Billy glissait ses doigts dans l'épaisse fourrure de Doc. Ce chien, aussi vieux était-il, semblait être resté habité par l'âme d'un chiot. Et Billy ne cessait de s'émerveiller, chaque jour qui passait, devant les idioties de son fidèle terre-neuve. Il se rappelait encore du jour où il l'avait acheté. Cette pensée lui arrachait un sourire, alors qu'il se souvenait encore du moment où Doc avait... Fait chier ! Sam attrapait sa feuille et la froissait en une boule difforme avant de la jeter à travers la pièce, folle de rage. Deux heures pour écrire 6 lignes immondes. Qu'est-ce qui ne va pas chez moi ?! Épuisée, elle se laissait tomber le front contre son bureau en échappant un long soupir. Puis, elle se redressait et passait une main sur son visage meurtris par le manque de sommeil. Il devait être trois heures du matin, quelque chose comme ça. Et elle refusait toujours d'aller dormir. Généralement, elle n'y allait pas avant d'avoir bu ses 4 bières, sinon elle se mettait à cogiter et c'était infernal. Elle attrapait donc la troisième, la décapsulait contre son bureau et descendait quelques gorgées. Devant elle, des dizaines et des dizaines de feuilles recouvraient le bois de son bureau. Des feuilles noircies par l'encre, par les ratures, la rage, quelques larmes d'exaspération aussi. Sam faisait ça à l'ancienne, elle s'était toujours refusée à écrire sur un ordinateur. Elle ne trouvait pas ça suffisamment authentique. Et puis, l'ordinateur représentait bien trop de tentations. Mais malgré tout, en 7 ans, elle n'avait toujours pas écrit un seul chapitre. Elle avait tenté des milliers d'approches pour commencer à écrire le début de son roman. Mais ça finissait toujours mal. Toujours par des cris, des soupirs et une estime de soi-même qui s'effritait de plus en plus. Pourquoi j'm'obstine... Murmura-t-elle, dépitée. Et pourtant, malgré le temps qui passait, elle n'abandonnait pas. Elle se raccrochait à ça. La seule chose qui valait encore le coup dans sa vie actuellement.

Billy riait, il riait si fort que des larmes venaient courir sur ses joues mal rasées. Doc courait après les canards de l'étang, créant ainsi un joyeux bordel qui l'amusait énormément. Les canards semblaient à peine effrayés par les aboiements rauques du vieux chien noir. Ils s'envolaient à son arrivée mais se reposaient juste derrière lui l'instant d'après. Et le terre-neuve, refusant d'abdiquer, revenait sans cesse à la charge. Mais cet instant de légèreté fut interrompu lorsque, venant de derrière lui, des bruits de pas se firent entendre. Billy se raidit aussitôt. Il pouvait reconnaitre ses pas entre mille. MERDE DÉJÀ ? Hurlait brusquement Sam en bondissant de sa chaise, alors qu'elle venait de remarquer qu'il était 17h03. Elle aurait dû ouvrir le bar il y avait bientôt 20 minutes. Tout en râlant et en pestant, elle fonçait dans la salle-de-bain, elle retirait le t-shirt immense qui la recouvrait et enfilait son bon vieux jean et un débardeur qui laissait entrevoir une vue sur ses seins plutôt sympathique. Tout en courant vers ses chaussures, elle nouait ses cheveux bouclés en un chignon négligé avant de dévaler les marches pour aller ouvrir sa vieille bicoque.
A 22h, elle faisait salle comble, à son plus grand bonheur. Ça faisait bien deux mois que ça n'était plus arrivé. Et il y avait pas mal de nouveaux ce soir-là, Sam décidait donc de mettre en avant ses talents de commerciale pour fidéliser cette clientèle. Bon, par "ses talents" entendez surtout "ses seins". Appuyée au comptoir, elle faisait les yeux doux à un quarantenaire qui avait du mal à la regarder dans les yeux, justement. Après dix minutes de ce petit jeu de séduction, l'homme, qui avait déjà reprit deux verres pour lui faire plaisir, finit par se montrer insistant. Il tenta par deux fois de passer ses mains de l'autre côté du comptoir pour rentrer en contact avec Sam et, l'alcool le rendant quelque peu téméraire, il finit par lui demander s'ils pourraient "finir la soirée ensemble après la fermeture". Sam, aussi stable qu'une nuée de sauterelles sur un trampoline, se pencha brusquement vers lui et lui attrapa violemment la gorge afin d'attirer son visage vers le sien. Ecoutes-moi bien espèce de désespéré. Est-ce que c'est écrit maison close sur mon enseigne ? Ta gueule, ne répond surtout pas. Alors tu vas gentiment refermer ta braguette et arrêter de te prendre pour Hitch. J'suis là pour te servir une bonne cuite, pas une bonne baise. L'homme, honteux, n'osait plus rien dire, alors qu'autour de lui, les habitués riaient à pleins poumons. Elle finit par le relâcher et prépara le cocktail le plus cher qu'elle servait. Elle claqua le verre devant lui, alors qu'il n'avait rien demandé et grogna : Ça fera 15$. L'homme sortit quelques billets, lui murmura de garder la monnaie et fila sans demander son reste et sans boire son verre. Trou duc. Souffla-t-ele en le regardant filer la queue entre les jambes. A côté de lui, Ted, un vieil habitué. Hey dis voir mon cœur, j'peux avoir le verre du coup ? Sam s'emparait du cocktail et venait le déposer devant celui qui le réclamait. Pas de souci poupée. Ted, tout joyeux, descendait avec satisfaction plusieurs gorgées du breuvage. C'est là que Sam, tout sourire, lança : Ça fera 15$, mon cœur. Ted manqua de s'étouffer et la fusilla du regard. T'es sérieuse ? Bon sang Sam, t'es la plus malhonnête que je connaisse. La brune lui offrit un clin d’œil et retourna essuyer ses verres. Elle faisait bien comme elle pouvait pour s'en sortir à vrai dire.  

