Soirée p'tit lait et p'tit biscuit
Orchid & Jake

Je sortais tout juste de mes toilettes quand je reçu un texto d'Orchid. Il avait le chique pour m'envoyer un sms dans des moments où il ne faut pas, au bain, aux chiottes, plein de truc comme ça. J'crois qu'il a un radar exprès pour ça, et dans des moments pareils, il se dit : Tiens, c’est le moment d'le faire chier!

Je m'en allai me laver les mains et lui répondis positivement. Je disais jamais non à une soirée avec lui et chez lui, même si on se retrouvait la plupart du temps la tête à l'envers ou à l'endroit à force de l'avoir à l'envers. Je filais à la douche pour me préparer et me faire beau, on sait jamais si je rencontrais un beau gosse dans la rue sur le chemin. On peut toujours rêver. Ho laissez moi rêver oui, c'est beau les rêves non?

Bref, j'étais fin prêt pour drag.. pour rejoindre Orchid chez lui. Je récupérais un pack de bière et deux ou trois paquets de chips et c'était bon. Je regardais tout autour de moi dans la rue, rapport à mon rêve hein, m'voyez. Mais non rien, mon gaydar à beau gosse ne s'était pas mit en route, dommage. Je sonnais à la porte d'Orchid et rentrais direct, moi impoli ? Non c'est pas vrai, de toute façon, il pouvait très bien faire la même chose chez moi, même si il y avait plus de risque. Paix à ses pauvres petits n'yeux, si un jour il décidait de faire ça. On sait jamais sur quoi il pouvait tomber en faisant ça. Moi ? Bien sur, je suis sage, pure, innocent, puceau, coincé, évidemment enfin.

J'avançais d'un pas et refermais la porte avec mon pied en criant pour l'emmerder :

« Oucékilé le p'tit tatoué ? »

Je posais les bières sur la table et les chips à coté, j'avais hâte de pouvoir l'emmerder tient, ça me manquai en fait, de l’emmerder. Ou alors c’est lui qui me manquait tout court. Quoi ? J'ai rien dis en fait, pfeuh, il me manquait pas, même pas vrai. Enfin.. un peu quand même en fait. Mais on se chut hein. J'enlevais mes chaussures en riant :

« Hmmm j'embaume ta baraque avec un joli parfum de raclette fait maison. »

Ce qui n'était pas vrai, je sortais tout juste de la douche en vérité, j'avais même encore les cheveux trempés et ça sentait le shampoing et le parfum à dix mille kilomètres à la ronde. J'avais juste envie de le faire chier, mais depuis le temps, il avait l'habitude maintenant. Il me connaissait, pour l'emmerder un peu plus, j'attrapais une bande dessinée qui traînait là :

« Tient t'as laissé ton jumeaux sur la table, petit polisson. »

J'adorais le taquiner à propos de ses tatouage, pas que j'aimais pas ça, au contraire, ça lui va vachement bien, c'était juste pour l'emmerder, et j'aimais le comparé à une BD à cause de ça. En vérité j'adore les tatouages, j'aimerais bien m'en faire, mais j'ai pas les couilles, j'crois que je suis trop douillet. Et puis il se passe rien dans ma vie, rien de marquant et d'important alors, j'vois pas ce que je pourrais me faire tatouer sur le corps. Le seul dessin que j'ai eu c'était sur la joue, une.. enfin un.. voilà quoi, dessiné au marqueur sur la joue quand j'étais bourré. Évidement, ce petit salopard ne m'avait pas prévenu et m'avait laissé sortir dans le rue comme ça. J'me demandais pourquoi les gens me regardait bizarrement, j'aurais presque pu aller faire les courses comme ça si j'avais pas eu l'intelligence de rentrer chez moi avant.

J'me laissais tomber en arrière et m'affalais dans le canapé en attendant le maître des lieux.

