la soirée se passe sans changement par rapport à l'habitude.
arni, il suit une routine, celle de gens ordinaires. boulot, maison, jeux vidéo et malbouffe. beaucoup philosophe sur le sens de la vie, et bien le voilà. il n'y a pas de quoi se pense vraiment la tête, juste rester un gars simple dans une vie simple. puis bon, à quoi bon sortir dehors quand on peut jouer avec ses potes en réseau ?
d'ailleurs, le téléphone commence à sonner alors qu'il est plutôt tard. numéro inconnu. il s'interroge. c'est pas qu'il a l'expérience de ces choses là mais quand quelqu'un vous appelle à cette heure, c'est qu'il se passe quelque chose, que c'est grave et qu'il va devoir bouger.
il sait pas quoi. les quelques secondes qui s'écoulent le temps qu'il se déplace pour répondre, il tente de réfléchir à qui peut bien le déranger. alma ? peter ? oui, sûrement peter qui annonce à la dernière minute qu'il rentre.
mais non. c'est bien loin du compte. et tandis que la personne à l'autre bout du fil raconte à arni pourquoi il doit rappliquer illico, il blêmit, sa respiration s'arrête, un peu plus et des larmes se ferait sentir.
il raccroche, il tente de respirer. son père est quelque part dans un bar, le eagle, il est soul, il fait chier son monde et on attend sa progéniture pour faire office de héros. arni s'assied. il pense. il se repasse la voix au téléphone et se demande pourquoi il a répondu qu'il arriverait.
il ne veut pas y aller, il aurait du leur dire d'appeler les flics, ou bien de laisser le vieux tiser jusqu'à ce que mort s'en suive. ainsi il aurait pas perdu sa soirée.
là, il aimerait que Peter soit là. Peter, il aurait gérer la situation, il aurait ravaler tout le dégoût que peut inspirer le vieux, il serait aller le chercher, et l'aurait probablement abandonné sur une route en faisant croire à arni que tout allait bien. peter, il fait chier quand il est absent.
arni déglutit, son estomac se tord. il n'a pas vu son père depuis cette soirée là, où maman l'a réveillé pour partir loin dans la nuit. ça fait des années, et il aurait aimé que quelques supplémentaires s'ajoutent au compteur.
finalement, il prend son courage à deux mains. après tout, il ne peut pas être lâche et refiler son problème à quelqu'un d'autre. ça se fait pas.
il se dépêche pour arriver au bar, parce qu'il a dit qu'il arrivait mais que ça lui a bien pris une demi-heure pour sortir de chez lui, pour se décider.
quand il arrive, y'a personne dans la rue. sauf un type, brun, d'environ son âge. et une silhouette d'un type qui somnole assis, une silhouette familière.
l'envie de pendre ses jambes à son coup et détaler se faire sentir, mais il a pitié du gars qui a l'air de surveiller le paternel. si t'as pas eu affaire à un alcoolique violent toute ta vie, la situation doit pas être simple. quoique, elle l'est pas non plus dans le premier cas.
" T'es là pour lui ? " qu'il demande.
arni observe le vieux avant de répondre. s'il veut détaler, c'est maintenant. mais il ravale et répond.
ouais, c'est moi que vous avez appelé.
il ne se sent aucunement comme un héros. il ne parvient pas à détacher le regard du vieux. même assis là, à pas bouger. cet homme l'effraie.
il a envie de vomir, mais il réprime. il porte son attention au type qui lui parle. qui doit sûrement rêver de se débarrasser du vieux.
" J'essaye de le tenir tant que je peux mais va vraiment falloir le ramener et le surveiller ce soir... "
c'est trop pour arni. ce type, il a l'air de considérer son père comme un être humain digne d'intérêt. bordel, personne lui a dit. ce type, il mérité aucune attention.
" je peux pas le ramener. " répond arni.
"je peux pas " il répète sans détacher son regard.
" tu devrais appeler les flics, je sais pas pourquoi j'ai dit que je viendrais. mais eux le ramèneront. pis si tu veux pas d'emmerde avec les flics, appelle lui un taxi et envoi moi la facture. "
et voilà, arni, il se dégonfle.