Tout avait pourtant si bien commencé. Frankie entamait aujourd'hui sa troisième semaine auprès de la famille Westherfield. Elle s'y sentait bien, même si elle n'était pas fan des tâches de ménage, on peut dire qu'elle faisait tout de même le travail qu'on lui avait confié. Et puis, le ménage n'était pas son seul boulot, elle devait également s'occuper d'une adolescente de treize ans. Elle qui pensait ne pas savoir s'y prendre avec les gosses, elle avait trouvé en Thaïs une véritable petite protégée. Elle adorait passer son temps avec elle, lui faire découvrir des choses et partager leurs petits secrets, tout du moins c'était plus l'adolescente qui partageait ses secrets et Frankie qui se contentait d'écouter, mais ce n'était pas une torture, au contraire, elle conseillait la jeune fille et elle essayait de l'aider du mieux qu'elle pouvait.

Aujourd'hui, elles avaient décidés d'aller faire un tour au parc afin de se détendre un peu. Thaïs semblait avoir passé une sale journée à l'école et n'avait pour l'instant pas envie d'en parler. N'étant pas une personne trop chiante pour vouloir savoir à tout prix les problèmes de la tête blonde, elle avait proposé de faire un tour au parc ce qu'avait accepté l'adolescente sans problème. Planche de skate à la main, une fois sur place, Frankie changea les idées de Thaïs en lui faisant quelques figures de skate qu'elle pratiquait depuis bien longtemps. Quand elle avait l'âge de Thaïs. « Apprends-moi à faire cette figure, s'il te plaît, s'il te plaît, s'il te plaît ! » Frankie était bien embêté, si ça n'aurait qu'elle, elle lui aurait appris avec grand plaisir, mais elle savait que son père avait sainte horreur de ce genre d'engin et qu'il la tuerait sûrement s'il savait ça. « Je ne pense pas que ton père soit d'accord. » se contenta-t-elle de dire avec tout de même un large sourire sur les lèvres, sachant pertinemment que cela ne servirait à rien et que lorsque Thaïs avait une idée en tête, elle ne l'avait pas ailleurs. Et puis, Frankie avait bien envie d'apprendre à l'adolescente, elle en pourrait également d'envie. « On ne lui dira rien, allez s'il te plaît Francesca. » Elle savait vraiment y faire. Soupirant, Frankie céda. « Bon d'accord, je t'apprends une figure, mais alors arrête de m'appeler Francesca. J'ai l'impression d'entendre ton père. » Alaric ou plutôt monsieur Westherfield comme elle devait l'appeler avait une manière de dire son véritable prénom d'une manière si officielle, que Frankie avait parfois l'impression d'entendre une personne âgée parler.

Frankie expliqua la base à Thaïs : Comment tenir sur un skate, le faire avancer, tourner avec et bien sûr, comment freiner. Elle semblait l'écouter avec attention, ce qui faisait plaisir à Frankie qui adorait partager avec la jeune fille. Elle en vint à lui apprendre la fameuse figure. Elle fit plusieurs fois l'exemple, en expliquant en même temps comment réussir à faire tourner le skate dans les airs et réussir à se remettre debout dessus, puis se fut au tour de Thaïs. Elle rata deux-trois fois le lancer du skate, mais elle ne perdait pas espoir. La quatrième sera la bonne pensa Frankie lorsqu'elle vu le skate en l'air, le soucis fut l’atterrissage. Thaïs posa ses deux pieds sur le skate comme lui avait montré Frankie, mais elle perdit l'équilibre et chuta sur sa cheville. Elle poussa un cri de douleur avant de se mettre à pleurer. « Frankie, j'ai mal. » cria-t-elle entre deux sanglots en tenant sa cheville, alors que Frankie était déjà penché au dessus de l'adolescente, complètement paniquée. « Merde, merde, merde ... Bon, monte sur mon dos, on va à la voiture et je te conduis à l'hôpital. » Frankie essaya de garder son sang-froid. Elle était habituée aux accidents de skate et elle savait donc que ce qu'avait Thaïs n'était pas grave, mais aller à l'hôpital, là où travaillait le père de l'adolescente, Frankie savait qu'elle allait passer un sale quart d'heure.

Voilà maintenant vint minutes qu'elle était assise sur cette chaise d'attente, devant ces murs blancs qu'elle haïssait. Depuis la mort de son père, Frankie détestait se rendre à l'hôpital, elle avait l'impression de revivre les derniers instants de son paternel et de se revoir dix ans auparavant, à pleurer toutes les larmes de son corps. On lui avait demandé de patienter, puisqu'elle ne pouvait pas rentrer dans les urgences avec Thaïs, n'étant pas de la famille. On lui avait aussi dit que le père de Thaïs qui travaillait dans les même locaux été prévenu. Il devait sûrement être auprès de sa fille. Elle se pencha, attrapant ses cheveux en lâchant un énième soupir. Alors qu'elle allait se lever pour faire de nouveau les quatre cent pas, la porte des urgences s'ouvrit pour laisser apparaître Alaric qui porté encore sa blouse de médecin. C'était bien la première fois qu'elle le voyait dans sa tenue de travail, mais elle remarqua surtout ses sourcils fronçaient lorsqu'il posa le regard sur elle. Elle ne se laissa pas démonté pour autant, se levant de son siège pour se poster face à lui. « Comment va-t-elle ? » lui demanda-t-elle en espérant qu'il n'allait pas se mettre à crier devant tout les autres gens qui attendaient également en salle d'attente.