Assit à l'intérieur, Billy la regardait tailler les rosiers dans le jardin. Il y avait cette note de nostalgie et de tendresse dans ses grands yeux bleus. Cette façon bien à lui d'exprimer une forme de douleur. Et Doc l'avait bien sentit. Il s'approchait doucement, pour finalement venir poser sa grosse tête sur la cuisse de son maître. Billy baissait la tête vers lui un instant, le temps de lui offrir quelques caresses. Comme pour lui dire, merci mon ami. Mais en relevant la tête, elle n'était plus là. Elle s'était évaporée avec le reste de ses souvenirs. SAM ?! La brune sursautait, laissant une grande trainée noire sur sa feuille. Merde. Pesta-t-elle tout en se levant précipitamment et en s'activant. Elle commença à rassembler toutes ses feuilles. OUI OUI J'SUIS EN HAUT, J'ARRIVE ! La montée de stress qu'elle venait de subir la faisait trembler de la tête aux pieds. Elle ouvrit un de ses tiroirs, au hasard, et balança dedans feuilles et stylos, faisant ainsi disparaitre toutes les "preuves". Au moment où elle refermait le-dit tiroir, son frère rentrait dans la pièce. Qu'est-ce que tu fais ? Lança-t-il, un sourire aux lèvres. Sam contournait son bureau pour s'approcher de lui et l'inciter à rester de ce côté-là de la pièce. J'étais en train de regarder un porno. Railla-t-elle, avant de déposer un baiser sur la joue de son aîné. Quoi ? Et tu ne m'invite même pas ? Tu parles d'une famille ! Sam lui refila un grand coup sur l'épaule tout en grimaçant. Putain, t'es dégueulasse Maxwell. Mais ce dernier ricanait, pas le moins du monde gêné par ses propos. Il venait s'installer sur le bord du lit de Sam et, retrouvant un air plus sérieux, il demandait : Alors ? Pourquoi tu voulais me voir ? Ça avait l'air urgent ? Aussitôt, Sam devint tendue et son visage pâlit. Elle se mit à bafouiller et à gesticuler, ne sachant plus quoi faire de ses deux bras. Oh, ben, en fait, c'est que... Y a les plombs qui ont sautés ce matin et ça a grillé une partie du circuit électrique qu'il va falloir changer, sauf que.. enfin... Sam s'enfonçait. Elle qui était toujours du genre directe semblait ici complètement perdue. Max, loin d'être stupide, savait de quoi il s'agissait. Il se levait et de la poche intérieure de sa veste, sortait un chéquier. Il te faut combien ? Demandait-il afin de mettre fin à ce moment gênant. Surtout pour Sam. La jeune femme baissa les yeux, honteuse tout en soupirant. 750. Sans un mot, Max commença à rédiger le chèque. J'te rembourserais ! S'écriait-elle subitement. Je... je sais que je te dois déjà beaucoup d'argent, mais j'te promet que je te rembourserais chaque centime que je te dois. J'ai tout noté. Cette situation était incroyablement humiliante pour elle. C'était déjà la cinquième fois qu'elle empruntait des sous à son frère. Et ce ne serait probablement pas la dernière. Sans lui, elle aurait coulé depuis longtemps. Et ça la tuait de lui devoir quelque chose. Elle le connaissait, elle savait pertinemment qu'il n'attendait