Huit heure du matin: je me réveille en sursaut et en sueur. Encore ces foutus cauchemars qui me hantent... ça m'est difficile de trouver le sommeil et la paix depuis la mort de Noah, je ne fais jamais de nuit complète, sans coupure. Je suis alors complètement crevé à longueur de journée, dans un état d'hébétude constant. Je me tourne vers la table de nuit encore endormie et, miracle, posé dans le cendrier se trouve un pétard. Je le prends, l'allume et le fume lentement. C'est bon, ça m'apaise, je suis bien. Je ne pense plus juste au fait que Noah n'est pas tout près de moi dans le lit, que voilà encore un matin où je ne me réveille pas avec lui. Tout en fumant ce joint j'allume, grâce à la télécommande ma chaine-hifi et c'est parti pour un album des Doors. ça me rappelle encore une fois Noah, mais soyons honnêtes TOUT me renvoi à son souvenir. Il y a même certaines chansons, liées à des souvenirs intimes, que je ne peux alors plus écouter. C'est bien trop douloureux. Espérons qu'avec le temps ça revienne, en attendant les Doors c'est parfait pour le réveil. Sachant que je n'arriverais pas à me rendormir et même si les cauchemars sont mieux que la réalité je sors de mon lit aux alentours de neuf heures. Je file direct à la douche car je sais que c'est la seule chose qui peut finir de me réveiller. Et après une vingtaine de minutes sous l'eau bouillante je suis dans l'état que j'attendais: prête pour la journée, je me sens toute fraîche. Je sors, nue, de la salle de bain et me retrouve dans ma chambre. Je branche mon ipod à ma chaîne-hifi et le mets en aléatoire de façon à ne pas avoir à choisir une chanson, la musique commence. Je m'assieds ensuite sur mon lit et roule un nouveau joint. Je l'allume et me dirige vers mon armoire, attrape des fringues sans trop réfléchir: un collant en laine noir, un débardeur tout simple gris clair rentré dans une jupe noire et un gros pull rouge bordeaux. En ce moment je n'ai pas tellement le goût de prendre soin de moi, je dois l'avouer je ne fais aucun effort particulier. Et puis à quoi bon, Noah n'est pas là pour me contempler. Je jette les vêtements que je viens de prendre sur le lit et m'y allonge le temps de finir ce joint. Je me perds dans la musique et dans la fumée et c'est bon. Le pétard étant finit, je m'habille en prenant mon temps, enfile mes kickers et attrape une clémentine avant de sortir de la maison. Où je vais? Je ne sais pas trop, j'ai besoin d'oublier tout ce qui m'entoure. J'avais entendu parler d'un bar sympa: the eagle and child et je crois qu'un verre m'aiderait. Je mets peu de temps à arriver en centre-ville et fais donc vite mon entrée dans le bar. À première vue je l'aime bien, je sens que ça pourrait bien devenir mon Qg. En effet, je m'y sens tout de suite à mon aise. Je me dirige vers le bar et m'installe au comptoir. Quand le barman me demande ce que je veux je répond d'une voix fatiguée: "J'vais prendre un irish cofee." Je sais l'heure est plutôt matinale pour de l'alcool mais j'en ai grand besoin. Le barman ne tarde pas à m'apporter ma commande et j'entame mon premier verre de la journée, le regard dans le vide et sans aucun espoir d'amélioration de mon état dépressif.

Je me sens dans un état vaporeux, je suis bel et bien dans ce bar mais je suis surtout complètement ailleurs. Je ne capte rien de ce qu'il se passe autour de moi, je ne fais attention à rien. Sauf peut-être au verre qui se trouve devant moi, plus précisément ce qu'il contient. Ce délicieux mélange... un de mes remèdes à cette foutue merde ambiante. Je bois lentement ce breuvage et je sens la chaleur de l'alcool descendre dans ma gorge. J'ai toujours adoré cette sensation, c'est bon. Plus je bois et plus je tombe dans l'oubli, mes pensées se mêlent et s'entremêlent, c'est sacrément le bordel dans ma tête. Je ne comprends pas ce qui m'entoure mais encore moins ce qui se passe dans ma tête... Des questions remontent à la surface mais je n'arrive pas à les percevoir clairement, tout s'embrouille. C'est tellement le foutoir que j'entends un bourdonnement s’amplifier, ça me donne mal à la tête. J'essaye de reprendre un peu mes esprits, en vain. Je prends mon verre et le bois d'une traite, espérant que ça rende les choses claires. C'est à ce moment que je lève les yeux et pose mon regard sur lui... Belle gueule mais son visage dévoile sa fatigue, je dois avoir à peu près la même tête que lui là tout de suite. Il s'était approché de moi et maintenant il est là, me tendant la main pour m’emmener ailleurs. C'est un parfait étranger mais je ne sais pas, quelque chose me pousse à le suivre. Je sens au plus profond de moi que je peux lui faire confiance et qu'il est là pour me sauver. Le calme a pris le dessus sur la tempête à l'intérieur de ma tête, je ne pense plus à rien. J'ai juste envie de me casser de ce bar. Je réponds, tout en continuant de le regarder, d'une voix fatiguée: «Allons-y, j'ai vraiment besoin de sortir.» J'attrape sa main, me lève avec difficulté et nous voilà en marche vers la sortie.