelle elle habitait-, qu'il n'avait pas le droit de faire ce qu'il voulait, quand ça lui chantait. Elle avait fini par le menacer, en lui criant que s'il continuait à jouer au con, comme ça, elle prendrait le premier bus pour aller retrouver ses parents et tout leur avouer. Edi avait moins rigolé, tout de suite, et depuis il faisait un petit peu plus d'efforts. Un petit peu plus. Au moins, il ne refusait plus ce genre de services ; emmener sa sœur quelque part où aller la chercher, c'était quelque chose qui était à sa portée et qu'il était obligé d'accepter.

Lorsqu'une brune entra dans le champ de vision de Nina, elle sauta sur ses deux pieds et couru presque dans sa direction. « Coucouuuuu ! » Elle était visiblement excitée et débordait clairement d'énergie. Elle prit son amie par les épaules et déposa un bisous sur chacune de ses joues. « Alors, comment ça va ? J'espère que t'es en forme, May. Aaaaah, tu vas voir, ça va être drôle ! Tellement drôle ! » Nina jubilait. En effet, drôle, ça allait l'être. Peu importe comment la soirée tournait. Elle ne l'emmenait nulle autre part qu'au More Music, la salle de spectacle de White Oak Station, ou un humoriste canadien se produisait en cette soirée de mai. Et un humoriste, cela faisait rire. Normalement. « Aller, oust, oust ! » Nina prit May-Line par le poignet et l'entraîna en direction de l'arrêt de bus, à quelques mètres du portail de l'université. Arrivée là-bas, elle sorti sa carte et la passa devant l'automate, qui bipa après quelques secondes. « Tu as ta carte ? Ou un ticket ? » demanda Nina, avant de se tourner vers le panneau d'information électronique. Il indiquait que le prochain bus arrivait dans cinq minutes. Ajoutées au quinze minutes de trajet, cela en faisait vingt avant que May-Line découvre de quoi il retournait. Nina avait hâte que la soirée commence.

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Don’t walk behind me; I may not lead. Don’t walk in front of me; I may not follow. Just walk beside me and be my friend.

May-Line avait à plusieurs reprises eu la fâcheuse envie d'envoyer un SMS à son amie Nina et annuler leur soirée pour rester bien au chaud au fond de son lit, un livre à la main tout en sirotant un chocolat chaud dans son mug La petite sirène, mais sa bonne conscience l'en avait empêché. Non pas qu'elle n'avait pas confiance en Nina, mais elle vivait dans un monde un peu différent du sien, là où les bars et les boîtes de nuits n'existent pas et où les minis jupes et le maquille ne sont même pas en option. Certes, le lieu de rendez-vous ne laissait rien à présager de louche ou de mauvais, mais sait-on jamais. Dans tous les cas, quoi qu'elles allaient faire, la jeune fille savait d'ores et déjà qu'elle allait regretter sa couette. Elle soupira en enfilant une petite paire de ballerine qui accompagnerait très bien son jean couleur saumon et son petit top blanc à manche chauve-souris et fourra dans un petit sac sa carte de bus, son porte-monnaie, ses sous et compagnie. Elle attrapa un gilet accroché au porte manteau avant de sortir de chez elle en poussant un long soupir. Allez, remue-toi un peu, grosse vache, pensa-t-elle, tu ne vas pas rester enfermer chez toi pour les restant de tes jours ! Elle descendit d'un pas lent les marches de son immeuble avant de le quitter avec une pointe de regret. Dans quoi elle s'embarquait ? Elle prit la direction de l'université, là où elle était censée retrouver son amie en se passant les multitudes de possibilité de lieux de sorties dont elle avait pu choisir. Avec un peu de chance, elles se contenteraient de marcher au parc et de parler de trucs de filles comme elles le faisaient souvent. Ouais, une bonne balade en perspective, il n'y a donc pas de quoi s’inquiéter.

Après une bonne dizaine de minutes de marche, May arriva enfin. Elle n'eut pas le temps de repérer Nina que celle-ci courrait déjà vers elle d'un air enjoué. Mauvais. Elle la salua à son tour, avec nettement moins d'enthousiasme et une peur clairement audible dans sa voix. Elle fronça les sourcils et se mit à mordiller nerveusement sa lèvre inférieure.

« - Ça va, ça va et quant à toi, je ne te retourne pas la question, tu as l'air d'avoir mangé du lion à midi. Qu'est-ce qui te met de si bonne humeur ? »

Sans même prendre le temps de lui répondre, la petite blonde la traînait déjà en direction du bus. Ça aussi, c'était mauvais ! Où allait-elle donc l'amené ? Ne connaissant encore pas ou très peu la ville et encore moins la direction dont le bus se rendait, l'anxiété de May se faisait un malin plaisir à grandir en elle. Elle sortit sa carte en guise de réponse et suivi machinalement les mêmes gestes que Nina, trop stressée pour se rendre compte de ce qu'elle faisait. Au pire, elle pourrait toujours simuler une maladie naissante ou elle ne savait trop quoi d'autre si la situation commençait à devenir trop insupportable pour elle. À l'entendre penser, n'importe qui aurait pu croire qu'elle était atteinte d'une agoraphobie, mais non, pas du tout. Elle était juste, bien mieux dans sa bulle…
Le bus arriva cinq minutes plus tard, pas une minute de plus ou de moins, comme l'avait indiqué le panneau d'affichage. Les deux amies s'installèrent au fond du bus sur deux places assises. Fallait qu'elle lui demande.

« - Tu pourrais me dire où est-ce qu'on va ou tu comptes me laisser dans le suspens jusqu'au bout ? Tu sais très bien que je déteste ne pas savoir... »

Elle savait d'avance ce que la jolie blonde allait lui répondre et elle savait qu'elle n'allait pas aimer la réponse. Son obsession de tout vouloir contrôler était bien plus fort qu'elle et en conséquence, ne pas savoir ce qui allait se passer dans les prochaines minutes, l'empêchait de prévoir quoi que ce soit en cas de gros pépins ou pour sa journée du lendemain. Tout devait être carré ; le lieu où elles se rendaient, l'heure à laquelle elles allaient arriver, à quelle heure elles allaient repartir, quand est-ce qu'elle serait chez elle afin de pouvoir gérer son temps de sommeil et savoir quand elle pourrait être disponible le lendemain pour commencer ses devoirs pour la fac et donc calculer combien de temps cela lui prendrait pour, peut-être envisager la possibilité de continuer son roman. Elle avait besoin de savoir tout ça et en l’occurrence, Nina n'en avait pas du tout l'intention.

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Hey, America, Let's turn it up, Yeah, check out our style 'Cause you know you're never fully dressed without a smile. Your clothes may be Chanel, Gucci, Your shoes crocodile, But baby, you're never fully dressed without a smile. But if you stand for nothing, you'll fall for it all 'Cause we got all we need, got love and more. You're never fully dressed without a smile. And if you stand for something, you can have it all 'Cause if it's real, you'll open every door. You're never fully dressed without a smile. Ready or not, Give all we got, Yeah, you can't deny. That baby, you're never fully dressed without a smile.

Alors que les amies étaient toutes les deux assises au fond du bus, Nina pouvait clairement sentir que son humeur n'était pas adoptée par May-Line. Elle trouvait ça fort dommage, parce qu'elle était persuadée qu'elles allaient passer une super soirée, hautes en émotions certainement, mais durant laquelle elles ne s'ennuieraient pas et s'amuseraient comme il fallait. Durant laquelle Nina s'amuserait, en tout cas ; la certitude n'était pas la même concernant son amie. Mais la blonde voulait tenter le coup, coûte que coûte, parce qu'il fallait bien que May-Line sorte de ses bouquins, un peu. Elle adorait parler avec elle, se promener avec elle, boire un café avec elle, mais elle avait aussi envie de pouvoir se rendre dans un bar avec elle ou... à un concert, par exemple. Nina secoua la tête de droite à gauche, en exagérant le mouvement, de manière à ce que la brune intègre bien qu'elle ne comptait pas lâcher la moindre information quant à leur destination. Ce n'était plus drôle, si elle mettait fin au suspens. En réalité, Nina aurait pu avouer là où elle comptait emmener son amie, si l'amie en question n'était pas May-Line. On va voir un humoriste, ça n'avait rien de terrible en soi. Peut-être même que la brune apprécierait et serait soulagée de savoir que ce n'était qu'un "simple" spectacle... mais la connaissant, elle poserait une question supplémentaire. Et quel humoriste ? Et ça, Nina ne pouvait pas le lui dire. Pour peu qu'elle le connaissait, elle ferait marche arrière, demi tour, bref, elle prendrait ses jambes à son coup direction chez elle, en moins de temps qu'il ne faut pour le dire. Parce que, l'humoriste en question était loin d'être commun. Loin, loin, loin. Il ne faisait pas que raconter des blagues, point trop n'en faut ; non, Alfred de la Tour -premier du nom, comme il aimait dire- était un petit peu magicien sur les bords, et appelait régulièrement des personnes à venir sur scène pour réaliser des tours de magie: jamais trop époustouflants, mais toujours hilarants. C'était ce qui faisait son succès, à vrai dire. Nina l'adorait. Elle savait que May-Line le détesterait, mais ce serait une bonne expérience pour prendre un bain de foule, un bain de sociabilité, un bain de scène. Parce que, oui, la Plae avait prévu le coup. Si son amie ressortait vivante de cette soirée, se rendre en boîte de nuit serait de la rigolade, à côté. « Je sais très bien oui, mais il n'empêche que tu ne le sauras pas ! Non, mais. » Nina esquissa un sourire mesquin, se régalant de la situation. On aurait presque pu la penser sadique, mais elle n'était pas comme ça. Elle trouvait juste ça terriblement amusant, et elle savait qu'au final, il n'y aurait pas mort d'homme. Elle serait avec elle tout du long, il n'y avait aucun souci. « Aller, rigole un peu ! » taquina-t-elle son amie en lui frottant la tête, ce qui aurait sûrement le don de l'énerver davantage. Elle pouffa une énième fois avant de poser la tête contre la vitre. Elle ne dit plus rien du reste du voyage, repassant encore dans sa tête le planning de la soirée. Prochain arrêt : More Music. Lorsque la voix retentit dans l'autobus, Nina se redressa instantanément. Elle frappa dans ses mains, excitée, et poussa légèrement May-Line en donnant un petit coup de menton en direction de la sortie. « Aller, hop, c'est là qu'on descend ! Zou, fais pas des manières May, lèves-toi ! » La blonde se montrait ferme dans ses obligations, mais elle faisait ça avec le sourire. Il fallait descendre, mais elle ne voulait pas paraître trop rude non plus. L'autobus finit par s'arrêter et Nina sauta au sol, sautillant durant quelques mètres avant de se retourner. « Tu dois t'en douter maintenant, c'est là-bas qu'on va ! » Elle pointa du doigt le grand bâtiment, le More Music. La grande salle de spectacle de White Oak Station, qui accueillait tout aussi bien des grands groupes de musiques que des petits locaux, ainsi que des humoristes ou des compagnies de théâtre et de danse. Alors qu'elles s'approchaient de la salle, Nina se rappela qu'il y avait des grandes affiches collées partout dans le bâtiment, et qu'il valait mieux limiter les dégâts. Si la brune connaissait bel et bien l'humoriste, il était préférable qu'elle ne s'en rende compte qu'une fois dans la salle afin qu'elle n'ait plus la possibilité de s'échapper. « Tu veux bien fermer les yeux, s'il-te-plaît ? » finit-elle par demander, sachant très bien qu'il y avait peu de chance que son amie accepte. Mais, savait-on jamais ; qui ne tente rien n'a rien. Et puis, si May-Line ne voulait pas les fermer de son plein gré, il y avait toujours l'option du foulard ou des mains devant les yeux.