Soirée p'tit lait et p'tit biscuit
Orchid & Jake

Ce soir Rowan n'était pas là, elle m'avait prévenu. Soi disant un devoir sur lequel elle devait bosser avec une amie, elle avait dit de ne pas l'attendre pour manger car elle rentrerait probablement tard. On avait pris cette habitude depuis le début de la collocation, manger ensemble presque tous les soirs. C'était notre petit moment à tous les deux, la plupart du temps posés devant la télévision. On avait tous les deux une vie très chargée et cela nous permettait de souffler un peu.
J'avais donc dit à Jake de passer à l'appart ce soir, à la dernière minute comme d'habitude, mais il n'avait sûrement rien de plus intéressant à faire de toute manière, à part se tourner le doigt dans le cul peut-être. Cette pauvre petite tarlouze. Ah, ce que je l'aimais.

Après le boulot, je passa acheter une bouteille de tequila, des citrons verts et deux pizzas surgelées à la petite supérette du coin de la rue. A la bonne franquette, comme on dit.
En rentrant je fila directement sous la douche, prenant soin de jeter mes vêtements au milieu du couloir. Après tout, mademoiselle Rowan n'était pas là pour m'engueuler ce soir !
L'eau chaude me fit le plus grand bien, mais je ne put profiter bien longtemps de cette douche. Elle dut s'écourter à cause du clanpin qui me servait de meilleur ami. Déjà là celui là? Il a le feu au cul ou quoi ?

« Oucékilé le p'tit tatoué ? » Je grommela encore sous l'eau et me rinça en vitesse.
« Hmmm j'embaume ta baraque avec un joli parfum de raclette fait maison. » Mais qu'est ce qu'il raconte encore?

J'enfila un caleçon propre et sortit de la salle de bain en sautant à cloche pied pour mettre ma deuxième chaussette, heurtant un mur au passage. « Aïe putain, connard de mur ! Il m'a déglingué le front ! »
« Tient t'as laissé ton jumeaux sur la table, petit polisson. » Je fronça les sourcils et arriva finalement au salon, en caleçon, avec qu'une seule chaussette et une jolie égratignure sur le front qui commençait à saigner. Belle dégaine. « On t'as enfoncé un piment dans les fesses ou comment ça se passe ?  »

Soirée p'tit lait et p'tit biscuit
Orchid & Jake

Je l'entendais sortir de sa salle de bain, j'me marrais en l'entendant se cogner en insultant le mur, je terminais par éclater de rire en le vannant:

« Putain on dirait un mammouth qui traverse ton couloir, niveau délicatesse on repassera. »

Pauvre mur, il lui à rien fais après tout. J'me levais du canapé, choppais un paquet de chips et l'éclata sur la table pour faire un tas de chips. Je prenais une chips en croquant dedans et lui raconta:

« C'est les chips 70% d'air et 30% de chips, tu connais? »

J'me tournais vers l'entrée du salon, il arrivait tout juste, en caleçon et en chaussettes, enfin, qu'une seul chaussette et le front rouge. J'me marrais en le regardant en postillonnant des miettes de chips à force de rire. Il me demanda si on m'avait enfoncé un piment dans les fesses, pour l’emmerder je lui répondais:

« Non par contre j'me suis enfoncé une banane ce matin, et j'ai adoré. »

J'me marrais en le regardant sans gène en mangeant des chips et en ouvrant le pack de bières. Je posais deux bières sur la table en me tournant vers lui, je le regardais de haut en bas:

« J'ai pas envie de perdre la vue alors si tu pouvais aller t'habiller, ça serait fun en fait. »

C'était surtout en réalité parce que j'le trouvais beau que je voulais qu'il se rhabille, c'était soit ça, soit je lui saute dessus. A ses risques et périls, même si j'me retiendrais un maximum quand même hein. J'voudrais pas passer pour le mec en manque, même si en fait c'était vrai.

