~ À QUOI RESSEMBLAIT TA VIE AU LYCÉE?
Au lycée, j'étais assez populaire et respectée, disons. Je prenais beaucoup de place étant donné mon grand charisme et ma spontanéité. Mon intelligence et ma belle plume attiraient les compliments de mes professeurs. J'étais très impliquée et ma curiosité m'amenait à m'intéresser énormément à mon environnement. Mes parents étaient fiers que je réussisse dans la vie et me soutenaient dans tous mes projets, afin que j'aie un bel avenir à mon image. En plus de tout ça, ma belle chevelure blonde attirait beaucoup les regards et il n'était pas rare que plusieurs garçons me draguaient en même temps. Je m'enflais la tête un peu, mais j'ai vite fini par me calmer.

   ~ ES-TU HEUREUX PRÉSENTEMENT?
Si je suis heureuse ? Bonne question. Comment fait-on pour juger de notre bonheur ? Je ne serais même pas capable de me situer sur une échelle du bonheur. Je me considère... neutre ? J'aime ma vie, mon métier, mon Nathan, ma ville, mais en même temps, ma famille me manque et l'état de ma plus jeune soeur me rend triste. J'aimerais pouvoir être plus près d'elle et pouvoir faire quelque chose pour elle, mais je me sens si impuissante. Finalement, je suis heureuse en surface et malheureuse au fond. Voilà ce qui me décrirait le mieux.

   ~ OÙ TE VOIS-TU DANS DIX ANS?
Dans dix ans, je me vois bien rédactrice en chef d'un prestigieux journal, peut-être même mon propre journal, qui sait ? J'aimerais continuer à voyager beaucoup et faire plusieurs reportages. Je rêve d'être populaire et que tous le monde me connaisse en tant que grande journaliste. Qu'on m'arrête dans la rue pour une photo ou me féliciter de mes bons articles. Non je ne suis pas superficielle ou égocentrique ! J'ai bien le droit de rêver. Sinon, pourquoi pas un ou deux enfants... Un mari, peut-être ? Un vignoble ? Des chats ? Ça me paraît si loin...

Numéro 238.
«Je m’appelle Sky Jones, j’ai 22 ans et je viens de Californie. J’applique au poste de rédactrice en chef.»
« Parfait, avez-vous de l’expérience ?»
« Hum… J’ai un diplôme en journalisme et j’ai travaillé au Daily Press durant 1 an en tant que rédactrice. Je n’ai pas d’expérience comme rédactrice en chef, mais j’apprends vite et ce travail m’intéresse beaucoup. J’ai besoin de ça en ce moment dans ma vie.»
« Je vois… Quelles sont vos qualités ?»
« Je suis une fille très curieuse, j’adore explorer, je m’intéresse à tout. Je suis franche et spontannée. Sans oublier ma grande assurance. Par contre, je m’enfle la tête facilement et je prends beaucoup de place. Je suis prête à tout pour avoir un scoop.»
« on vous rappelle.»

Évidemment, ce fameux appel ne vint jamais. Comme tous les autres appels professionnels que j’attendais depuis plus d’un an. Mais qu’est-ce qui clochait chez moi pour que personne ne veuille de moi ? Je savais que j’étais encore jeune pour le métier, mais j’avais une belle plume et mes textes étaient toujours captivants… Il me manquait un petit quelque chose, faut croire ! Pourtant, j’avais toujours été très studieuse, j’avais ce métier à cœur et je savais depuis longtemps que c’était ce que je voulais faire de ma vie. Rien d’autre ! J’avais grandie dans une famille qui m’avait toujours épaulée et encouragée. Je n’aurais rien pu demander de mieux. Ma mère était chirurgienne et mon père était policier. Nous vivions donc très aisément et jamais je ne manquai de quoi que ce soit. Dans ma famille, nous étions très très – est-ce que j’ai dit très ?- proches. C’était une valeur que mes parents nous ont inculqués très tôt à mes sœurs et moi. Chaque dimanche, ma grand-mère faisait un brunch et il ne fallait manquer cela pour rien au monde. C’était elle le chef de la famille. Il fallait la respecter et ne jamais la contredire. Je l’adorais ma grand-mère et c’était réciproque. Bref, nous étions toute une génération de Jones qui n’en finissait plus. J’avais des cousins et cousines que je n’avais même jamais rencontrés… Mais qui dit grande famille dit souvent famille compliquée. Mon père, Derek Jones, s’est marié avec une jeune Irlandaise fraîchement immigrée, Abigail Berkins. Ma mère donna naissance très jeune à ma sœur aînée, Jodie. Puis, un an plus tard, ce fut mon tour de voir le jour. Étant donné notre très petit écart d’âge, nous étions excessivement proche ma sœur et moi. C’était ma complice, ma meilleure amie, ma confidente, ma deuxième maman. Nous faisions tout ensemble. Nos mauvais coups, comme nos réussites. Parfois même, nous nous disputions pour les garçons. Plusieurs années plus tard, elle donna naissance à une troisième fille, Camélia. Jodie et moi étions rendues bien ailleurs dans nos vies et cette arrivée inattendue ne fit pas la joie de tout le monde.

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Tel que mentionné plus haut, j’ai entamé mes études en journalisme dans l'une des plus prestigieuse école de Californie. J’ai toujours été studieuse. Je me concentrais énormément, je faisais tout pour que mes textes soient le meilleur possible et recevoir le plus de reconnaissance provenant de mes collègues. Ensuite, j’ai travaillé un an dans un petit journal de Californie, mais je me vis dans l’obligation de partir dû à certains problèmes familiaux.