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May croisa les bras et détourna le regard lorsque son amie lui dit le plus clairement possible que non, elle ne lui dirait rien sur le programme de la soirée. Tseuh ! Si elle n'avait pas dix-neuf ans, elle aurait sûrement prit un malin plaisir à bouder ou du moins à faire semblant, mais comme on dit, elle avait passé l'âge de ce genre de comportement. Et encore, avec Nina, ce genre de gaminerie dont elle était fort capable pouvait passer comme une lettre à la poste. Lorsque son amie osa lui frotter les cheveux alors qu'elle savait pertinemment qu'elle détestait ça et ce encore plus que la glace au chocolat qu'elle avait en horreur, elle la foudroya du regard, si bien que si elle possédait des mitraillettes à la place des yeux, la blondinette aurait succomber sous les balles depuis longtemps. Néanmoins, elle tenta de garder son sang froid, essayant tant bien que mal de se recoiffer à l'aveuglette… Voilà pourquoi les filles emportaient toujours avec elle une petite brosse et un miroir, pour se recoiffer dans les cas d'extrême urgence. Mais vu que May ne faisait pas partie de toutes ces filles, elle fit sans. Elle tira la langue tandis que son amie pouffait de rire se renferma dans le silence comme le faisait si bien sa voisine, tout en tripotant nerveusement son bracelet. Elle aurait bien aimé s'enfuir en courant du bus, mais ça aurait été peine perdue… Elle n'était pas assez rapide et ce serait fait rattraper en deux deux. Voici donc dans quel monde cruel et infâme elle vivait.
A peine le bus annonçait le prochain arrêt, la jolie blonde se levait instantanément en frappant dans ses mains et poussait notre chère May-Line vers la sortie. Oh non. Elle n'allait quand même pas aller là où elle pensait qu'elles allaient.

« - Ca va, ça va ! On va se dé-ten-dre, dit-elle alors qu'elle était sans doute la moins détendue des deux, pas besoin de m'hurler dessus. »

Elle descendit du bus en traînant les pieds, suivant des yeux les sautillements de Nina. Finalement, elle se demandait qui était la plus gamine des deux… Elle jeta un coup d’œil nerveux au grand bâtiment. Le More Music. La plus grande salle de spectacle de la ville. Au secours. May essaya tant bien que mal de se remémorer le planning des spectacles, mais rien à faire, elle n'en avait pas la moindre idée. Si elle s'intéressait un peu plus à la vie de White Oak Station, elle aurait sans doute su ce qui mijotait dans la tête de Nina. Bien fait pour elle. Elle soupira.

« - Pourquoi devrais-je fermer les yeux ? Non, en fait, je sais pourquoi tu veux que je ferme les yeux. Tu sais très bien que je vais détester la personne qui va se produire ce soir et tu as peur que je te fasse une scène là, maintenant, tout de suite. Mais c'est mort, je ne fermerais pas la moindre paupière ! »

Elle se mit en route sans attendre son reste en direction du bâtiment. De toute façon, elle était condamnée à rester ici pour la soirée. Douée en orientation comme elle est, elle serait tout bêtement capable de se planter de bus et de se perdre. Nina était sa seule chance de survie, pour le moment.
Une fois devant le bâtiment, son cœur rata un battement en tombant nez à nez avec les affiches du grand humoriste et magicien qui se représentait ici ce soir. Alfred de la Tour. Et elle le haïssait. Non pas parce qu'il n'était pas bon magicien ou un mauvais humoriste, non, non ! Seulement parce qu'il avait le malheur de faire monter sur scène n'importe quel spectateur, n'importe quand et pour n'importe quoi. Aha ! May-Line se tourna furtivement vers son amie. On pouvait clairement lire dans ses yeux tout le désespoir qu'elle ressentait en ce moment même.

« - C'est une blague, hein… ? Dit-moi que c'est une blague… De très mauvais goût, certes, mais une blague. Pitié… »

Elle laissa tomber moelleusement ses bras le long de son corps. Elle savait que son amie ne plaisantait pas et c'était juste horrible.

« - Dit-moi au moins que nous ne sommes pas placées devant. Pour l'amour du ciel, s'il te plaît, on ne peut pas être tout au fond, caché par tout le monde ? »

Si elle était persuadée d'avoir ne serait-ce qu'on once de petite chance de se retrouver placée au fond de la salle, elle se serait mise à genoux afin de la supplier. Hélas, les choses ne se passaient jamais comme elle le souhaitait.

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La mauvaise humeur non dissimulée de May-Line n'arrivait pas à faner le sourire de la jeune blonde, qui était à la limite de l'euphorie. Tout ça la faisait bien trop rire et la rendait bien trop heureuse -sûrement plus qu'elle n'aurait dû d'ailleurs, au vu du désarroi de son amie. Elle haussa les épaules mentalement : elle la remercierait, plus tard. Elle en était sûre. Nina obligea alors son amie à fermer ses yeux, ricanant intérieurement car elle savait très bien que si elle n’obtempérait pas, elle aurait toujours le moyen de lui cacher la personne qui se produisait ce soir jusqu'à ce qu'elles entrent dans la salle. Malheureusement, May-Line fut plus maline que ce que la Plae aurait pu penser, et elle n'eut même pas le temps de mettre en place son plan B que la jeune femme se retrouvait déjà devant une grande affiche de l'humoriste. Oups. Alors comme ça, elle le connaissait. Et... elle ne semblait pas l'apprécier. Surprise. Nina leva les mains au ciel, comme pour prouver son innocence. « ... tout dépend du point de vue, mais on pourrait dire que c'est une blague oui. De très bon goût néanmoins, merci. » Elle laissa retomber ses bras avant de farfouiller dans la poche arrière de son jean. Elle fronça les sourcils, en ressorti un mouchoir déchiqueté, qui avait dû faire un séjour dans la machine à laver. « Oh purée ! » lâcha-t-elle, paniquée, avant de palper les poches de veste en toile rose pâle. « Non, c'est pas vrai... » elle fit un tour sur elle-même, comme pour essayer de repérer si ce qu'elle cherchait n'était pas tombé autour d'elle... Son regard s'assombrit alors qu'elle se passait une main sur le visage. « J'ai oublié les places à la maison... » Tout en disant ça, elle glissa discrètement son autre main dans une autre poche de son pantalon. Après quelques secondes, son expression changea du tout au tout et elle esquissa un énorme sourire. « JE RIGOLE ! Tu y as cru hein ?! » Nina s'esclaffa, visiblement fière de sa blague, et extirpa de sa poche deux billets en papier renforcé, indiquant l'heure et l'artiste qui se produisait. Elle les secoua devant le visage de May-Line avant de s'éloigner en sautillant. « Si ça peut te rassurer, on n'est pas placé devant, non ! » Elle fit mine de réfléchir et jeta un coup d’œil aux places qu'elle tenait fermement entre ses doigts. « Regarde, on est en... J35 et J36 ! C'est le milieu, ça. À peu près. » Elle s'adoucit, pour montrer qu'elle n'était pas si méchante que ça. C'était sans compter le fait que Nina avait tout prévu de A, à Z, et que peu importait la place où les deux amies se trouveraient ce soir, cela n'influerait en rien son plan machiavélique. « Tu viens, alors ? » demanda-t-elle finalement en marchant à reculons, fixant May-Line pour être certaine qu'elle ne fasse pas demi-tour. Elle pouvait toujours essayer, mais bien que Nina ne fasse pas de sport en particulier elle n'était pas mauvaise en sprint, pour avoir plusieurs fois couru après son ex-petit ami lorsqu'il lui piquait, pour rire, le mascara qu'elle venait de s'acheter où le croissant qu'elle mourrait d'envie de manger. Quand la brune arriva à sa hauteur, Nina tourna sur ses talons et elles marchèrent en silence jusqu'au bâtiment. « Bonjour ! » lança gaiement la blonde à l'intention du vigile, avant de s'avancer tout aussi joyeusement en direction de l'accueil. « Bonjour. Je suis Nina Plae et voici mon amie, May-Line Powells. Alfred m'avait suggéré de nous signaler à l'entrée. » Dire que Nina jubilait aurait été un euphémisme. « Très bien mesdemoiselles, c'est noté. Vous pouvez avancer jusqu'à l'entrée de la salle, c'est déjà ouvert donc vous pouvez aller vous installer directement. - Merci beaucoup ! - Passez un bon spectacle, à bientôt. - Merci ! » Un sourire s'étirait jusqu'aux oreilles, sur le visage déjà souriant de la jeune femme. Bientôt, bientôt ! L'ultime but de son plan arrivait à grands pas, et elle avait grandement hâte de voir la réaction de son amie.