Je prenais une poignée de chips et m'affalais dans le canapé en grignotant les chips, je le regardais:

« Aller bouge ton boule et viens boire un coup. »

J'attrapais la zappeuse et allumais la télé, j’espérais juste ne pas tomber sur un vieux porno, que Orchid aurait put mettre en dernier programme. J'me marrais en croquant mes chips.

Soirée p'tit lait et p'tit biscuit
Orchid & Jake

« Putain on dirait un mammouth qui traverse ton couloir, niveau délicatesse on repassera. » Je plissa les yeux sans rien dire et toucha délicatement mon front du bout des doigts. C’était un peu douloureux. « J’ai pas envie de perdre la vue alors si tu pouvais aller t’habiller, ça serait fun en fait. » Je lui tira la langue en guise de réponse et fila dans ma chambre chercher un bas de jogging.
« Aller bouge ton boule et viens boire un coup. » « Ouais j’arrive ! » Après avoir traversé le couloir, sans me payer le mur cette fois, je m’affala sur le canapé à ses côtés. Il avait allumé la télé, mais le programme semblant plutôt pourri à cette heure-ci. « Passe moi un peu de chips, radin ! » Je fit la moue avec ma lèvre du bas de manière à avoir une tête de petit chaton triste, un truc que je faisais tout le temps pour paraître irrésistible et à croquer. Je me décapsula la bière que Jake avait sorti pour moi et en bût une longue gorgée. La bière fraîche, il n’y avait rien de plus agréable.

Je posa mes pieds sur la table basse et regarda mon meilleur ami prendre une poignée de chips. Ses doigts étaient longs et fins, contrairement aux miens qui étaient tout petits. J’avais toujours été « passionné » par les mains, je trouvais ça fascinant. Il m’arrivait parfois de repenser aux mains de Jake sur mon corps. Je les revoyait parcourir ma peau,  mes os saillants du bassin, mes côtés légèrement apparantes.. Je me souviens toutes les sensations que j’avais ressenties cette nuit-là. Il avait été d’une délicatesse sans faille. Nous étions ivres mais mon esprit n’était pas assez embrumé ce soir-là pour ne pas me souvenir de ce qui s’était passé. C’était absurde, j’avais toujours aimé les filles, mais cette expérience avait été indescriptiblement passionante.
Je dormais souvent dans le même lit que Jake mais ça n’avait dérapé qu’une seule fois. Peut être une seule fois de trop, et cela me troublait depuis maintenant un petit moment. C’était il y a environ un mois. Et depuis, nous n’avions pas abordé le sujet. Je savais qu’il y repensait sans arrêt, comme moi. Ce mec là, je pouvais lire dans ses pensées comme dans un livre ouvert. Il était comme ma moitié. Je savais que nous y pensions tous les deux, mais qu’aucun de nous n’osait en parler. Pourtant rien n’avait changé entre nous. Nous étions toujours autant à l’aise. Mais pourquoi est-ce que cela me tracaissait autant ? Pourquoi est-ce que j’y repensais le soir avant de me coucher et le matin en me levant ?
Je secoua la tête pour me sortir de mes pensées, prenant conscience que je ne disais pas un mot depuis au moins cinq minutes. « Sinon le boulot, comment ça se passe ? », demandais-je en souriant.
Jake était photographe. Il exercait un métier d’art, tout comme moi. Encore un petit signe qui montrait qu’on se complétait lui et moi. J’avais toujours admiré son travail, ce type là arrivait à traduire énormément d’émotions en une seule photo et c’était un vrai bonheur pour les yeux. J’avais toujours secrètement espéré qu’il me demande un jour de poser pour lui, mais je n’avais jamais osé lui demander pour passer derrière son objectif. Lui ne m’avait jamais demandé de le tatouer non plus. J’aimerai un jour pouvoir marquer sa peau pour toujours. L’éternité. Une petite partie de moi sur sa peau. Encrée à jamais.