La jeune femme sonne une nouvelle fois, exténuée après sa journée de cours suivie de son travail. Elle n'a en tête que le moment où elle pourra se glisser sous ses draps, et dormir jusqu'au lendemain matin. Heureusement, c'est sa dernière livraison de la soirée, et ensuite elle pourra ressentir le bonheur d'une bonne nuit de sommeil. Elle ferme les yeux en attendant qu'on lui ouvre, et repense avec mauvaise humeur aux réprimandes de son patron. Il la trouve trop bavarde avec les clients, trop entreprenante, et il lui reproche de perdre du temps à chaque fois. Izzie ne comprend pas vraiment. Elle ne va quand même pas refuser de leur répondre, s'ils désirent discuter avec elle, non ? C'est cela qui ne serait pas professionnel, et non le fait de parler avec les clients. Mais elle ne peut pas discuter ce que lui dit son chef, elle ne tient pas à perdre son emploi. Après plusieurs minutes d'attente, quelqu'un arrive enfin, la saluant rapidement et ne lui jetant qu'un coup d'œil désintéressé. Celui-là, elle ne risque pas de lui glisser des mots, le mot "aimable" doit lui être inconnu. C'et vrai quoi, il ne sait pas que c'est toujours plus agréable de se sentir considéré ? Izzie a la désagréable impression qu'il la prend de haut. Enfin, elle sourit en acceptant l'argent et lui tend les deux pizzas, lui glissant un mot de salutation en guise d'au revoir. Elle se tourne ensuite vers sa voiture pour retourner au restaurant, et ensuite rentrer chez elle. Elle se frotte les mains pour combattre le froid et l'engourdissement qui l'atteint bientôt, lorsqu'un mouvement sur sa droite attire son attention. Elle stoppe alors sa marche pour regarder dans la direction de ce qui l'a dérangé au premier abord.

La jeune femme aperçoit à travers l'obscurité une silhouette furtive sortir discrètement de la maison voisine. Le noir l'empêche d'en voir plus, mais elle trouve ce comportement suspicieux, et cela lui suffit pour vouloir satisfaire sa curiosité insatiable. Elle ne peut pas s'empêcher de s'approcher de cette personne soupçonneuse, oubliant toute prudence. Après tout, cela pourrait être quelqu'un de dangereux, qui a une arme et qui s'échappe de la maison qu'il vient de cambrioler, mais elle n'y pense pas. Izzie a tendance à oublier qu'il n'y a pas que des bonnes personnes sur Terre, qu'elle peut tomber sur des psychopathes, des malfaiteurs, des meurtriers. Heureusement, à la lumière du lampadaire le plus proche, elle parvient à voir cette personne, qui se trouve maintenant nez à nez avec elle. « Cassie ! » Elle plisse les yeux, pour être sûr de bien reconnaître la jeune femme qui lui tient face. « Qu'est-ce que tu fais là ? » Izzie croise les bras, les sourcils froncés, donnant à son visage fin un air revêche. Elle est peut-être naïve, mais pas assez pour croire que Cassie n'est pas sortie de cette maison aussi silencieusement par hasard. La jeune femme flaire quelque chose là-dessous, et elle est bien décidée à confronter son amie pour connaître le fin mot de l'histoire. Enfin, "amie" n'est pas vraiment le terme adéquat, cela fait un moment que les deux jeunes femmes ne se parlent plus. Depuis la fin du lycée en fait, ou presque. Elles étaient proches à une époque, mais leurs chemins se sont séparés, et ne se sont recroisés qu'une ou deux fois jusqu'à ce soir-là.

Quelques jours étaient passés depuis la mort de son père. Pourtant, Cassie ne semblait pas plus touchée que cela. Elle agissait normalement, elle n'était pas meurtrie pas cela et malgré que ses nuits soient courtes, tout semblait être comme d'habitude. C'est vers dix-sept heures qu'elles ouvraient les yeux. Elle venait de faire une petite sieste et cela lui avait fait beaucoup de bien. Elle ne tardait pas à se préparer pour sortir. Pour une fois, elle ne travaillait pas et sachant que Sawyer était de garde, c'était toute seule qu'elle allait faire la fête. Enfilant une robe noire très moulant et relativement courte, elle se perchait sur ses talons pour rejoindre la boite de nuit de la ville. Une fois sur place, après un chemin à pied, elle écrasait sa cigarette, pénétrant dans l'enceinte pour aller se divertir.

