agnès, agnès.
agnès, c'est un peu cette fille adulée, rêvée. inaccessible, magnifiquement intouchable. c'est celle pas trop aimée (ou trop, trop adorée), placée sur un piédestal, cette connasse à qui les filles veulent ressembler, ou celles à qui elles s'amusent à inventer des rumeurs sur son dos.
c'est celle dont les garçons parlent comme si c'était une traînée, qui s'jauge de leurs nuits avec elle, cette magnifique rousse aux yeux verts, c'est celle qui règne sur son royaume d'étudiants, celle qui dicte et gouverne.
et thybault, pour elle, c'est rien. enfin. c'est ce que tout le monde croit.

treize ans plus tôt
il est tôt. thybault est sur son vélo, et il file, file, prêt à défiler la vitesse d'une lumière qui transcende le vent, rends jalouse cette lumière. et puis, il tourne, s'arrête devant une maison habitée d'puis pas longtemps. d'après la voisine, c'est la famille gauthier. un homme et une petite fille. une rouquine, d'après la vieille. il a un lettre pour monsieur gauthier, alors il se dit que c'est l'occasion ou jamais. il s'approche de la boîte aux lettre, fébrile. et au même moment, il entends une voix. salut. son coeur s’accélère un peu trop, il s'attendait pas à ça. ses yeux s'lèvent vers la direction de la voix, ça provient d'une fenêtre. et la rouquine, il la voit. elle est perchée sur sa fenêtre, tout sourire. salut. qu'il réponds à son tour. sa voix tremble un peu, et il se sent con, tandis qu'elle le regarde de ses yeux, qui disent à la fois tout et rien.
enfin, c'est peut-être juste son imagination.
tu t'appelles comment ? qu'elle s'enquiert à demander, toujours de son sourire en coin. thyb euh... thybault. il bégaie, rougit un peu. il a pas l'habitude. les filles, il les trouve bien mignonnes mais un peu conne.
mais elle, pas trop. et toi ?
la réponse tarde un peu, le temps que son regard brille, magnifique yeux verts. agnès gauthier. mais appelle moi agnès.

enfants, agnès et thybault se connaissaient. ils étaient amis, sans pour autant être trop proches. ils s'amusaient à grimper aux arbres, jouer à cache-cache ou à tenir à deux sur son vélo. bref, des jeux d'enfants.
mais un beau jour, agnès a déménagé de quartier, coupant les ponts. ils ne se sont plus reparlés, se croisant. agnès, cette année là, elle a changée. passant de jolie petite fille surdouée à peste reconnue, froide et idiote. leurs chemins ce sont séparés, même si de loin, thybault la regardait, l'admirant toujours. elle traînait avec ces garçons baraqués, sortant avec eux durant deux semaines pour les larguer quelques temps après. c'était devenue sa routine, à agnès. jouer. jouer pour oublier.

thybault, il aimerait retrouver agnès. il aimerait retrouver ses cheveux roux emmêlés, la voir se baigner dans le lac, ou encore chanter des chanson débiles.
agnès, elle a besoin de ça. elle a besoin de quelqu'un, de stabilité. elle perds tout, tout ce qu'elle touche. elle a tellement peur agnès.
mais ils vont bien se retrouver, ces deux-là, hein ?