JE NE SUIS PAS L'ANTIDOTE, JE SUIS LE POISON, C'EST LA TOUT MON CHARME.

C'EST LA NUIT QU'IL EST BEAU DE CROIRE A LA LUMIERE

une heure.
deux heures.
trois heures du matin.
les nuits parisiennes avaient une fois de plus eu raison de toi, hortense, et tu titubais à travers la marée humaine qui te faisait face. tous ces gens, avec au moins deux grammes d’alcool dans le sang, complètement éméchés qui étaient allés jusqu’à oublier leur propre nom alors que ce qu’il voulait c’était oublié celui de quelqu’un d’autre.
pathétique.
toi aussi tu l’étais. regarde toi, du haut de tes dix-sept ans t’avais déjà des restes de poudre blanche sur les coins du nez. et tu fendais la foule avec ton petit sourire narquois à la recherche d’un visage familier, parce qu’à force les inconnus t’en avais un peu marre.
une pression venait s’installer sur ton bras, quelqu’un te retenait, tu fis pivoter ton corps. c’était qui lui encore bordel, tu haussais un sourcil sans rien dire. il devinait ta question. hortense. mais comment il connaît ton prénom celui là encore. tu restais là plantée, poussant un léger soupir en attendant qu’il continu.
on est en cours ensemble. ouais, et alors ? il pensait peut-être que t’avais que ça à faire, il y en a pleins des gens qui sont en cours avec toi, c’est le principe d’un lycée. tu le toisais, toujours aucun mot ne voulait sortir de ta bouche. t’avais pas envie de te fatiguer à cracher ton venin sur quelqu’un qui n’en valait pas le coup.
il s’était enfin décidé à tendre son bras vers toi, il avait quelque chose dans la main. tu fronces les sourcils, ne devinant pas encore ce que c’était. je t’ai pris un verre. quel gentil garçon. c’est de la vodka. cool, t’avais justement soif.
tu tendais enfin la main, t’emparant du verre.
accompagné de ton petit sourire de faux-cul pour l’occasion.
tu ouvrais enfin la bouche. t’es mignon, tu lui balançais en tournant les talons pour retourner te mêler à la foule.
tu buvais une gorgée du verre.
c’est dégueulasse.
tu finissais le verre.
et d’un coup tout s’était passé très vite. le brouhaha de la musique parvenait moins clairement à tes oreilles le remplaçant peu à peu par des acouphènes insupportables. et tout se mit à tourner en face de toi, la marée humaine c’était transformée en tourbillon. tu titubes comme tu peux jusqu’au comptoir en espérant que ça allait aller mieux.
ça n’allait pas mieux.
tu essayais de te rassurer comme tu pouvais, tu flippais, ouais toi, la princesse bourgeoise qui n’a peur de rien ni personne.
ça tournait encore et de plus en plus.
tu fermes les yeux.
tu te sens partir, tomber lentement contre le comptoir.
et il était là devant-toi, c’était le mec à la vodka.
puis le trou noir.
le vide.
tu ouvrais les yeux, sans reprendre conscience t’avais l’impression de vivre le moment par flash ta tête était contre le sol d’une ruelle, tu sentais le béton sous tes doigts.
flash.
bienvenu au pays des rêves pétasse. c’était lui c’était le mec à la vodka. ou plutôt ton pire cauchemar.  tu comprenais pas ce qui se passait, ton corps ne répondait plus, même ton esprit ne répondait plus.
flash.
une douleur sur ta joue, peut-être une claque, tu savais pas, tu ne savais plus. une nouvelle douleur, dans tes côtes cette fois. alors tu as perdu ton air supérieur ?
flash.
t’entendais des pas s’éloigner peu à peu et d’un coup, le silence. tu fermais à nouveau les yeux pour sombrer dans l’inconscience.
quatre heures.
cinq heures.
six heures du matin.
tes yeux s’ouvraient d’un coup, ça ne tournait plus autour de toi. tu pensais à un cauchemar. ce n’était pas un cauchemar. tu reconnaissais la fraicheur de la ruelle qui te faisait face. t’essayais de bouger. aïe. tous tes membres te faisaient extrêmement mal, tellement que tu serrais les dents pour déplacer ton bras. tu avais réussi tant bien que mal à t’asseoir contre le mur, remarquant que ton sac n’était plus là non plus et que ton corps était parsemé d’hématomes.
alors tu recroquevillas tes jambes vers toi.
et ta tête entre les mains.
c’était ce jour-là. ce jour où la princesse bourgeoise était tombée de son trône pour laisser place à la garce qui n’arrive plus à faire confiance à personne.


J'AI ENVIE DE SORTIR TARD, DE TRAÎNER NULLE PART, DE ME SAOULER A MORT ET DE RECOMMENCER ENCORE


salut, je m’appelle isabella.
tu ne t’appelles pas isabella.
et je suis alcoolique.
tu n’es pas alcoolique.
pardon, il est vrai qu’il n’est pas rare de te croiser à l’aube titubant à travers les ruelles de White Oak Station les cheveux en bataille et le maquillage noir ruinant tes jolies joues rouges. mais tu ne vas sûrement pas arrêter l’alcool. tu aimes tellement te mettre la tête à l’envers.
tout ton auditoire est pendu à tes lèvres, attendant que tu leur fasses une fois de plus part de tes talents d’oratrices. que tu racontes une fois de plus une de tes histoires délirante de la période où tu étais soi-disant alcoolique. les gens ici adoraient tes histoires c’est pour ça que tu y retournais régulièrement. un tel public, on ne trouve pas ça partout.
alors tu balançais tes histoires, la seule chose qui était vraie quand tu venais aux alcooliques anonymes.
même toi t’es pas crédible avec ton air de pardonnez moi je regrette toutes mes erreurs. pitié, personne te connaissant ne voudrait gober ça. mias l’avantage c’est qu’eux ils ne te connaissaient pas et qu’ils riaient à gorge déployée à chacune de tes histoires.
tu aimais à croire qu’en fait, tu faisais une bonne action là.
eux, ça les fait rire.
et toi tu t’éclates à faire croire que tu es une ex-alcoolique, à jouer comme tu aimes si bien le faire.
et ce n’est qu’un parmi tes nombreux mensonges et nombreuses manipulations.
au moins ici personne ne sait que t’es riche à en crever, c’est bien pour ça que t’es venu à White Oak.

AND THEN SATAN SAID "HERE, HAVE FEELINGS"

(re)bienvenue