Une heure plus tard, voilà qu'elle dansait déjà avec un homme, elle n'avait pas perdu ses habitudes de voleuses et même si elle n'agissait pas maintenant, elle comptait bien agir dans la soirée. L'homme devait être un trentenaire, extrêmement séduisant, avec une musculature de sportif. Ce qu'elle ne pouvait nier, c'était sa beauté, car il avait tout pour lui. Les traits de son visage étaient fin et il semblait terriblement innocent. Elle se collait donc à lui, se déhanchant sensuellement contre lui avant que ses lèvres n'effleurent les siennes. L'ambiance devenait rapidement chaude, en même temps, elle n'en était pas à son premier verre et lui non plus. Ils quittèrent rapidement les lieux, l'un contre l'autre, rejoignant ainsi la demeure de cet homme. Trent, voilà son nom, cependant, elle ne s'attardait pas vraiment sur son genre de choses, en tant que croqueuse d'hommes, elle ne retenait pas forcément le nom de toutes ses conquêtes. Lorsqu'ils arrivèrent chez lui, il l'invitait à faire comme chez elle, le temps d'aller leur chercher à boire. C'est la période qu'elle appelait "le repérage".

Minuit passé, voilà que le calme régnait à nouveau dans la pièce. Jetant un oeil à l'homme qui dormait à côté d'elle, Cassie enfilait ses vêtements, éparpiller dans la pièce, de longues plus tôt. Elle quittait la chambre, sans un bruit, s'aventurant dans le salon où des bijoux avaient attiré son attention dès son arrivée. Elle les glissait un à un dans son sac à main, extrêmement petit, avant de sortir de la maison d'un air innocent. Remettant ses talons à ses pieds, elle traversait l'allée qui se trouvait dans le jardin, afin d'arrivée sur la route. Lorsqu'on évoquait son nom, elle se retournait rapidement, mordillant sa lèvre inférieure. Izzie Carter. Une ancienne copine du lycée, que faisait-elle ici à la questionner ? Cassandra n'en avait pas la moindre idée. « Carter. » Balançant ses cheveux en arrière, elle scrutait Izzie de haut en bas. « Ce que je fais là ? Je marche, c'est évident. » Pour se foutre de la gueule des autres, elle était la championne. La jeune femme devait trouver son comportement suspect, ce n'était pas tous les jours qu'on voyaiit une femme sortir discrètement d'une maison. « Ça s'appelle filer à l'aveugle, inutile que je te fasse un dessin. » Comme toujours, son ton était froid.

désolée pour le retard

« Carter. » Izzie grimace à l'entente de son nom de famille. Ce n'est pas qu'elle ne l'apprécie pas, quoiqu'il vienne d'un père qui  n'a jamais pris soin de ses enfants, mais elle a un prénom, bon dieu, pourquoi Cassie ne l'utilise pas ? Surtout que lorsque elles étaient amies, ce qui remonte à longtemps mais tout de même, la jolie brune la nommait comme tout le monde le faisait, et pas par son patronyme. La jeune femme ne relève cependant pas, elle n'est pas là pour discuter de la manière dont l'appelle Cassie, mais elle montre son léger malaise en tortillant une mèche de sa frange, qui est trop longue, et qu'elle peut donc toucher à son aise. « Ce que je fais là ? Je marche, c'est évident. » Izzie a l'impression de recevoir une gifle. Le ton glacial et moqueur de son ancienne amie lui fait physiquement mal, et elle n'a su trouver ses mots pour rétorquer. Elle ne comprend pas le comportement de Cassie. Après tout, elles s'entendaient bien avant, elles rigolaient ensemble, et avaient plusieurs points communs qui scellaient leur amitié. L'eau a coulé sous les ponts, mais est-ce une raison pour parler aussi froidement à Izzie ? Cette dernière ne pense pas de cette façon, en tout cas. Lorsqu'elles étaient au lycée, elle voyait bien que la brunette avait son caractère bien à elle, elle était rebelle et vindicative, mais jamais Cassie ne s'était adressée à elle de cette manière. Peut-être au tout début, mais Izzie avait su trouver les mots pour, sinon gagner la confiance de Cassie, tout du moins gagner son amitié. « Ça s'appelle filer à l'aveugle, inutile que je te fasse un dessin. » Izzie ne peut s'empêcher de lever les yeux au ciel après cette dernière remarque, toujours sur le même ton ironique. Elle a bien compris que Cassie s'enfuyait de la maison, mais ce qu'elle veut savoir, c'est pourquoi. Et aussi, avec son optimisme caractéristique, elle espère que son ancienne amie va rapidement abandonner ce ton de parole qui la fait se sentir comme inférieure à elle. « Oui, j'ai compris que tu ne voulais pas te faire voir, merci bien. » Sa voix est presque tranchante, et elle se rend compte qu'elle adopte la même façon de parler que Cassie, comme pour lui montrer que cette manière de faire ne lui plaît pas. « Mais pourquoi pars-tu aussi discrètement ? » Elle va droit au but, sa curiosité n'est pas encore épanchée. Un éclair doré l'attire alors vers le sac de Cassie, et elle aperçoit un bijou qui dépasse légèrement de l'ouverture. « Est-ce que ça a quelque chose à voir avec le collier qui veut s'échapper de ton sac à main ? » Elle l'accuse implicitement de vol, mais cela ne l'étonnerait pas vraiment d'apprendre qu'elle a raison. Bien sûr, ce bijou pourrait appartenir à la brunette, mais alors, pourquoi aurait-elle l'air aussi suspect ? Il y a quelque chose qui se trame derrière cela, et Izzie est convaincue qu'elle est sur le point de connaître la vérité.

pas de soucis ma belle. 