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De l'espoir, voilà ce que la jeune fille était en train de ressentir actuellement et un sourire illumina son visage. Nina était en train de tourner sur elle-même telle une parfaite girouette avec un air affolé collé au visage. Elle cherchait les places qu'elle avaient visiblement oubliées chez elle ou perdues, tombé dans un égout de préférence avec aucune chance de les récupérer. Si c'était réellement le cas, May-Line voulait bien danser la danse de la poule, là, maintenant, tout de suite et pendant même tout le trajet s'il le fallait pour exprimer sa joie et sa gratitude vers le ciel qu'elle avait secrètement prié, elle était même prête à aller à l'église tous les dimanches matins pour remercier les cieux de ce miracle. Évidemment, il n'y avait pas eu de miracle tel qu'il soit et son amie s'était juste bien fichue d'elle, ce qui la rendit encore plus de mauvaise humeur qu'elle ne l'était déjà avant sa pause d'espérance. Elle grinça des dents et prit une grande bouffée d'oxygène pour se calmer, rester zen. Si elle avait pu sauter sur la blondinette comme une catcheuse professionnelle et lui arracher le globe oculaire, elle l'aurait fait, et sans doute en y prenant beaucoup de plaisir. Elle adorait Nina et était ravie d'être son amie, mais des fois, l'envie du meurtre n'était jamais bien loin, surtout quand l'esprit farfelu de celle-ci trouvait d'affreuses idées pour la mettre en rogne ou la décoincer un peu, comme elle le disait si bien.
Heureusement, elles étaient, effectivement, pas placées au premier rend ce qui lui permit de se détendre un peu. Pas de premier rang, pas d'embrouille. Peut-être qu'elle arriverait à apprécier cette soirée finalement. Elle suivit son amie en fourrant les mains dans ses poches et en tirant la tête. Ouais. Elle avait envie de bouder et elle bouderait, non mais !
Une fois devant l'entrée, elle se décida enfin de lâcher sa tête de dépressive ou d'amie maltraitée et se concentra sur les paroles que Nina échangeait avec le réceptionniste. Comment ça Alfred avait suggéré qu'elles devaient se présenter à l’accueil ? C'était quoi ce cirque encore ? Qu'est-ce qui allait se passer ? C'était quoi ce méga, ultra, giga, extra, ipra et blablabla plan tout pourri ? Elle s'apprêtait à poser la question à son amie, mais elle avait déjà déguerpis vers l'entrée de la salle. Rhaa ! Elle lui couru après pour la rattraper et pénétra à sa suite dans la salle de spectable. My gad. C'était grand. Trop grand. Il y aurait trop de monde. Malheur et désespoir.

« - Nina! s'écria-t-elle en arrivant à sa hauteur. C'est quoi ça ? Tu connais Alfred ? Ou Alfred te connaît ? Remarque, peu importe, ça revient au même ! Vous vous connaissez ?! »

Un peu plus et la tête allait lui tourner. Il y avait anguille sous roches dans toute cette histoire, un truc qui n'allait pas et en tant qu'écrivain, son cerveau commençait à s’imaginer dix milliards de scénarios tous aussi loufoque les uns que les autres.

« - C'est ton père ? Ton oncle ? Ton frère caché que tu as retrouvé il n'y a pas longtemps ? Ou ton ex petit copain ? Même si il est peut-être un peu trop vieux pour toi vu qu'il pourrait sûrement être ton père… Mais je n'ai rien contre le fait que tu préfères les hommes plus âgés, presque au niveau de la retraite, en fait. Ou alors, c'est ton copain actuel et c'est pour ça que tu refuses toujours de me parler du gars que tu as rencontré il n'y a pas si longtemps que ça, sous prétexte que ce n'est toujours pas le bon moment ! »

Le cerveau de May-Line chauffait à plein régime et aurait pu continuer à débiter des sornettes plus grosses qu'elle si le regard amusé de Nina ne l'avait pas refait descendre sur terre.

« - Mais répond-moi, dit quelque chose ! S'teuplait ! »

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Hey, America, Let's turn it up, Yeah, check out our style 'Cause you know you're never fully dressed without a smile. Your clothes may be Chanel, Gucci, Your shoes crocodile, But baby, you're never fully dressed without a smile. But if you stand for nothing, you'll fall for it all 'Cause we got all we need, got love and more. You're never fully dressed without a smile. And if you stand for something, you can have it all 'Cause if it's real, you'll open every door. You're never fully dressed without a smile. Ready or not, Give all we got, Yeah, you can't deny. That baby, you're never fully dressed without a smile.

Les deux amies n'étaient pas entrées dans la salle que la brune rattrapa la blonde et commença à la harceler de questions. Nina était littéralement amusée de la situation et prenait un malin plaisir à écouter la jeune femme, complètement paniquée, qui s'inventait un bon million de scénarios. Elle la regardait, les yeux légèrement plissés, attendant qu'elle ait finit son monologue d'excitée. « Tu sais » commença-t-elle après un long silence, complètement nonchalante et légèrement horripilante -elle pouvait s'en rendre compte-, « il pourrait très bien être mon petit ami. Alfred n'est pas si vieux que ça » l'informa-t-elle, comme si c'était un ami de longue date qu'elle connaissait très bien, « il doit avoir quelque chose comme trente ans. Ce qui n'est pas si vieux, en soi. » Elle tourna ensuite le dos à son amie après lui avoir décoché un regard mi-maléfique mi-complice, et entreprit de chercher les places qui leur étaient réservées. « Mais ce n'est rien de tout ça, non » reprit-elle alors sans regarder May-Line, à l'affût de la rangée J. « À vrai dire je ne le connais pas du tout. » Voilà qui allait sûrement perturber davantage encore la brune ; si elle ne connaissait pas Alfred, pourquoi donc l'appelait-elle par son prénom ? Et comment se faisait-il qu'il lui avait personnellement dit de se présenter à l'accueil ? C'était bien là le secret de Nina, mais il ne fallait pas chercher bien loin. Les Plae étaient riches, il n'y avait pas à dire. Et être fortuné s'accompagnait souvent de quelques avantages... en dehors du fait qu'ils étaient plutôt connus dans le coin, voir dans toute l'Alberta. Ils avaient de nombreux contacts un peu partout, et il était très facile de négocier un certain nombre de choses ; être en contact avec Alfred de la Tour pour mettre au point un plan diabolique en vu de décoincer une amie en faisait partie. « Ah regarde ! » Nina venait de trouver leur rangée et attrapa son amie par la manche. Elle l'attira quelques marches d'escalier plus bas avant de se mettre à chercher leurs sièges, cette fois-ci. « 35 et 36 May-Line, garde l’œil ouvert. » Une fois qu'elles les eurent trouver, Nina s'octroya le siège pair et s'affala dedans. C'était tout juste si elle n'étendait pas ses pieds par-dessus le siège d'en face, mais elle avait tout de même une certaine tenue et elle savait que cela ne se faisait pas. Elle avait quand même bien envie de montrer à son amie à quel point elle était détendue, et elle soupira donc longuement tout en s'étirant les bras. « Je te f'rais dire par ailleurs » reprit Nina en se rappelant la dernière exclamation de la brune, « que je n'ai pas de copain actuel. Si j'en avais un, ce ne serait pas mon genre de le cacher. » La Plae voyait néanmoins très bien de qui May-Line voulait parler. Après tout, le seul garçon dont elle lui avait parlé ces derniers temps, c'était Ashton. C'est vrai qu'elle lui avait toujours dit le strict minimum, sans s'épandre davantage sur ce qu'elle ressentait pour lui ou sur ce que lui semblait ressentir pour elle, pour la simple et bonne raison que Nina ne savait pas exactement. Bien sûr, elle n'était pas indifférente au charme du guitariste, mais elle ne pouvait pas vraiment définir précisément ce qu'elle ressentait pour lui et, surtout, elle ne voulait rien ressentir. Elle était sortie avec un garçon pendant de nombreux mois l'année passée, cela avait été une réelle belle relation dont elle ne gardait que des bons souvenirs, mais elle avait dorénavant envie de profiter de son célibat. Certes, elle n'était pas le genre de filles qui avaient enchaîné les petits amis depuis l'époque du collège -loin de là d'ailleurs, puisqu'il avait été son premier amour-, mais cela ne faisait que six mois à tout casser qu'ils avaient rompu, et Nina ne se sentait pas de se remettre dans une relation sérieuse. Et sinon, les "coups d'un soir" ou relation d'une semaine, ce n'était pas vraiment son truc. « Et puis, "le gars que j'ai rencontré il n'y a pas si longtemps que ça", tu te doutes bien, n'est pas un humoriste réputé. Loin de moi la jet set canadienne. » Nina Plae pouffa, rabattit ses longs cheveux blonds qui tombaient dans son dos devant elle, puis se tourna vers son amie, qui n'avait pas l'air des plus enchantées d'être là.

