~ À QUOI RESSEMBLAIT TA VIE AU LYCÉE?
   Au lycée, j'étais transparente. A vrai dire, cela n'a pas beaucoup changé à l'université. La fille dont on connaissait le prénom, peut-être parce qu'il n'était pas commun, mais c'était tout. Je ne faisais pas entendre parler de moi. J'étais une élève totalement lambda qui avait des résultats correctes, voire bons. Je n'étais pas la préférée des professeurs mais je n'étais pas non plus leur tête de turc. J'avais des amis, mais je n'étais pas non plus populaire. Quant à mon père, il était satisfait de sa fille unique : pas d'alcool - du moins, pas à sa connaissance -, pas de drogue, pas vraiment de garçons. Bref, une fille banale et pas difficile à vivre. Je préfère ma vie de maintenant, tout de même, plus intéressante puisque je suis un cursus choisi et qui me plait.

      ~ ES-TU HEUREUX PRÉSENTEMENT?
   Je dirais que oui. Bien sûr, j'ai des soucis, comme tout le monde. L'argent manque pour payer mes études et mes factures et je suis obligée de travailler en dehors des cours. J'ai deux jobs. Le premier, de jour, c'est serveuse dans un café. Ce n'est pas celui qui rapporte le plus, mais c'est le seul dont mon père est au courant. L'autre, je ne crois pas qu'il l'accepterait. Je danse dans un bar. Mes tenues sont souvent assez courtes, il y a une majorité d'hommes. Mais je suis également souvent derrière un rideau, on ne voit que ma silhouette. Non, en fait, il en serait malade. Et encore plus s'il ne le découvrait que maintenant, de la bouche d'une certaine personne...

      ~ OÙ TE VOIS-TU DANS DIX ANS?
   Je ne sais pas trop où je me verrais dans dix ans. Pour l'instant, je me dis que je suis heureuse comme ça, mais je songe que j'ai peut-être envie de trouver quelqu'un avec qui partager ma vie. Ensuite... Peut-être quitter le Canada. J'ai envie de visiter la France, ce pays m'a toujours attirée. Je ne sais pas si je veux y vivre, mais au moins y aller. Mais vu le contenu de ma bourse, je me dis que ça pourrait bien me prendre dix ans avant d'y aller. Non, ce n'est pas du pessimisme, c'est juste du réalisme... Des enfants, pourquoi pas, mais il faut que je trouve quelqu'un pour les faire avec moi, toujours le même problème... Qui voudrait d'une fille transparente ?

PRÉNOM ET/OU PSEUDO: Wa-chan. ÂGE: 19 ans. PAYS: France. PRÉSENCE: 5/7. COMMENT AVEZ-VOUS CONNU LE FORUM? partenariat~  PERSONNAGE INVENTÉ OU SCÉNARIO? inventé. AUTRE CHOSE À AJOUTER?   

Je suis née il y a de ça vingt printemps. J'ai vu le jour à l'hôpital de White Oak Station. En fait, nous n'habitions pas là, mais dans un village à quelques kilomètres. Ma mère, pour son premier enfant, aurait préféré accoucher chez elle, mais malgré son entêtement, elle a bien du capituler lorsqu'ils se sont rendu compte que je ne pourrais pas naitre par voie naturelle et que l'accouchement serait bien plus compliqué que prévu. Mon père a fait l'exploit de convaincre cette demoiselle si têtue. Je pense qu'il a bien fait. Parce qu'autrement, en plus de perdre sa femme, il aurait également perdu sa fille...

Je peux sembler assez détachée lorsque je dis ça, peut-être même que cela vous choque... Mais ne pensais pas que je n'ai jamais souffert de l'absence d'une mère. J'ai simplement été couverte de l'amour d'un père qui me l'a fait oublié la plupart du temps.

J'ai donc grandi sans maman. Mon père était naturellement effondré, mais il ne le laissait pas paraître. Il voulait continuer à faire front. Pour elle. Pour moi. Il m'a baptisée Venus. C'est le prénom qu'ils avaient tous les deux choisi, des mois avant que je pointe le bout de mon nez. Je ne m'expliquerais jamais le choix d'un tel prénom, le même que celui d'une déesse romaine. Peut-être pour l'amour ? Je n'en sais rien. Et je ne sais pas si ça m'intéresse, en fait.

Mon enfance fut des plus banales. Mon père faisait parfois quelques boulettes, mais c'est peut-être ce qui contribuait à faire que je l'aimer si fort. Et puis bon, la vie n'était pas drôle sans imprévus. Et ça m'a appris très tôt qu'il valait mieux que ce soit moi, âgée de six ans, qui fasse cuire la viande à moins que je voulais que la maison brûle parce qu'il l'avait oubliée.

J'ai commencé la danse à l'âge de six ans. Ce n'était pas forcément ma passion première mais c'était un moyen pour moi de m'exprimer. En fait, je n'étais pas vraiment une enfant très expressive. Il me fallait une piste de danse pour cela. Ou alors des pinceaux ou des crayons. Le dessins, j'aimais bien, et l'art, de manière générale. J'en avais besoin pour exister, quelque part.