Cela faisait quelques années maintenant que Cassie n'avait pas parlé à Izzie. Bien sûr, à l'époque du lycée, elles étaient proches, mais petit à petit, elles avaient perdu contact. En même temps, Cassie avait énormément changé, elle était devenue de plus en plus garce au fil des années et encore à présent, elle se foutait de la gueule des autres sans aucun scrupule. Elle avait peut-être perdu gros, en effet, mais elle ne regrettait pas ce qu'elle était devenue, c'était plus elle. Pendant toute son adolescence, elle s'était forcé à calmer ses ardeurs, voulant être apprécié par ses amis, mais l'absence de son père l'avait changé, beaucoup trop même. Voilà que Izzie entrait sur un terrain dangereux. Elle commençait alors à questionner Cassie sur le pourquoi du comment et autant avouer que ça l'exaspérait déjà. C'était son problème si elle sortait d'une maison silencieusement, cela ne regardait qu'elle. Soufflant fortement, elle roulait des yeux à la remarque de Carter. Son ton était similaire à celui de Cassie, ce qui la surprenait beaucoup. « Je pars parce que je ne veux pas le réveiller. » Il y avait certes, une part de mensonges dans ce qu'elle avouait, mais d'un autre côté, ce n'était pas si faux que cela. Ses interrogations la mettait hors d'elle, mais elle tentait tant bien que mal de rester souple, de ne pas s'emporter trop rapidement. Son regard se posait alors instinctivement sur son sac où dépassait un collier en or. Glissant sa main sur sa hanche, la jolie brunette dévisageait alors son interlocutrice. « Ce collier ? » S'exclamait-elle en le sortant de son sac à main. « C'est le mien et s'il se trouve ici, c'est qu'on a été un peu trop bestiales ! » Répliquait-elle, en insistant bien sûr le dernier mot qui était sorti de sa bouche. Elle jetait alors un oeil autour d'elle, replissant alors dans son sac. « Et toi alors ? Qu'est-ce que tu fais là ? » Demandait-elle sur la défensive, bien déterminé à procéder au retournement de situation. Posant ses yeux sur la tenue de Izzie, elle remarquait alors l'enseigne d'une pizzeria, ah oui, c'est vrai qu'elle était livreuse. « Dis-moi, tu fais tes livraisons sur une mobylette ? » Oui, elle se moquait, car oui, elle voulait lui faire comprendre qu'elle ne devait pas s'adresser à elle de cette façon. Elle agissait comme une garce, mais elle avait été prise au dépourvue et elle ne supportait pas ça. Izzie la jugeait, se mêlait de quelque chose qui ne la regardait absolument pas.