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Don’t walk behind me; I may not lead. Don’t walk in front of me; I may not follow. Just walk beside me and be my friend.

May écarquilla les yeux. Ah, elle était donc bel et bien capable de sortir avec un vieux de trente ans. Oui, pour elle, vu son jeune âge, c'était déjà vieux et ils ne jouaient plus dans la même cour. A cet âge là, tu es généralement posé avec une femme, une famille, une maison, un travail, etc. En gros, tout ce qu'à dix-neuf ans, tu n'es pas censé avoir. Enfin bref. Elle regardait son amie avec des yeux de merlan fris, d'abord parce qu'elle aurait éventuellement pu sortir avec ce type âgé de onze ans de plus qu'elle et parce qu'au final, elle ne le connaissait même pas ! L'adolescente en avait marre des devinettes ou des plans douteux de son amie, ça passait au-dessus d'elle et ça l'agaçait. C'était à plus rien comprendre. Toutefois, elle laissa tomber, elle ne voulait pas se prendre la tête avec ça en plus et suivie son amie dans les rangées pour trouver leur place. Elle regardait les numéros et lorsqu'ils apparurent sous son nez, elle s'écria pour l'annoncer à Nina, comme ci il s'agissait d'une belle trouvaille ou des numéros gagnants du loto. Elles s’installèrent pas la suite sur leurs sièges respectifs. Tandis que la blonde prenait ses aises, May-Line gigotait dans tous les sens, absolument pas ravie d'être ici. Elle ne se sentait pas à sa place dans cet endroit, mais pas du tout. Elle avait un mauvais pré-sentiment et elle savait pourquoi. Nina allait lui jouer un vilain coup, mais quoi ? Ça, c'était la question du siècle. Elle devait changer de sujet et le mieux était de parler garçons. D'ailleurs, le sujet était lancé. Parfait !

« - Peut-être, mais en attendant, je ne sais rien sur lui, je te signal. Alors même si ce n'est pas ton genre de cacher que tu as un petit copain, tu pourrais quand même me donner plus d'informations sur ce type. À part qu'il est super charismatique, je ne sais rien et c'est frustrant pour ma curiosité ! »

Le jour où Nina avait débarqué à l'université tout sourire et en se pavanant comme ci elle venait de gagner au loto, May avait senti que quelque chose avait changé la jeune femme. Et qu'est-ce qui peut changer une fille ? Un homme, bien sûr ! Elle s'était donc précipitée dans sa direction, demandant le plus de détails possibles, mais tout ce qu'elle avait réussi à obtenir, c'est qu'ils s'étaient rencontrés il n'y a pas longtemps, qu'ils s'entendaient pour le moment à merveille et avaient la même longueur d'ondes. Fort peu intéressant pour la très grosse curiosité de May qui n'était pas du tout rassasié. Depuis, la brunette ne cessait d'interroger son amie qui, adorant l'embêter refusait de lui avouer quoi que ce soit, ce qui avait le don de la mettre en rogne. Un jour, elle obtiendrait les informations tant attendues, oui, un jour, elle ne perdrait jamais espoir.

« - Et pourquoi pas ? On ne sait jamais avec toi… Et s'il n'est pas un grand humoriste, il est peut-être footballer professionnel ou alors petit rat de l'opéra ou membre d'un groupe de hard rock ? »

Elle interrogea son amie du regard dans l'espoir d'une réaction aussi petite soit-elle, mais rien, même pas un battement de cils. Tss !

« - Bon, sérieusement, dit-moi au moins comment il s'appelle et je te promets de ne plus poser aucune question ! Juste son petit prénom… Ce n'est pas grand-chose. »

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Hey, America, Let's turn it up, Yeah, check out our style 'Cause you know you're never fully dressed without a smile. Your clothes may be Chanel, Gucci, Your shoes crocodile, But baby, you're never fully dressed without a smile. But if you stand for nothing, you'll fall for it all 'Cause we got all we need, got love and more. You're never fully dressed without a smile. And if you stand for something, you can have it all 'Cause if it's real, you'll open every door. You're never fully dressed without a smile. Ready or not, Give all we got, Yeah, you can't deny. That baby, you're never fully dressed without a smile.

Alors comme ça, elle veut parler garçons, se fit Nina comme réflexion. Ce n'était pas plus mal en réalité, au moins pendant ce temps là May-Line ne chercherait pas à savoir davantage de détails du plan machiavélique que la blonde avait préparé. Les garçons, c'était un sujet bien vaste, qui pouvait largement occuper une bonne conversation, et elles auraient sûrement de quoi parler jusqu'à ce que le spectacle commence. Ce qui embêtait Nina, néanmoins, c'était qu'elle n'était pas très sûre d'avoir envie de parler du garçon dont son amie voulait en savoir plus. En réalité, il n'y avait pas grand chose à dire dans l'absolu ; mais la curiosité de May-Line semblait toujours plus insatiable, et Nina n'avait pas vraiment envie de trop s'étendre. Dans l'idéal, elle aurait voulu renverser la situation afin que la brune lui parle des garçons qui l'intéressait, mais elle avait l'étrange impression qu'elle n'arriverait pas à lui soutirer beaucoup d'informations. Nina se souvenait davantage du dernier livre dont elle lui avait parlé, plutôt que du dernier garçon sur lequel elle avait flashé. « Parce que je n'ai pas le droit d'avoir mon petit jardin secret, peut-être ? » se défendit la blonde alors que son amie se désolait de ne rien savoir sur lui. « Et puis, c'est pas comme s'il y avait beaucoup de choses à savoir sur lui. » Faux ! Il y avait beaucoup de choses à savoir sur lui, mais Nina n'avait pas envie de les faire partager à May-Line. Elle n'avait pas de mal à parler avec ses amies des garçons qui lui plaisaient, mais elle gardait toujours une certaine pudeur ; et, cela ne faisait pas non plus très longtemps qu'elle connaissait la brune. Elle l'appréciait, elle s'entendait bien avec elle, mais elle n'était pas forcément encore très à l'aise avec le fait de lui confier des choses un peu plus personnelles. Alors certes, Ashton n'était que son ami, mais c'était son ami, une personne extérieure à l'université et, peut-être par égoïsme, elle ne tenait pas à ce que tout le monde fasse sa connaissance, même indirecte.

Nina esquissa un sourire quand son amie se mit à énumérer une possible liste de l'occupation potentielle du garçon en question. Mentalement, elle mit à côté rat d'opéra et Asthon, et se prit d'un fou rire intérieur. Elle lui en parlerait, tiens, il rirait sûrement lui aussi. « Je t'ai dis May-Line, les célébrités ne m'intéressent pas. » Être sous les feux des projecteurs, ce n'était pas pour elle. Elle avait déjà du mal à assumer le fait qu'elle se produisait sur une petite scène d'un bar de centre-ville, alors marcher aux côtés de quelqu'un d'assez connu pour passer dans les journaux, elle n'en avait pas très envie. « Mais membre d'un groupe de hard rock, tu n'es pas si loin. Si tu enlèves le hard. » Enfin, pour ce qu'elle en savait. Nina n'était même plus sûre qu'Ashton soit toujours membre d'un groupe de rock, d'ailleurs. « En fait, il j- » -oue avec moi à l'Old Pub, voulu-t-elle dire, mais elle s'arrêta à temps. May-Line n'était pas au courant que Nina chantait dans un bar, et la blonde préférait que cela reste ainsi. « Il joue de la guitare. Et du piano aussi je crois, mais je ne l'ai jamais entendu en jouer. » Avec ces petites informations supplémentaires, Nina espérait que la curiosité de la brune serait rassasiée, mais cela aurait bien sûr été trop beau. Elle avait à peine fermée sa bouche que May-Line enchaînait avec des nouvelles questions. Vraiment ? Elle se demandait quand est-ce qu'elle allait finir par lâcher l'affaire. Quitte à parler de garçons, elle préférait autant parler du nouveau de sa promotion, qui était arrivé au début du deuxième semestre, ou du troisième année qui était particulièrement craquant. Nina aurait été plus à l'aise, et aurait eu davantage de choses à dire ; parce que certes, elle aimait beaucoup Ashton, elle le trouvait mignon comme tout, mais elle ne voulait surtout pas que cela aille plus loin. Nina voulait profiter de son célibat encore quelques temps et n'avait aucunement envie de se replonger dans une relation sérieuse ; mais les questions de May-Line sous-entendaient que le "garçon en question" n'était pas seulement un ami et qu'il y avait moyen qu'il y ait davantage. Nina, elle, ne voulait pas davantage. « Il s'appelle Ashton. C'est bon, t'es contente ? » Elle n'en avait pas envie, mais elle avait fini par lâcher le morceau. La brune avait promis qu'elle ne poserait plus de questions si elle avouait comment le garçon s'appelait, et voilà qui était fait.

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May-Line ouvrit la bouche et la referma aussitôt. Hein ? Ashton ? Comme Ashton son voisin le musicien ? Aha ! C'était une blague, non ? Une caméra cachée ? Oui, voilà, Nina se fichait éperdument d'elle, ça ne pouvait être que ça. Et pourtant. Comment aurait-elle pu se moquer d'elle étant donné qu'elle ne lui avait jamais parlé de ce voisin qu'elle préférait -et de loin- garder pour elle toute seule ? Elle détourna son regard de son amie, fixant la scène, les yeux dans le vide. Son cœur -ou sa conscience- était partagé entre le fait de se réjouir ou de pleurer. Ça ne faisait pas longtemps qu'elle connaissait le jeune homme, mais elle commençait à l'apprécier et peut-être un peu trop. Elle savait qu'elle n'était pas la seule fille avec qui il partageait une amitié, mais elle sentait une pointe de jalousie en apprenant que son amie en faisait partie. La blonde avait pour elle tous les avantages et tous les atouts qu'un homme puisse aimer, en plus de l'expérience dans le domaine. Bah ouais, qui voudrait d'une nana qui connaît les baisers uniquement à travers les films ? Elle passa une main dans ses cheveux, se retournant de nouveau vers Nina.