aucun remboursement de sa part. Il faisait juste semblant, histoire de ne pas trop heurter son orgueil. C'était peut-être pire finalement. Elle ne savait plus trop. Il finit par lui tendre le chèque, mais au moment où elle s'en emparait, il ne lâcha pas prise. Vends ce putain de bar avant qu'il te bouffe, Sam. De blanche, Sam vira au rouge. Elle détestait quand il faisait ça. Quand il lui donnait des conseils. Elle savait que ça partait d'une bonne intention, mais ça la rendait folle. Elle avait 27 ans, bon sang ! Elle n'avait pas besoin qu'il s'occupe d'elle comme ça. Bon, c'était légèrement hypocrite de penser ça alors qu'elle lui réclamait des sous. Mais s'il y avait une once de logique chez Sam, ça se saurait. Agressive, elle lui arracha le chèque des mains en lâchant : Mêle toi de tes affaires trou duc ! Max fit mine d'être outré par ses propos en ouvrant la bouche et en posant ses deux mains sur son torse. Quelle vulgarité ! Il est où le respect pour ses aînés ?! Sam levait les yeux au ciel et lui indiquait gentiment la sortit du doigt. Allé, dégage maintenant, l'électricien va bientôt arriver avec tout ce qu'il faut pour réparer, j'ai pas le temps de m'occuper de toi. Max échappait un petit rire et jugea préférable de ne pas insister pour cette fois. Mais il n'avait pas dit son dernier mot. Ce bar était une catastrophe pour Sam. Et alors qu'il allait passer la porte pour emprunter les escaliers, Sam l'interpella. Hey, Max.. ?! Il pivotait pour lui lance un regard. La logique des choses aurait voulu qu'elle lui dise un "merci", timide mais reconnaissant. Mais souvenez-vous... Il n'y avait pas de logique chez Sam. Tu passeras le bonjour à Manu. Et toutes mes condoléances aussi. Max fronçait les sourcils. Condoléances ? D'un ton sérieux, elle ajoutait : Ben ouais. Pour s'être mariée avec toi. Max éclatait de rire. Et puis, il se mit à faire une sorte de petit déhanché, telle une danseuse sexy. Tu rigoles ? Elle est folle de mon corps ! Et c'est comme ça qu'il quitta la pièce, en train de s'adorer et de s'envoyer des fleurs, comme toujours. Sam secouait la tête de gauche à droite, amusée. Une fois seule, elle se laissa tomber sur son lit et observa son chèque. Il la rendait dingue parfois, mais elle ne pouvait pas nier les faits... Sans lui, elle ne serait déjà plus rien aujourd'hui.
© avec l'aimable participation de maxwell-tête-de-mamelles.

Spoiler:

Cassie Wilhelmsson a écrit:

alyson est parfaite par contre il y a déjà un sam, est ce que tu pourrais changer de prénom ?
bienvenue par ici et excellent choix de scénario

Sam Jenkins a écrit:

Tu passeras le bonjour à Manu. Et toutes mes condoléances aussi. Max fronçait les sourcils. Condoléances ? D'un ton sérieux, elle ajoutait : Ben ouais. Pour s'être mariée avec toi.

Je crois que je vais m'étouffer tellement je ris, t'es géniale
(merci de compatir, by the way. Enfin quelqu'un qui reconnait que c'est pas facile de se coltiner un mec pareil pendant autant d'années )