Frankie savait pertinemment qu'elle allait en prendre pour son grade. C'était légitime, Alaric avait sûrement dû être paniqué lorsqu'on lui a annoncé que sa fille était à l'hôpital. Elle se tenait debout à ses côtés, mais la simple manière dont il l'a fixé, elle se sentait toute petite et mal à l'aise d'être dans une telle situation. Si elle aurait pu devenir une petite souris pour s'enfuir sans qu'on puisse la voir, elle l'aurait certainement fait.

Il lui donna finalement les résultats, la jeune fille serait obligée de porter une attelle durant quelques semaines, ce qui fit grimacer Frankie qui n'était pas très contente du résultat. Elle essayait de se remonter le moral en se disant que ça aurait pu être pire, mais Alaric semblait bien décidé à lui rappeler que tout ceci était entièrement de sa faute. La machine était lancée, Alaric lui fit remarquer qu'elle ne se rendait pas compte des répercutions qu'il y avait à cause des décisions que Frankie prenait. Elle baissa la tête, comme une gamine qu'on grondait, sachant pertinemment que c'était mérité. Elle resta dans cette position tout le long, jusqu'à ce que Alaric dépasse des limites que la jeune femme n'admettait pas. Il était passé du vouvoiement au tutoiement, mais ce n'était pas là le plus choquant pour elle, c'était qu'il se permette ainsi de la traiter d'idiote. Il ne semblait d'ailleurs pas en avoir fini, puisqu'il continua de la dénigrer face à un public qui n'en perdait pas une miette. Si Frankie aurait voulu faire carrière dans le baby-sitting, avec la mauvaise pub que lui faisait Alaric, elle aurait pu faire une croix dessus. Il frappa dans le skate de Frankie qui regarda l'action, fronçant les sourcils encore plus que lorsqu'il l'avait traité d'idiote. Elle commençait à bouillonnait et la goutte d'eau qui fit déborder le vase, c'est quand il insinua à travers ses propos que Frankie s'occupait de Thaïs comme d'un vulgaire objet, ce qu'elle ne pouvait supporter sachant qu'elle traitait Thaïs avec un très grand respect, elle qui l'adorait. Lorsqu'il lui demanda de rentrer chez elle, en détournant le regard, il était déjà trop tard pour que la jeune femme arrive à se contenir.

L'attrapant par le bras et le tournant face à elle, elle laissa sa colère explosait. « Non, mais sérieusement, tu te prends pour qui ? » Elle laissa également tomber la politesse, après tout, il avait été le premier à lui manquer de respect. « Je peux comprendre que tu es eu peur pour elle, mais ça ne te donne pas le droit d'être un parfait connard. » Elle ne mâchait pas ses mots et se fichait bien sur le coup de savoir si elle serait virée ou non, impulsive qu'elle était. « Au lieu de te préoccuper de toutes tes règles, essaye un peu de te sortir le balai que tu as dans le cul et peut être que tu remarqueras que Thaïs est devenue une adolescente, plus une gamine qu'on doit étouffer. » Elle savait qu'elle était coupable, qu'il est vrai qu'elle n'aurait pas du laisser Thaïs monter dessus, mais à côté ce n'était pas non plus la mort, des chutes elle en avait fait des dizaines sur son skate qui lui avait fait des blessures bien plus grave que celle qu'avait Thaïs aujourd'hui. « Et puis à ce que je sache, le skate, ça n'a jamais tué personne. Alors tes morales à deux balles, tu les garde pour ta gosse, parce que je suis pas ta fille et t'as aucun droit de me parler comme ça. » Elle était vraiment remonté contre lui et encore, elle gardait bien des choses pour elle alors qu'elle avait le visage tout rouge de fureur. Elle ramassa son skate et avança jusqu'à la sortie, avant de revenir sur ses pas. « Et encore une chose, c'est pas parce que moi je ne peux pas me payer une belle voiture ou encore une maison de luxe comme la tienne que cela signifie que je n'ai aucun sentiment et que je traite Thaïs comme un objet. Elle a sûrement été beaucoup plus souriante à mes côtés qu'au tien, alors oui j'ai peut être pas ton compte en banque, mais moi au moins j'ai un cœur. Riche de merde. » ajouta-t-elle avant de prendre la direction de la sortie fixant méchamment les personnes qui s'autorisaient à la regarder. Alors qu'elle passa les portes coulissantes à l'entrée de l'hôpital, elle s'arrêta pour souffler un instant, histoire de se calmer et de ne pas passer ses nerfs sur quelqu'un d'autres.