« - C'est mon voisin, lâcha-t-elle comme ci c'était l'évidence absolu. Enfin, ce que je veux dire, c'est que le Ashton dont tu parles, parce que je doute qu'il y en est plusieurs dans cette ville, habite en face de chez moi... »

Et j'ai même dormi chez lui pas plus tard que la semaine dernière. Mais ça, elle se garda bien de le dire. Primo, elle ne devait pas être jalouse de devoir partager une amitié, c'était complètement stupide et puéril. Deuzio, elle allait passer pour la pire des amis ou des garces. Tertio, elle ne comprenait même pas pourquoi elle réagissait comme ça. Elle s'en fichait qu'il soit ami avec toutes les filles de la terre. Ash était un ami, rien de plus. Ou peut-être qu'au fond, elle aimerait plus. Non, non, pas de plus. Les études avant, les petits copains après. Et ce n'était pas son genre. Ou peut-être que si. Bon, là, elle s'embrouillait. Elle ne savait plus trop comment réfléchir.

« - Donc, je le connais plus ou moins, en fait. Pas depuis longtemps, certes, mais c'est un ami, enfin je suppose. Mais c'est cool… Cool que vous soyez aussi amis, ça nous fait un ami en commun, vu que je ne connais pas tes autres amis. Tu ne trouves pas que le mot "ami" revient trop souvent là ? Oh ! Regarde, ça va commencer ! »

La brunette s'enfonça dans son siège, mal à l'aise. Olala. Elle était vraiment pitoyable. Si elle avait pu, elle se serait cachée dans un trou à souris pour ne plus jamais en sortir. Elle ferma les yeux pour se calmer et évacuer tous le surplus de stress avant de s'excuser le plus maladroitement possible auprès de son amie, inventant comme excuse bidon que la foule lui faisait perdre tous ses moyens. Évidemment, pour ne pas s'enfoncer encore plus, elle lui proposa entre deux sourires de reprendre la discussion plus tard, genre, dans dix ans.
Maintenant, elle n'espérait qu'une chose, c'est que le reste de la soirée se déroule le mieux possible, mais elle n'était pas au bout de ses peines.

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What ? Son voisin ? Comment était-ce possible qu'elles connaissent toutes les deux le même mec, sans le savoir ? Alors ça, c'était la meilleure. C'était marrant. Et pour le moins surprenant. « En face de chez toi ? Waw, c'est dingue. » Nina esquissa un large sourire. C'était vraiment une belle coïncidence, pour le coup. Mais, comment se faisait-il qu'elle ne lui en avait pas parlé plutôt ? Ils n'étaient pas voisins depuis seulement deux jours, si ? Quoique, elle-même avait mis du temps à lui en parler, la preuve... et encore, elle l'avait fait à regrets, parce que May-Line n'en démordait pas et qu'elle avait été trop embêtante avec elle jusque là -et la soirée n'était pas finie- pour refuser de lui lâcher le prénom de celui qui était désormais avec elle en duo. Mais, pourquoi ne lui en avait-elle pas parlé, hein ? Parce qu'elle sentait qu'il y avait un potentiel quelque chose entre eux, mais qu'elle ne voulait pas que ça aille plus loin, et qu'en parler entretiendrait forcément cette petite flamme qui semblait poindre le bout de son nez. Alors quoi, ça voulait dire qu'il y avait aussi quelque chose entre May-Line et Ashton ? Non, ce n'était pas possible. D'ailleurs, cette idée ne traversa qu'un quart de seconde l'esprit de Nina. Si son amie n'en avait pas parlé, c'était tout simplement parce qu'il n'y avait rien à en dire. Ils étaient voisins, point barre. Non ? Non, ils étaient amis aussi lui disait-elle. Voilà, ils étaient amis. Mais est-ce que Nina avait parlé de tous ses amis à May-Line ? Non. Pas besoin de s'inquiéter davantage, Nina ne s'inquiéta même pas, d'ailleurs. Elle ne remarqua pas non plus l'agitation soudaine de la brune, ou plutôt la mit sur le compte du spectacle qui menaçait de commencer. C'était pour ça qu'elles étaient là, après tout. « C'est vraiment cool, ouais ! Carrément. On pourrait se faire des trucs tous les trois, du coup. » Nina sourit, sincèrement enjouée. Elle ne connaissait pas tellement les amis de May-Line ou alors seulement de vue, et la brune ne connaissait pas non plus les siens ; d'en avoir un en commun leur faisait un nouveau point commun, justement. Elle n'en avait pas beaucoup alors, chacun était bon à prendre. Pour tout dire, Nina avait du mal à imaginer May-Line bien s'entendre avec Ashton, elle avait l'impression que leurs caractères étaient complètement opposés, mais les opposés s'attiraient non ? Elle se réjouissait d'avance d'une sortie tous les trois, sans se douter que son amie n'était pas aussi enchantée qu'elle à cette idée. « Oui oui, on en reparlera plus tard. » La blonde fit un geste de la main comme pour dire que la discussion était passée, qu'il serait toujours temps de reparler d'une sortie tous ensemble plus tard. « Let the show begin ! » lança-t-elle jubilatoire, alors que les rideaux s'ouvraient sur le célèbre humoriste. Il fut accueilli par une salve d'applaudissements, à laquelle se joignit Nina. Un sourire lui barrait le visage et ses yeux pétillaient. En dehors du fait que la soirée promettait d'être hautes en émotions pour son amie et elle, Nina était réellement fan de ce gars, et n'arrivait pas à croire qu'elle allait assister à son spectacle en vrai, et non plus derrière son pc à travers les vidéos YouTube de sa chaîne officielle. Tout en délicatesse, Alfred de la Tour enchaîna les remarques hilarantes et le spectacle n'avait pas commencé depuis cinq minutes que toute la salle était pliée en deux, Nina comprise. Elle tourna la tête en direction de May-Line, lui donnant un léger coup de coude. « T'oublies pas de rire surtout, hein ? » Elle se concentra ensuite de nouveau sur la scène, le sourire toujours aux lèvres. Toute en fluidité, le comique attrapa un jeu de cartes et Nina sut aussitôt que les tours de magie allaient commencer. Elle tapa dans ses mains, toute excitée : c'était la partie qu'elle préférait.

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Des trucs à plusieurs… Euh. Ouais. Elle ne savait pas si elle devait s'en réjouir ou en pleurer. Elle adorait Nina, elle adorait Ash, mais elle ne savait pas si elle serait capable d'aimer les deux ensembles. Elle se secoua comme un prunier mentalement. Mais qu'est-ce qu'elle avait avec cette fichue jalousie ?! Elle devait sûrement tomber malade. Ouais, ça devait être quelque chose comme ça… Un symptôme du manque de sommeil ou d’asociabilité sur-développé qui touche uniquement les filles dans son genre, c'est-à-dire totalement coincée et en manque d'entourage masculin depuis plus cinq ans. Avec un peu de chance, cette maladie l'aura quitté d'ici la fin du spectacle. En parlant du spectacle, Nina ayant vu que du feu sur son malaise était de nouveau tout excitée et se mit à applaudir lorsque l'humoriste, et sans doute son préféré, apparut sur scène. May, elle, elle se contenta de croiser les bras sur sa poitrine et de lever les yeux au ciel. Pourquoi diable elle était là ? Ah oui, à cause de sa super amie qui l'avait bien roulé dans la farine en la faisant venir ici contre son gré. Vous connaissez beaucoup d'amis qui se conduisent de la sorte ? Bon. Là, elle était énervée. Mais jusqu'à présent, tout ce que la blondinette lui avait fait faire et qui sortait de son quotidien, elle avait tout simplement adoré et elle était plus que ravie d'avoir une amie qui ne cesse d'aller en sens inverse qu'elle. Si elle n'avait pas connu Nina, elle profiterait sûrement pas autant de son adolescence comme maintenant. Puis comme on dit, les opposés s'attirent. Enfin en amour, ça, elle n'en savait rien, mais en amitié, ça venait d'être justifié. Elle fut sortie de ses pensées grâce à un coup de coude de son amie qui lui rappela tant bien que mal qu'elle était à un spectacle d'humour et qui dit humour dit rigoler. Hors, elle n'avait absolument pas suivi un mot de ce qu'il avait raconté. Elle cligna des yeux et lâcha un petit rire nerveux.

« - Aha… Évidemment… »

Elle leva les yeux en direction de la scène, se promettant silencieusement de se concentrer sur le spectacle et sur rien d'autre. Elle en était capable. Mais oui. Elle observa l'humoriste sortir un jeu de cartes et…hein ? Un jeu de cartes pour un sketch ? Punaise. C'est vrai qu'il était aussi magicien. Non, mais, sérieusement. Un jour ce type s'est réveillé un matin en se disant qu'il allait devenir un humogicien ! (Pour ceux qui ne suivraient pas le raisonnement de May-Line, un humogicien est un mixte entre humoriste et magicien. Un nouveau métier va-t-on dire.) Il y avait des tarés sur terre.
Elle se tourna vers Nina dont les yeux brillaient tel une enfant découvrant la poupée de ses rêves à Noël. Vous savez, celle qui fait tout comme les vrais bébés…

« - Dit, chuchota-t-elle, il va faire quoi là… ? Parce qu'en fait, je n'ai jamais regardé de spectacle de magie et encore moins un spectacle de magie accompagnée d'humour. Ou inversement, peut importe. Et du coup, on est supposé attendre quoi ? Il va nous demander de choisir une carte et deviner laquelle on à choisit ? Ou que sais-je ? »

En fait, niveau magie, May s'était arrêté à la magie des dessins animés comme les Winx ou les Witch. Pour le reste, ça se limitait au tour de la femme coupée en deux ou au lapin qui sort du chapeau… Elle connaissait évidemment quelques tours avec des cartes, mais ils étaient basiques et n'importe quelle personne connaissant la technique serait capable d'en éblouir plus d'un. Autant vous dire qu'elle ne pourrait pas en faire un spectacle.