« Je pars parce que je ne veux pas le réveiller. » Izzie hausse un sourcil encore plus soupçonneux, se questionnant sur la véracité des propos de son ancienne camarade de lycée. Elle pense en son for intérieur que ça ne tient pas, que Cassie ait passé la soirée avec un homme et est partie tôt, soit, mais pourquoi alors est-elle passée par la porte de derrière ? Enfin, son explication est bancale, la brunette peut très bien être discrète tout en se sortant par l'entrée principale.  « Quelle délicatesse. »  Non, décidément, Izzie n'est pas convaincue du tout, et elle le montre bien. Elle ne peut pas s'empêcher de pincer les lèvres, pour montrer qu'elle reste dubitative. Et la vue des bijoux n'a fait que renforcer son doute. Mais encore une fois, Cassie a une réponse à donner. « Ce collier ? C'est le mien et s'il se trouve ici, c'est qu'on a été un peu trop bestiales ! » Izzie n'en croit pas un mot, elle reste sur son idée première, si elle a senti qu'il y a quelque chose de louche c'est qu'il y a vraiment quelque chose de louche, point. Elle s'aveugle peut-être, accuse Cassie sans aucune véritable raison, mais son esprit ne veut pas croire que son acolyte est innocente,   seulement parce que son instinct lui a dicté le contraire. « Très bien, alors tu ne vois pas d'inconvénient à me montrer l'intérieur de ton sac ? » Elle commence à se prendre pour Sherlock Holmes, mais il est vrai que cela lui plaît, d'essayer de confondre Cassie. Elle est très indiscrète, et sur le moment la jeune blonde ne se rend pas compte que sa demande n'est pas très appropriée, que cela reste quand même l'intimité de Cassie, mais tant pis, la question est posée. « Et toi alors ? Qu'est-ce que tu fais là ? » Pas très subtile, comme tentative de détournement de conversation. Izzie est sur le point de répondre, quand elle se rend compte que Cassie a aperçu sa tenue, où plutôt le symbole qui apparaît sur le haut qu'elle porte. D'ailleurs, il faudrait qu'Izzie parle à son patron quand à ces horreurs que les livreurs doivent porter. Elle qui étudie en stylisme, devoir se montrer avec un t-shirt sans forme et d'une couleur affreuse ne lui plaît pas vraiment. Enfin, là n'est pas la question. « Dis-moi, tu fais tes livraisons sur une mobylette ? » Izzie n'apprécie pas du tout la remarque, où plutôt la manière dont elle a été dite. Elle voit bien que Cassie se moque d'elle, et de son métier, c'est insultant. Enfin, elle ne va pas s'énerver pour ces bêtises, déjà que le ton de Cassie l'a assez refroidie. « Et si c'est le cas, en quoi ça t'amuse ? » demande-t-elle, mordante.  « Enfin, pour te répondre, j'ai une voiture, tu vois, elle est un peu plus loin derrière toi.  » Puis, elle reprend : « Bref, on dérive du sujet. Tu te rappelles, on parlait de ta mystérieuse présence ici, et du joli collier que renfermes ton sac à main. » Izzie est un petit peu mal à l'aise, elle ne veut pas laisser la conversation partir là où il ne faut pas.

Ses remarques, ses gestes ne faisaient qu'agacer la jolie brunette. Elle n'aimait pas qu'on se mêle de sa vie et pourtant, elle subissait un interrogatoire de police par une ancienne camarade du lycée. Déjà, pour Cassie, cela ne se faisait pas. Après tout, est-ce que la jeune femme s'immisçait dans la vie de son interlocutrice ? Absolument pas. En réalité, c'est surtout parce qu'elle s'en contrefichait de savoir si elle allait bien ou mal, ce n'était pas son problème. De l'eau avait coulé sous les ponts désormais, et la brunette avait changé et elle ne considérait plus vraiment Izzie comme une amie, juste ex-amie. Elle ne l'avait pas vu depuis plusieurs années, du moins, elle l'avait aperçu, mais loin de là l'idée de venir l'aborder et de prendre des nouvelles. C'était différent à présent. Bref, Cassandra voulait détourner la conversation à son avantage, pour mener la danse. Elle avouait alors à Carter que le collier qui dépassait de son sac était le sien, après tout, son argument était valable, Cassie était connu pour son côté délurée et volage, donc ça tenait la route. Cependant, Izzie insistait, souhaitant jeter un coup d'oeil à son sac. Elle n'avait pas envie de lui montrer, c'était ses affaires et ça ne concernait en rien son ancienne camarade. Un rire sarcastique sortait de sa bouche tandis qu'elle secouait rapidement la tête, exaspérée. « Est-ce que je te demande la couleur de ta petite culotte ? » Demandait-elle, considérant sa réponse comme un non catégorique. « C'est mon intimité, je ne fouille pas dans tes affaires. » Ajoutait-elle d'un ton déplaisant. Elle rassemblait ensuite ses cheveux du même côté, prenant ainsi l'avantage sur elle, se moquant ouvertement de son travail. D'un côté, elle n'était qu'une simple barmaid, rien d'extraordinaire, mais c'était dans sa nature de se foutre des autres. « En rien. » Lâchait-elle du tac au tac, élargissant son sourire jusqu'aux oreilles. « Le mieux tu vois, ce serait que tu ailles la rejoindre. » Autrement dit, hors de ma vue. Elle jetait un rapide coup d'oeil à la maison d'où elle sortait, croisant ensuite les bras contre sa poitrine. « Écoute, Carter.. » Balbutiait-elle doucement, tentant de garder son calme. S'il y avait eu un fossé, elle l'aurait certainement jetée dedans, ce n'était pas l'envie qui lui manquait. Son insistance ne faisait qu'amplifier sa nervosité. Elle soupirait alors, reprenant là où elle en était. « J'ai d'autres choses à foutre que de papoter avec une cruche comme toi ! » Ajoutait-elle d'un ton froid, ce n'était pas très gentil de la traiter ainsi, mais Cassie commençait à être agacée par elle. De plus, elle ne faisait jamais dans la dentelle, Izzie savait très bien qu'elle n'était pas une fille fréquentable. « Vois-tu, tu n'es pas ma priorité ce soir. »