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« Mes chéries, votre mère et moi avons quelque chose à vous dire. Je sais que ces temps-ci, nous ne sommes pas très présents pour vous et nous sommes énormément préoccupés. Il est arrivé quelque chose à votre sœur.»
J’avais chaud, j’avais des sueurs froides, mon cœur battait à tout rompre et j’aurais tout fait pour être ailleurs.
« Camélia a été hospitalisé la semaine dernière. Elle n’allait pas du tout. Les médecins ont fait plusieurs tests et nous ont appris qu’elle est atteinte d’un cancer. Il est déjà à un état très avancé et ils disent qu’elle n’en a plus que pour six mois.»
Ça y est tout s’effondra autour de moi. Je perdis la notion du temps, trop abasourdie par cette nouvelle qui venait de s’abattre sur moi. Le pire dans tout ça, c’était la réaction de ma mère qui hurlait à travers ses sanglots que son bébé était trop jeune pour mourir, qu’un enfant ne devait pas mourir avant ses parents. Je la serrai fort dans mes bras et quelques larmes coulèrent sur mes joues. Mon père et ma sœur nous regardaient, impuissants.

Cette annonce fût le moment marquant qui causa une faille dans ma vie. Toute cette vie que j’avais si bien bâtie, mon avenir qui allait être gâché par ce dénouement inévitable. C’était trop pour moi, je ne pouvais le supporter. À 18 ans, je partis faire le tour de l’Europe. J’avais un besoin urgent de prendre du recul par rapport à ma vie. Je devais faire une mise au point, remettre les choses en question. Et pour y arriver, j’avais besoin d’être seule. J’ai donc tout délaissé; mon boulot d’apprenti journaliste, ma famille, ma vie, mes problèmes…

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« Hey beauté.» Aiden me prit dans ses bras et je lui donnai un gros bisou sur la joue. C’était notre petite tradition. Chaque fois qu’on se voyait, il se méritait une grosse bise. J’étais arrivée à l’hôpital ce matin-là, comme à chaque semaine depuis maintenant deux mois, pour rendre visite à mes petits malades. Depuis que j’avais appris la maladie de ma petite sœur, mon état d’esprit avait changé drastiquement. J’étais devenue plus sensible aux autres, j’ouvrais davantage mon cœur et la maladie me rendait moins insensible. En Europe, j’avais rencontré un garçon qui m’avait incitée à faire du bénévolat dans les hôpitaux pour distraire les enfants malades. En l’honneur de ma petite Camélia. Pour tous ceux qui, comme elle, avaient été malmenés par la vie. Ça faisait peu de temps que j’étais ici et je m’y sentais déjà comme chez moi. J’avais tissé des liens solides autant avec le personnel que les patients. Mais surtout avec Aiden. Je l’adorais mon Aiden. Il était mon sauveur. Il a fait son apparition dans ma vie au moment où j’en avais le plus besoin. J’étais anéantie, démunie, je n’avais plus le goût de vivre. Il m’a fait découvrir cette magnifique chose qu’était le bénévolat. Du coup, il a contribué à faire de moi une meilleure personne. Nous étions inséparables et étant dans une ville étrangère, il m’avait invitée à séjourner chez lui. Nous avons beaucoup voyagé ensemble durant les deux ans que j’ai passées en Europe et ça m’a fait énormément grandir.

« Je suis désolé Sky.» Il avait cette voix navrée de quelqu’un qui regrettait sincèrement ces gestes. « Ne soit pas désolé, c’est de ma faute aussi. Tu ne m’as forcée à rien, j’en avais envie aussi.» Ce qui s’était produit ce soir-là avait été hors de notre contrôle. Nous avions abusé de l’alcool et nous nous étions laissé emporter par la passion qui grandissait en nous depuis longtemps. Nous avions cédé à la tentation. Pourtant, il n’y avait rien de mal à cela, sauf qu’il ne fallait pas que je m’attache trop pour deux raison; de l’une il avait huit ans de plus que moi et c’était excessivement mal vu par ma famille. S’ils venaient à l’apprendre, surtout ma grand-mère, j’étais morte. Elle ne m’adresserait plus la parole. Ce n’était pas dans nos valeurs d’agir ainsi. Mais au fond de moi, je ne regrettais absolument rien. De deux, je devais partir. Me refaire une vie. Je n’avais toujours pas terminé mes études et je devais me refaire une vie, maintenant que j’en avais repris goût.

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Après plusieurs longues discussions, Nathan décida de partir avec moi à White Oak Station. J’avais décidé de terminer mes études en journalisme au Canada. Pourquoi le Canada ? Parce que c’est loin de ma vie d’avant, mais je n’y serais pas trop dépaysée. C’est donc à 20 ans que je m’installai dans cette ville avec mon Nathan, avec qui nous entretenions une relation compliquée. Amis & amants n’avait pas que des avantages. J’ai appliqué à plusieurs journal de la ville, mais sans succès jusqu’à tout récemment. J’ai décroché un poste de journaliste-reporter que j’occupe fièrement depuis deux mois et je ne pourrais être plus heureuse. Je me lançais à fond dans mon métier et j’adorais être la première à avoir les scoops, avoir de l’attention. Quant à ma famille, je leur parle à l’occasion et je vais visiter ma petite sœur régulièrement. Quant à Jodie, nous n’avons plus de nouvelles d’elle. Je crois qu’elle n’a toujours pas pris que je les ai abandonnés…