HS:

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Visiblement, malgré les recommandations de Nina comme quoi il était préférable de rire à un spectacle d'humour, May-Line n'avait pas l'air motivée à se joindre à l'ambiance générale. Tant pis, elle serait bien obligée de se plonger dedans d'une minute à l'autre, qu'elle le veuille ou non. « Il va faire un tour de magie » répondit Nina à la première question de son amie. Des Shhhh se firent entendre derrière, alors elle baissa le ton. À ce train-là, elle allait devenir inaudible. « C'est sa spécialité, de faire de la magie en même temps que son show comique. C'est hyper intelligent, ça te permet de te concentrer sur ses blagues, sans capter qu'il est en train de te berner. » Nina ne quittait pas la scène des yeux, elle ne voulait pas manquer une miette de ce qu'Alfred de la Tour faisait. Elle secoua ensuite la tête rapidement, de droite à gauche. « Non, pas pour celui-là. Du moins, je crois. » En fait, elle savait très bien que pour ce numéro, l'humoriste restait seul sur scène. C'était au numéro suivant qu'il invitait des personnes du public à venir l'aider dans son tour de magie. Elle le savait particulièrement bien, parce qu'elle avait été informée avec précision du déroulement du spectacle. Et c'est justement sur ce deuxième numéro que son plan machiavélique entrait réellement en action. « Mais regarde » avait-elle rajoutée en pointant du doigt le magicien, « c'est toujours époustouflant. »

Le tour avait duré quelques minutes, alliant humour et magie à la perfection. Alfred de la Tour avait ensuite enchaîné avec quelques sketchs, dont un parmi ses plus connus, qui firent tordre de rire la salle entière. Nina en avait encore les larmes aux yeux quand l'humoriste sembla passer de nouveau à la magie. Nina recouvra alors tout son sérieux et se tassa sur son siège. Bientôt, de la Tour allait appeler le public sur scène. Bientôt, il choisirait "aléatoirement" deux amies, installées au rang J, places 35 et 36. Il choisirait deux autres amis aussi, un peu plus près dans le public ; mais eux étaient vraiment choisi au hasard, pour le coup. Alfred continuait de parler et scrutait la salle, les yeux plissés exagérément ; dans ses mains, il tenait des étranges pancartes, qu'il mélangeait machinalement. Et puis, tout à coup, il s'arrêta complètement. De parler, de bouger. « Hmmm » il pinçait ses lèvres, gardait ses yeux plissés. « Éclairez-moi le milieu des rangées de l'orchestre, s'il-vous-plaît. » La lumière jaillit, presque éblouissante, sur la rangée de May-Line et Nina ainsi que sur les deux devant, et les deux derrière. L'humoriste-magicien fit mine de réfléchir, et Nina jeta un bref regard en direction de son amie. « Les deux jeunes femmes, au milieu là. Une blonde, une brune. » Les gens se regardaient les uns les autres, tâchant de savoir qui étaient ces jeunes femmes en question ; les blondes et les brunes ne manquaient pas, à vrai dire. Mais Alfred de la Tour fixait bel et bien les deux étudiantes. Nina, jouant le jeu à fond, pointa un doigt vers elle-même et mima Nous ? avec ses lèvres. L'humoriste hocha la tête, et Nina se tourna vers May-Line. « On est les grandes gagnantes ! » Un gigantesque sourire s'étala sur son visage, puis elle attrapa la main de son amie et la força à se lever. « Aller, on fait pas de manières. Tu as l'immense chance de passer sur la scène du plus célèbre humoriste canadien ! » Quelle était méchante, mais quelle était méchante. Après tout, elle était là pour ça non ? Pour décoincer May-Line ? Lui faire prendre un bain de foule, lui faire faire des choses qu'elle n'aurait jamais fait par elle-même ? Eh bien il était là, le grand pas.

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La brunette avait haussé les sourcils tout en lâchant à voix basse un « Ah, tu trouves ? » plus blasé que jamais. Elle ne voyait pas tellement ce qui était incroyable dans le fait de faire de la magie dans un spectacle d'humour, mais passons. Elle s'ennuyait de pieds fermes et sa vengeance serait terrible. Elle pourrait obliger Nina a passer une soirée Scrabble avec ses voisins âgés d'environ quatre-vingts ans et elle était persuadée à deux cents pour cent qu'elle comprendrait ce qu'elle était en train de ressentir actuellement. Tout ce qu'elle venait à espérer, c'est que l'ennuie ne soit pas mortel, sinon elle ne finirait pas la soirée. Triste vie. Mourir si jeune et pour ça. Elle soupira d’agacement, s'enfonçant un peu plus dans son siège. Tout le monde était absorbé par ce qui se passait sur scène, sauf elle. Pourquoi ? Était-elle si bizarre au point de ne pas comprendre la subtilité du spectacle ?
Nina l'a sorti de ses rêveries en l'incitant à regarder les tours de magies qui étaient effectués sur scènes, lui faisant croire que le tout était époustouflant. Oui. Mais en tant que grande rabat-joie, et depuis qu'elle savait que tout n'était que du trucage et astuce, la magie ne l’impressionnait plus tant que ça. Tout le monde pouvait le faire à condition d'avoir le bon matériel.

Après une multitude de sketch que May avait écouté que d'une oreille distraite, préférant largement réfléchir à ce qu'elle allait bien pouvoir faire pour se venger de son amie, l’humoriste eu la délicate idée de faire participer des gens de la salle. Généralement, c'était sur les personnes des premiers rangs qu'ils jetaient leur dévolu, mais à son plus grand étonnement, il demanda au technicien d'éclairer le milieu de la salle. La lumière surpris la jeune fille qui se tassa un peu plus dans son siège. Maudit soit-elle. Elle jeta un léger coup d’œil à Nina qui faisait également la même chose lorsqu'Alfred de la Tour les désigna pour le rejoindre sur scène. Son amie semblait plus exciter que jamais, ce qui était loin d'être son cas. Pas la scène. Non, pas la scène. La blondinette lui prit la main pour l'obliger à se lever, quant à May, si elle avait pu, elle l'aurait prit par la main pour s'échapper en courant de cet endroit. Bon sang, de bonsoir !

« - C'est hors de question que je monte sur scène… Nina, tu m'écoutes ?! »

Mais c'était déjà trop tard. Son amie la traînait jusqu'au devant de la salle, sans se soucier des plaintes que May-Line lâchait pour tenter de s'extirper de cette mauvaise passe. Mais rien à faire. Elle avait beau mettre tout son poids pour l'empêcher de la tirer, Nina était plus motivée que jamais. Elles arrivèrent toutes les deux devant l'estrade, son amie le sourire aux lèvres, et elle, tremblante de peur. C'était officiellement officiel, elle la détestait. Oh oui, elle la détestait. Elle était persuadée que tout était manigancé depuis le début. Oh, la fourbe !
La jeune fille, bien consciente qu'elle ne pouvait plus faire demi-tour suivit Nina sur les quelques marches d'escalier qui séparaient le sol de la scène avant de trébucher sur la dernière marche et de se raccrocher de peu à son amie avant de s'étaler de tout son long aux côtés de l'humoriste et de se payer la honte de sa vie. Tss.

« - Je te le jure, tu me le paieras cher, chuchota-t-elle à l'oreille de la blondinette, oui, très cher. »

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Nina fronça les sourcils, lançant un regard bourré de reproches à son amie. De faux reproches, en réalité, puisqu'elle savait qu'elle allait réagir de cette manière... et que rien n'était dû au hasard, alors elle avait bien le droit de recevoir une petite crise. Cela ne l'empêcha pourtant pas de tirer son amie à bout de bras. Ce fut presque une victoire quant elle l'eut tirée hors de la rangée de sièges. « Fais pas de scène » lâcha-t-elle entre les dents, « Tout le monde nous regarde. On est littéralement sous le feu des projecteurs, May. » À vrai dire, Nina se fichait bien de se faire ridiculiser ; elle assumait à cent pour cent les retombées de cette soirée. Pour son amie, c'était une autre histoire ; déjà qu'elle risquait de sacrément lui en vouloir d'avoir manigancé tout ça, si en plus elle se tapait la honte devant le gratin white oakien, elle ne s'en remettrait pas avant quelques mois. C'était pour elle, en somme, qu'elle lui conseillait de faire meilleure impression. Et puis, aussi, il fallait le dire, parce que ça l'amusait de la taquiner.