L'absence de ma mère s'est surtout faite ressentir au début et pendant l'adolescence. J'avais beaucoup de questions et lorsque je les posais sans honte à mon père, je le vois encore devenir pivoine, marmonner et l'esquiver, tout en bafouillant qu'il avait du travail et qu'il devait y aller.

Mais bon, dans l'ensemble, rien de très particulier à signaler. Collège comme lycée, j'étais plutôt transparente. La fille dont on connaissait le nom car il n'était pas trop banale. Celle qui n'était pas un laideron mais peut-être pas non plus d'une beauté à la hauteur de son prénom. A vrai dire, je ne m'en souciais guère. Je ne m'intéressais pas des masses aux garçons et autres histoires de cœur comme pouvaient le faire mes amies. Oh, je n'étais pas pour autant une sainte nitouche. C'est juste que j'avais d'autres priorités dans la vie. Pour le moment, du moins.

Et puis j'en ai eu marre. J'avais besoin que les choses bougent. Surtout à la fin du lycée.

J'entrais à l'université, en art. J'avais pris un petit appartement en ville avec l'autorisation de mon père. Il avait préféré que j'ai un toit près de l'université plutôt que de faire une soixantaine de kilomètres tous les jours aller-retour. Seulement, moi, j'avais décidé de me débrouiller pour payer mon loyer et j'avais donc trouvé un petit job de serveuse. Il pouvait sembler suffisant pour le loyer, mais il ne me restait pas grand chose pour les autres dépenses. Parce que oui, lorsqu'on est en art, il y a du matériel à acheter et d'autres frais qui viennent s'ajouter.

Il faut savoir qu'à dix-huit ans, je commençais à m'intéresser aux garçons. Oh, je ne suis pas allé au point de songer à la prostitution, mais j'ai remarqué que certains regards s'arrêtaient sur mes jambes, sur mes fesses, sur mon décolleté... Bref, ça va vous sembler idiot, mais je me suis rendu compte que je devenais une femme. Et j'imagine que vous savez quel pouvoir peut avoir une femme lorsqu'elle le veut. En fait, en me baladant dans White Oak Station, j'avais découvert un établissement qui cherchait une danseuse, plus ou moins de charme... J'ai fini par signer, en cachette de mon père et de tout le monde, en fait. Non pas que j'avais vraiment honte ou peur d'être jugée... Bon, il y avait peut-être un peu de ça. Mais je savais que mon père aurait peur pour moi ou encore qu'il voudrait me donner de l'argent. Il ne comprendrait pas. Mes amies non plus, d'ailleurs. Elle me regarderait comme si c'était dégradant ou que sais-je encore.

Cela fait donc presque deux ans que je fais ça, en plus de mes différents boulots de serveuse et de mes études.

Seulement, depuis environ huit mois, mon petit secret bien caché est en passe de ne plus en être un. Le coupable ? Nolan Harkness. Je me souviens très bien de lui. Il a un an de plus que moi, était en année supérieur au lycée. Il faisait entendre parler de lui grâce à ses nombreuses conquêtes et sa popularité n'était jamais contestée. Il ne m'a parlé qu'une seule fois à cette époque. Un simple bonjour. Je n'avais pas compris, d'ailleurs, pourquoi il m'avait dit bonjour à moi. Toujours est-il qu'il y a huit mois, je l'ai retrouvé quand je suis sortie de scène, en petite tenue. « Très joli spectacle, Venus. Ah, pardon, c'est Operetta, ici. » Operetta, mon nom de scène. Je suis souvent maquillée ou derrière un voile, de façon à ce que l'on ne m'identifie pas. Ce n'est pas forcément moi qui l'ai voulu, mais j'imagine que ça plait. Depuis quelques temps, j'accompagnais ma danse de chant. Je ne suis pas forcément chanteuse, mais je ne me débrouille pas trop mal, apparemment. Bref. Ce type est revenu plusieurs fois, me fixant avec un sourire qui me laissait des frissons. Il avait bien saisi que je ne voulais pas que mon "travail" se sache.

C'est comme ça que le petit manège a commencé. Je lui rendais des services pour commencer. Pas forcément des choses trop pénibles. Et puis ça a pris une toute autre envergure lorsqu'un jour, j'ai reçu une robe chez moi. « Tu mets ça et tu m'accompagne à la soirée de X jeudi. »

Je dois admettre que contre ma volonté, ce petit chantage ne me déplaisait pas totalement. Si à l'université et devant mon père je restais la gentille et blanche Venus, avec Nolan, je "tournais mal", comme aurait pu dire mon père. J'étais devenu l'instrument de ce type. Dans tous les sens du terme. Je pouvais aussi bien lui servir de copilote dans les soirées que de camarade d'université, si par hasard nous nous croisions. J'ai même fini par couché avec lui.

C'est peut-être fou, mais cette contrainte n'en est peut-être plus totalement une aujourd'hui, même s'il me rappelle toujours qu'il peut dévoiler à tout le monde mon "secret" si je ne fais pas ce que je lui demande. Mais parfois, j'ai juste envie de lui dire « mais vas-y, dis tout. Quoique là, tout de suite, j'ai plutôt envie que tu m'embrasse. »

Oui, c'est ça. Je dois être folle.