enzo & azel
our children are gifts«
Allez chérie, tu retrouveras tes poupées plus tard. »
La voix douce, Azel pria sa fille d'arrêter de jouer. Elle avait à chaque fois du mal à l'interrompre, parce que Malia semblait toujours aux anges, au milieu de tous ses poupons. Elle semblait s'être créée un monde bien à elle et cela se voyait qu'elle y renonçait à contre cœur. Malheureusement pour la petite, elle n'avait pas encore l'âge de se garder toute seule et, si Azel sortait, elle devait sortir avec elle.
«
On va aller acheter un cadeau pour ta copine Anna, j'ai besoin que tu m'aides à choisir, en plus. »
Les différentes réunions auxquelles Azel s'étaient rendues avait payé, et elle avait réussi à avoir une place à la crèche pour Malia, dès début septembre. Ça avait été un soulagement, vraiment. Elle adorait l'emmener avec elle à la boutique, mais plus elle grandissait et moins elle tenait en place. Elle avait ramené des jouets, de quoi dessiner, mais ce n'était pas suffisant. C'était compréhensible en même temps ; à son âge, Malia avait envie de marcher, de parler, elle jouait avec dix choses différentes par jour et réclamait beaucoup d'attention. Mais Azel ne pouvait pas à la fois confectionner des habits et s'occuper de sa fille, et Charlotte s'occupait déjà de la vente -elle ne pouvait pas faire la nounou non plus. Au final, Azel devait jongler entre sa petite et son boulot, et c'était plus fatiguant qu'autre chose. Depuis le début de l'année scolaire, elle était de nouveau seule dans son atelier, comme à ses débuts, et cela lui faisait du bien. Son inspiration créatrice lui était doublement revenue, elle avait repris une cadence de travail régulière et proposait davantage de nouveaux vêtements par semaine. Elle retrouvait pleinement tout le plaisir de la couture, qui était peu à peu devenu ces derniers mois davantage un travail qu'une passion. Et de son côté, Malia y avait gagné aussi ; elle n'avait même pas trop protesté, et c'était fait tout un tas de copains et de copines, dont la fameuse Anna dont la maman organisait son anniversaire le week-end prochain. Azel et Malia étaient conviées, bien sûr, et il ne restait plus qu'à trouver le cadeau à offrir.
Azel avait finalement réussi à sortir Malia de ses poupées, et elles évoluaient dorénavant toutes les deux dans Standford Alley, la petite dans la poussette. Elle avait tout le temps envie de marcher, et Azel devait s'arrêter pratiquement toutes les cinq minutes ; Malia s'épuisait vite aussi, et il fallait à chaque fois se stopper pour la laisser remonter, puis se stopper une fois qu'elle avait repris des forces pour qu'elle puisse gambader de nouveau. Elle aurait pu l'obliger à choisir la marche ou la poussette et de ne pas alterner entre les deux une vingtaine de fois, mais Azel estimait que c'était plutôt une chance que sa fille ait envie de marcher, au contraire de beaucoup d'enfants qui restaient flemmards jusqu'à cinq ans passés. Alors elle s'arrêtait à chaque fois et secouait la tête en souriant. Au bout d'un certain temps, le double sûrement qu'elles auraient mis sans ces nombreuses interruptions, elles arrivèrent devant la porte d'une boutique chaleureuse. On y vendait tout pour le bébé, des biberons aux habits en passant par des jouets. Azel n'avait aucune idée de ce qu'elle allait acheter, mais elle comptait sur Malia pour lui donner un indice. C'était simple, elle n'avait qu'à regarder où se dirigeait sa fille et ce qui lui faisait le plus briller les yeux... et elle prendrait quelque chose de similaire.
«
C'est pour Anna qu'on achète aujourd'hui, hein, pas pour toi ma puce. »
Elle préférait le lui préciser, pour éviter une crise de pleurs. Malia n'était pas du genre capricieuse, mais elle s'avérait plutôt susceptible ; et si Azel avait le malheur d'acheter pour sa copine le jouet dont elle-même rêvait, il n'y avait pas de doute qu'elle serait vexée. Et le but d'Azel n'était certainement pas de donner une raison aux deux petites d'être ennemies. Le
cling de la porte résonna, et Malia couru aussitôt à l'autre bout du magasin, attirée par la nouvelle poupée Barbie en date. Azel soupira, amusée -tout ça était nouveau pour elle, du moins depuis quelques mois. Elle, elle n'avait jamais connu tous ces jouets-là. Elle appuya sur un bouton de la poussette pour la replier et la laissa à l'entrée. Elle pourrait marcher librement, comme ça. Elle rejoint sa fille et lui frotta le haut du crâne en arrivant à son niveau.
«
Tu penses que ça lui plairait, ça ? » lui demanda-t-elle.
Malia s'extasiait littéralement devant une poupée métisse aux proportions beaucoup plus naturelles que les Barbie habituelles.
«
Tu penses que ça plairait à Anna ? » répétait Azel, n'ayant pas reçu de réponse la première fois.
Au bout de quelques longues secondes, Malia se retourna vers sa mère le visage boudeur.
«
Non ! » s'écria-t-elle, avec une force qui étonna Azel et les clients autour.
«
Non ? »
Azel haussa les sourcils, avant de rigoler légèrement. Elle avait compris ; Malia voulait cette poupée pour elle, pas pour sa copine. Elle prit sa fille par la main et elles flânèrent toutes les deux dans les différents rayons. Elles finirent par s'arrêter non loin d'un homme, qui semblait plutôt indécis quant à ses recherches. Malia se mit à fouiller dans les bacs qui étaient à sa hauteur, et Azel regarda un peu plus haut.
«
On trouve vraiment de tout ici » lança-t-elle tout haut, de sorte que l'homme l'entende.
Elle finit par se retourner carrément vers lui, un grand sourire aux lèvres comme à son habitude.
«
On voudrait tout acheter, n'est-ce pas ? »
C'était son cas, tout du moins. Si elle s'écoutait et qu'elle avait un compte en banque plus rempli que le sien, elle aurait à coup sûr déjà les bras bien remplis.