Tant bien que mal, elles étaient arrivées au niveau de la scène. Nina était tout sourire, bien sûr. Bien sûr... sa mauvaise conscience devait être en train de faire la fiesta dans son coin, elle avait sûrement ouvert la bouteille de tequila et twerkait avec ses copines, narguant sa bonne conscience en tirant la langue. Bah, il fallait sortir des sentiers battus, de temps en temps. C'était le cas de le dire. Non seulement May-Line montait sur la scène d'Alfred de la Tour, ce qu'elle n'avait a priori encore jamais fait, mais en plus de cela elle s'affichait très probablement pour la première fois devant autant de gens. Ce n'était pas rien, pas rien du tout même. C'était peut-être l'émotion, sûrement la peur, mais May-Line manqua de tomber dans les petits escaliers qui rejoignaient la scène, et si Nina n'avait pas été là, il y avait fort à parier qu'elle aurait fini le menton encastré dans le bois de la scène. Ou, plutôt l'inverse. Ou alors... c'était une tentative pour entraîner Nina dans sa chute. La blonde plissa les yeux, amusée. « C'est ça oui, on verra » répliqua-t-elle à la menace de la brune, à mi-voix, « Je pari que tu as déjà une idée. » Elle fixa May-Line dans les yeux, lui fit un clin d’œil, puis un sourire, puis mima un baiser, avant de se retourner vers l'humoriste. Elle lui décocha son plus beau sourire, puis le magicien tendit la main pour serrer celles des deux amies, les heureuses élues pour être les cobayes de son prochain tour de magie. « Rien de trop compliqué, je vous rassure. » Il s'avança au centre de la scène, fit un geste àl'attention des deux filles pour les inviter à le suivre. Nina, serrant toujours la main de May-Line, rejoignit l'humoriste. « Je vous laisse vous asseoir là. » Ce qu'elles firent. Nina faisait peut-être la maline, un peu, mais c'était bien parce qu'elle était à l'origine de la farce et qu'elle se devait de faire bonne figure, de faire celle qui était totalement à l'aise. Mais, au fond, s'il n'y avait pas eu tout ça, s'il cela n'avait pas été pour May-Line, elle aurait eu les pétoches. Sans aucun doute. Pour l'instant, elle était un peu dans un autre monde. Comme si... comme si elle était dans les Sims, par exemple. Il y avait tous ces gens-là, devant elle, loin d'elle, ailleurs. Elle ne les contrôlait pas, ils ne la contrôlaient pas, elle se laissait juste porter par la soirée. Elle s'était donnée du mal pour l'organiser, maintenant elle se contentait de profiter.

Alfred de la Tour s'approcha d'elles, un micro à la main. Il le tendit d'abord à Nina, qui plissa de nouveau les yeux, dirigeant ses pupilles vers la gauche, où se situait May-Line. C'était elle qui devait parler. L'humoriste s'éclaircit la gorge, puis tendit le micro à la brune. « Bonjour, mademoiselle... ? » Il attendait son prénom, bien sûr. Nina lui décocha un petit coup de coude discret, au cas où son amie n'aurait pas fait attention. Au cas où elle serait trop surprise, choquée, énervée, pour prononcer la moindre chose.

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Don’t walk behind me; I may not lead. Don’t walk in front of me; I may not follow. Just walk beside me and be my friend.

May ouvrit la bouche pour répliquer, mais la referma aussitôt. Qu'est-ce qu'elle pouvait bien dire ? Que oui, elle avait déjà une idée diabolique ou qu 'elle était justement en train de la peaufinée ? Sûrement pas. C'était complètement faux et elle était persuadée que Nina s'en doutait. Elle n'avait aucun moyen de se venger comme il se doit et sa gentillesse l'en empêcherait de toute façon. La jeune fille croisa les bras sur sa poitrine en signe de contrariété avant d'être obligé de les décroiser pour serrer la main de ce parfait inconnu. D'ailleurs, il aurait mieux fait de s'abstenir. May-Line avait les mains moites et tremblait comme une feuille. Pas très glamour.

Les paroles du magicien/humoriste ne rassura guère la jeune fille qui serra un peu plus la main de son amie, complètement paniquée. Rien de trop compliqué ? Il était sûr ? Elle était déjà au bord de l'infarctus et elle doutait fortement que les choses iraient en s'arrangeant. Elle respira une grande bouffée d'air et suivit la blondinette. Comme si elle avait le choix de toute façon. Une fois assise sur la chaise comme l'avait demandé Alfred, elle souffla tout doucement en espérant ne pas mourir ici, à cet âge et devant ce type.
May venait enfin de calmer les battements de son cœur lorsqu'elle eut la merveilleuse idée de poser ses yeux sur le public. Mon dieu. La salle de spectacle était pleine à craquer et un nombre incalculable de personne regardait dans leur direction, dans sa direction. Elle sentit un nœud se former dans le creux de son ventre et de sa gorge et cligna plusieurs fois des yeux. Est-ce que tout ça était réel ou était-elle dans un de ses pires cauchemars ? Peut-être que si elle se faisait pincer, elle se réveillerait dans son appartement, dans son lit, loin d'ici. A la place de recevoir un pincement, elle reçut un coup de coude de la part de son amie, ce qui l'obligea à sortir de sa torpeur. Quoi ? Qu'est-ce qui se passait ? Elle regarda le magicien, le public puis son amie qui lui chuchota à l'oreille ce qu'elle venait de rater. Elle avala sa salive et s'approcha légèrement du micro. Quelle horreur.

« - Je m'appelle...euh… Je m'appelle May… May-Line... »

La brune se renfonça dans son siège et baissa les yeux. Pendant un court instant, elle s'était surprise à se demander comment elle s'appelait. Sa peur de la foule était bien plus grande que ce qu'elle pensait. Qu'est-ce que cherchait Nina en lui faisait subir ça ? La décoincer, ça c'était une certitude, mais elle y allait un peu trop fort quand même. Elle se tourna vers la concernée et murmura à voix basse.

« - Je crois...que je vais avoir besoin d'eau… »

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Ce n'était décidément pas le moment d'avoir des regrets ou de se mettre à avoir peur, mais Nina avait du mal à ne pas se laisser submerger par les émotions. Elle observait May-Line du coin de l’œil, et son expression était loin de la rassurer. La blonde pinça les lèvres, légèrement. Peut-être qu'elle était allée trop loin, finalement. Peut-être aurait-elle dû davantage écouter les protestations de son amie... mais elle était persuadée que c'était ce qu'il lui fallait pour mettre de côté sa timidité maladive et reprendre confiance en elle. Son premier et unique petit ami lui avait dit, une fois, au début de leur relation, qu'il suffisait de s'allonger pendant trente secondes au milieu d'une rue bondée pour ôter quasi définitivement cette peur du regard des autres. Elle n'avait personnellement jamais essayé parce qu'elle avait su gagner confiance en elle par ses propres moyens, mais son amoureux avait testé et il lui avait assuré que ça fonctionnait à merveilles. Pour May-Line, elle avait décidé de réadapter un peu la solution... Mais peut-être aurait-elle préféré s'allonger trente secondes dans la rue, plutôt que de passer un quart d'heure sur une scène, face à un public de quelques centaines de personnes ? Oh, mon, dieu. La culpabilité commençait à monter en elle, et sa respiration s'accéléra. Elle tenta de garder une expression des plus sereines, néanmoins, quand Alfred de la Tour dirigea son micro vers elle. « Et quelle jeune femme à la chance d'être amie avec May-Line ? » Il lui lança un clin d’œil, sachant pertinemment son prénom ; le reste de l'assemblée, lui, ne le savait pas. « Nina ! » Elle esquissa son plus beau sourire - mais son plus beau faux sourire, dont elle avait tant usé par le passé. Au lycée, à l'internat, où les fortes apparences trompeuses valaient mieux qu'une faible sincérité. Alfred se retourna alors pour faire face à la foule, répéta les prénoms des deux amies, et commença un petit discours. C'était sûrement un énième sketch, probablement très drôle, mais Nina n'écouta pas. Elle entendait le sang battre dans ses oreilles, et elle se paralysait davantage au fur et à mesure que les minutes s'écoulaient. Elle prit quelques grandes inspirations, tachant de reprendre son calme, de reprendre confiance en elle. Il n'y avait pas de quoi avoir peur. Alfred allait simplement faire son petit tour de magie, il allait les épater, et elle quitterait la scène des étoiles dans les yeux, impressionnée. Et même si May-Line lui en voudrait de l'avoir traînée sur le devant de la scène, elle lui en serait certainement redevable dans quelques jours, quand elle se serait rendue compte que cela l'avait en effet désinhibée. Tout allait bien se passer. Un sourire forcé se dessina sur ses lèvres, alors que la salle entière du Music More éclatait de rire. Elle sentit alors le regard de son amie posé sur elle, et elle se retourna doucement. « Besoin d'eau ? Pourquoi ? » demanda-t-elle, alarmée. Elle avala sa salive avec difficulté, avant de reprendre un peu plus bas, « Tu peux pas attendre qu'il ait fini son tour de magie ? » Nina comprenait que May-Line puisse avoir soif, elle-même n'aurait pas refusé un rafraîchissement, mais elle pouvait bien attendre quelques minutes, non ? Elles n'auraient qu'à sortir de la salle pour aller aux toilettes, une fois qu'elles auraient quitté la scène. De quoi auraient-elles l'air, si elle demandait à Alfred un verre d'eau devant tout le public ? Lorsqu'il remarquerait qu'elles avaient envie de dire quelque chose, il approcherait son micro et elles se prendraient une belle honte. Nina se pinça les lèvres, le stress la gagnant. Elle porta son regard sur l'humoriste, qui continuait son sketch comme si de rien n'était, comme si les deux filles qu'il avait conviées sur la scène n'existaient pas. La blonde parcouru la scène du regard, avant de baisser la tête, dépitée. Pourtant, c'est en baissant la tête qu'elle s'aperçut... qu'il y avait une petite bouteille d'eau posée à côté de chacune de leur chaise. Hurray ! Elle s'empressa d'attraper la sienne, la déboucha et en avala une gorgée. Il n'y avait pas à dire, cela faisait du bien. Elle soupira d'aise, rassurée, et tendit sa bouteille à May-Line. « Tiens, bois un peu. Tu en as une autre aussi, à côté de ta chaise. » Elle esquissa un sourire, un peu gênée, puis ajouta en chuchotant « Je suis désolée May. Mais promis, tout ça te servira. Tu verras. » Elle n'en était pas sûre à cent pour cent, mais elle avait envie d'y croire. « Courage » glissa-t-elle finalement, alors qu'Alfred se tournait vers elles dans une salve d'applaudissements. Il tenait à la main des cartes, disposées en éventail. Il les tendit en direction des deux amies, un sourire aux lèvres. Lui aussi, il souriait faussement. « Ces demoiselles vont chacune choisir deux cartes. » Il tourna la tête vers le public pendant que les filles récupéraient les cartes, comme pour prouver qu'il ne trichait pas, alors même qu'il savait d'avance celles que May-Line et Nina allaient piocher.

