 | (#) Sujet: Tu crois que la nuit nous oubliera ? (feat. Abigail)  Dim 6 Oct - 1:35 | |
| Le noir complet couplé du fourmillement de rêves du sommeil profond fut soudain stoppé. Mes paupières étaient lourdes, et collées de surcroît. Les muscles de mes membres étaient happés par la force de la gravité, comme si mon âme était encore allée trop haut cette nuit. J'abandonna l'entreprise d'ouvrir mes yeux, et tenta de replonger dans le sommeil, sans me soucier de l'heure. Les vieux volets laissaient percer le jour à travers la pièce. Je vivais comme un vampire, terré dans ses quartiers aux heures du soleil et actif la nuit.
Je me suis rendormis. Je suis ce qu'on appelle un enfant de la nuit. Je suis cette espèce humanoïde assoiffée de sensations nouvelles. Ce genre de gamin avide qui ne pourront jamais grandir. Je savoure le sommeil léger, le plaisir d'avoir le temps ça n'a pas de prix. Mais je m'éveille une seconde fois, et me décide à émerger. Chaque action se fait de plus en plus rude, de plus en plus éreintante. Tout votre corps vous crie de retourner vous coucher, mais votre vessie se tord et vous rompt le bas du ventre. Je cours au toilette et vidange ma vessie avec soulagement. Je dose fort le café, et allume une cigarette. L'odeur vaporeuse des deux mélanges se répand dans le petit chalet. J'ouvre une fenêtre qui pousse un grincement ; le ciel est bleu, le soleil brille mais le brouillard demeure. C'est un magnifique paysage, les pins sont presque bleus.
Je bois mon café avec le soleil dans les yeux, l'automne arrivera bientôt et je tente toujours de retenir l'été, comme la plus jolie fille qu'il me serait donné de voir. Après avoir écouté le chant des oiseaux, je décide d'allumer la radio. C'est une émission de salsa. J'engouffre un croissant tout chaud, que je viens de placer dans le four. Je fais longuement couler l'eau de la douche sur mes plaies invisibles. Je tente peut-être de me rincer de mes pêchés, et j'oublie si ce sont mes larmes qui m’inondent ou bien l'eau des canalisations. L'eau brûlante m'apaise et l'eau glacé me ressaisit. Je pense à une fille... puis me ravise, j'ai à peine la force suffisante pour me laver les pieds et les cheveux. Je noue ma serviette autour de ma taille et ébouriffe mes cheveux. Mon corps s'affale comme une masse sur le minuscule canapé-lit. Maintenant, ils jouent du tango. Je me sens lourd, je me sens seul. Ce soir j'ai du travail et après je file en boîte, renifler de la poudre et de la viande fraîche. Je reprend un peu de café. Il est seize heure trente, j'enfile mes bottes en caoutchouc avec rancoeur et marche jusqu'au potager. Il faut désherber, couper les chous, les laver, les mettre en boîtes... Dans ce moments là je prie pour que même Dieu ne me voit pas. Je me transforme en petite paysanne en tablier addict de la conserve et du fait maison. Lorsque j'ai fini, il est déjà vingt heures trente. Je reprend une douche rapide, tout en relançant la machine à café. Les cheveux toujours humides, j'allume une autre cigarette. J'attrape mon casque de moto et grimpe sur ma mobylette. Le vent est chaud, c'est une chance. Je file jusqu'à l'appartement de mon rendez-vous, salue le type et lui tape dans la main. Nous commençons à nous connaître, ainsi, il m'adresse un petit clin d'oeil presque commercial mais sympathique. Je lui fais comprendre que je n'ai pas le temps et remonte sur ma mob' en direction de mon autre rendez-vous. Je grimpe les escaliers deux par deux, mais prend l'ascenseur pour le dernier étage. En espérant secrètement être seul. Souhait exhaucé, je goûte rapidement à ce qu'il y a. Tout va bien. Je toque à la porte, récupère mon dû et réemprunte les escaliers pour redescendre. Il est vingt-deux heures. Je passe à l'épicerie de nuit pour deux cannettes de bière brune, puis roule jusqu'à la boîte.
Je repère des connaissances dans la file et offre ma seconde bière à celui que je connais le mieux. Il y a beaucoup de monde ce soir, et beaucoup de nouvelles têtes. Ma meilleure connaissance me sort des blagues salaces pathétiques auxquelles je ris beaucoup. Pour sembler amical, je lui tape dans l'épaule. En vérité, je ne me souviens même plus de son nom. Il y a des belles créatures ce soir, de tous les genres. Plus arrondies ou plus anguleuses, plus grandes ou plus petites... Il y en avait pour tous les goûts. Ma meilleure connaissance s'appelle Michel, et ses amis Catherine et Josh. Josh est gay. Les hétéros ont souvent besoin de le préciser quand ils présentent quelqu'un, et certains ne se gênent même pas quand la personne est juste devant eux. Josh pourrait me plaire, mais il m'agace. Sa petite chemise bleue cintrée et ses manies de mains efféminées me rendent dingue. Catherine a vingt-cinq kilos en trop et amas de rouge à lèvre vif. La soirée risque d'être longue.
Nous entrons dans la salle. Pour une occasion, que j'ignore, ils ont installé divers lazers et décorations. Je feint de discuter quelques minutes avec mes nouvelles connaissances puis cours me chercher un verre, résigné. J'ai besoin de quelque chose de fort, mais fruité. Un rhum cerise, voilà ce qu'il me faut. J'accède au carré VIP et me plante sur la terrasse en observant les étoiles. Mes nouvelles connaissances m'ont au moins donné ça, l'accès à la tranquilité. |
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