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Attendre qu'il finisse son tour de magie ? Oh non. Elle avait besoin de boire et maintenant. C'était ça, ou être dans l'incapacité de prononcer le moindre mot lorsque le magicien reviendrait vers elles pour leur poser une question. Elle avait la bouche pâteuse et même avaler sa salive ne suffisait plus. Elle jeta un regard insistant à son amie. Déjà que c'était légèrement de sa faute si elle se retrouvait dans un état pareil, elle n'avait pas à venir râler pour un peu d'eau. Si elle s'écoutait, elle aurait prit les jambes à son cou pour se ruer aux toilettes et avaler des litres et des litres d'eau du robinet. Pour une fois, elle se fichait bien de se taper la honte de sa vie… Après tout, entre être incapable de parler ou tourner de l’œil pour déshydrations et partir comme une malade pour boire un peu d'eau, elle ne savait pas ce qui était le plus honteux des deux. Et au point où elle en était, elle était persuadée que rien ne pouvait aggraver encore plus son cas. Mais le Dieu de la bonté l'entendit et par, elle ne sait quelle miracle, Nina découvrit une bouteille sous sa chaise qu'elle s'empressa d'ouvrir pour boire une gorgée avant de lui passer. La jeune fille la remercia d'un signe de tête et finit d'une traite ce qui restait dedans. Bonheur extrême. Elle se sentait déjà beaucoup mieux. Elle posa la bouteille vide à côté de sa chaise, prenant note qu'une autre se trouvait à ses pieds. Tant mieux. Elle risquait d'en avoir encore besoin. Elle se retourna vers Nina et croisa les bras sur sa poitrine.

« - J'espère bien que tu es désolée, marmonna-t-elle entre ses dents. Et en quoi être sur une scène en compagnie d'un magicien va me servir ? Ce ne sera même pas utile pour l'écriture de mon deuxième roman… Tu sais, la magie, là-bas, c'est autre chose que faire sortir un lapin de son chapeau... »

Vraiment, May-Line nageait dans l'incompréhension total. Primo, ça ne servirait à rien dans sa vie de se trouver là où elle se trouvait actuellement et ensuite, elle ne voyait pas plus ce que ça pouvait apporter à Nina. Bonne conscience, oui, mais pourquoi ? De qu'elle aide parlait-elle ? Qu'est-ce qu'elle cherchait réellement à faire à part à commettre son meurtre ?

« - Dis-toi que tu auras ma mort sur ta conscience… Tu as vu le nombre de personnes qui sont dans cette salle ou pas… ? »

Mais la petite discussion prit vite fin, puisque Alfred se tourna de nouveau vers les jeunes filles afin qu'elles puissent choisir deux cartes. La jeune fille fronça les sourcils, tentant de comprendre où allait être l'entourloupe et regarda Nina en choisir deux, puis fit de même. A quoi bon se casser la tête à tenter de comprendre ? C'était un professionnel et elle, qu'est-ce qu'elle y connaissait ? Elle jeta un coup d’œil à ses deux cartes et soupira légèrement. A tout les coups, il allait leur faire le coup du ''Je vais lire dans vos pensées et deviner les cartes.''. Basique, mais drôlement efficace. Elle releva la tête en direction du magicien et comme pousser par l'adrénaline, lui annonça que c'était bon. Choquée par son articulation parfaite et sans le moindre bégaiement, sa gêne revint au galop, tout comme le rouge tomate sur ses joues.

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Nina se mordilla la lèvre suite à la réponse de son amie. Maintenant qu'elles étaient toutes les deux sur la scène du More Music pour participer au tour de magie d'un grand prestidigitateur devant quelques trois milliers de personnes, Nina n'était plus sûre de rien. May-Line la faisait clairement douter sur l'idée qu'elle avait eu, et elle commençait vraiment à se demander si elle avait bien fait de demander à Alfred de la Tour de les choisir elles pour venir sur scène, comme premier bain de foule pour son amie. Peut-être qu'elle y était allée un peu trop fort, un peu trop tôt. Même elle n'était pas à l'aise, alors qu'elle était plus habituée à la scène que May-Line, et plus habituée au contact avec les autres en général. Pourquoi ne s'était-elle pas contentée de la faire sortir en boîte ? Au moins, elles auraient eu une échappatoire si cela ne se passait pas comme elles le souhaitaient. Là, elles ne pouvaient visiblement pas quitter leur chaise jusqu'à la fin du numéro, et qu'elles aient la bouche sèche, mal au ventre ou peur du public importait peu. Si elles se levaient, non seulement c'était la honte pour elles, mais aussi pour le magicien dont le tour serait raté ; et elles n'avaient rien à gagner à attirer les foudres d'une personne aussi connue que lui. Surtout pas Nina, en réalité ; parce que si elle avait eu cette opportunité, celle de demander à Monsieur de la Tour de l'inviter elle et son amie sur scène, c'était grâce à son père et ses relations. Si elle ridiculisait Alfred ce soir, il ne manquerait pas d'en toucher deux mots à Monsieur Plae, et ce serait sa réputation à lui qui serait mise à mal. Et il avait beau aimer sa fille, il aurait probablement du mal à lui pardonner une carrière détruite. Nina et May-Line n'avait donc plus qu'à serrer les poings et les mâchoires et attendre patiemment que la torture se termine. « On ne va pas parler de ça maintenant, si ? » marmonna Nina, sans regarder son amie. Elle avait peur qu'un micro soit caché quelque part et que toute la salle l'entende, ou bien que le magicien revienne vers elle un peu trop rapidement et les coupe en pleine discussion. Néanmoins, elle se sentait obligée de se justifier. « Ça ne va pas t'aider pour ton inspiration, bécasse, c'est pour ta timidité. » La blonde leva les yeux en l'air, presque outrée d'apprendre que May-Line n'avait pas capté la raison de toute cette manigance. C'était bien la peine de s'être décarcassée... Parce que si elle avait voulu lui donner de l'inspiration pour l'écriture de son roman, elle ne se serait certainement pas donné autant de mal. Elle aurait dépensé plus d'argent, peut-être, en l'emmenant au parc Harry Potter en Floride par exemple, mais elle n'aurait pas tenté de convaincre son père afin qu'il tente de convaincre l'agent d'Alfred de la Tour pour qu'il convainc lui même le magicien d'accueillir les deux jeunes femmes sur la scène, alors qu'il choisissait en temps normal des personnes au hasard. Parce que, en effet, il y avait des risques ; si cela s'apprenait que le choix des participants au numéro avait été fait à l'avance, on pouvait aisément se retourner contre lui, en clamant qu'il avait des complices et que, donc, il trichait. « Ta mort ? Tu n'en fais pas un peu trop ? » Nina pinça les lèvres. Elle frisait la méchanceté et elle s'en rendait bien compte, mais elle était stressée et il fallait qu'elle se défoule d'une manière ou d'une autre. Heureusement -tout était question de perspective-, Alfred de la Tour revint vers elles afin qu'elles choisissent des cartes, ce qu'elles firent sans plus d'hésitation. À la plus grande surprise de Nina, May-Line, avec la plus grande des aisances, annonça au magicien qu'elles avaient fait leur choix. Nina esquissa un sourire fébrile, et elle passa les minutes suivantes coupée du monde, comme si elle évoluait dorénavant hors du temps. Elle voyait ce qui se déroulait mais elle ne pouvait ni intervenir, ni agir sur quoique ce soit. Elle entendait tous les bruits de façon abasourdie, et sa vue commençait à se brouiller. C'était quand même le comble qu'elle se retrouve dans cette situation, alors qu'elle aurait dû se sentir à son aise. Il fallait croire que cette expérience l'aiderait elle aussi.

Nina reprit ses esprits quand les applaudissements retentirent. Elle cligna des yeux à plusieurs reprises, ne sachant pas quoi faire. Devait-elle se lever, maintenant ? Devaient-elles quitter la scène, avec May-Line ? Elle se retourna vers son amie et l'interrogea du regard. « On peut s'en aller, tu penses ? » La détresse se sentait, discrète mais pourtant présente, dans sa voix. « Il a trouvé les bonnes cartes, au fait ? » demanda-t-elle alors en chuchotant. Elle s'était tellement emmurée dans cette espèce de panique qui ne lui ressemblait pas, qu'elle n'avait rien suivi du numéro. Finalement, le magicien lui-même les invita à retourner à leurs places, ce que les deux amies firent sans se faire prier davantage. Les spectateurs les observèrent lorsqu'elles passaient près d'eux, et Nina fut bien contente de se rasseoir sur son fauteuil. Elle s'écrasa dedans et reprit enfin son souffle. « Pfou... C'était quelque chose. » Elle haussa les sourcils et se tourna vers May-Line. « Je n'aurais pas pensé que ce serait aussi stressant. Désolée, vraiment. » Parce que, si elle-même était stressée, qu'elle avait dû être la sensation de la brune ? Nina détourna le regard et se concentra de nouveau sur le spectacle. Elle s'étonna à quelques reprises des tours de magie, mais elle ne rigola pas une seule fois. Son expérience sur la scène l'avait définitivement sonnée. Quand les rideaux se fermèrent pour annoncer la fin du spectacle, Nina ne redoutait plus qu'une chose : la colère de son amie. Maintenant qu'elles pouvaient parler à voix haute, elle avait peur de ce qu'elle pourrait lui dire. Comme pour éviter cela, elle se pressa d'enfiler son manteau et de rejoindre la foule de personnes qui s'échappaient de la salle.

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