~ À QUOI RESSEMBLAIT TA VIE AU LYCÉE?
C'était pas les plus belles années, mais c'était pas les pires. C'était la galère, il fallait rendre des comptes, c'était chiant, mais ça allait... J'étais pas seule... Et ça, c'est important... J'avais besoin de personne, mais ne pas être seule, ça a compté, un peu...

   ~ ES-TU HEUREUX PRÉSENTEMENT?
On peut pas dire que je sois malheureuse. Je m'éclate, j'prends mon pied, que demander de plus? J'ai besoin de rien de plus, j'suis en vie, j'ai Gabriel, ma came... Ouais, c'est pas le bonheur au sens commun, mais moi, ça me plait, c'est l'important non? D'être content de ce qu'on a.

   ~ OÙ TE VOIS-TU DANS DIX ANS?
Toujours libre. Je ne veux pas de quelqu'un qui sera dans mes pattes et m'emmerdera, pas de morveux braillards. Rien... Moi, ma liberté et rien d'autre... Peut être dans un autre bled...Peut être loin, très loin même... Mais seule... Surement... Moi, myself and I quoi.

Quand on est une petite fille, on rêve. On rêve du prince charmant, on rêve de devenir chanteuse ou vétérinaire, on joue à la mariée ou à la marelle, tentant d'atteindre le paradis... Daisy, elle, elle rêvait de devenir océanographe, de visiter le monde entier et elle s'est malheureusement retrouvée en enfer.

Un enfer qui a duré deux ans, deux ans à se demander quand, pourquoi, qu'est ce qu'elle avait fait de mal? Deux ans de peur, de souffrance, de solitude, d'injustice. Deux ans à maudire cet homme qui aurait du être celui qui la protégeait de tout, mais qui était son Satan personnel, un être dégoûtant, un porc sans pitié... Mais surtout... Deux longues années à taire le ravage de son corps et de son âme chaque fois qu'il venait dans sa chambre la nuit...

Et puis, la délivrance, sa mère la força à parler, à avouer. Ne plus se taire... Elle fut enfin libérée de son bourreau, mais pas sortie de l'enfer pour autant... et s'il y a bien une chose qu'elle ne fera jamais, c'est reprocher à sa mère son implication et son désir de l'aider, malheureusement, il n'y avait plus rien à reconstruire... Ce n'est pas faute d'avoir essayé... Elle en a vu des médecins, des psys... Des gens a qui elle a du raconter, encore et encore... Trop.

Elle put enfin laisser tout ce merdier derrière elle après le procès, quand sa mère l'emmena loin de Vancouver. Un nouvel endroit, une nouvelle vie... Une renaissance? Loin de là.

Comment renaître quand on ne sait plus ce qu'il y avait avant? quand on ne sait pas ce qu'il y aura après?

Elle essaya de survivre. C'était pas simple... Les événements faisaient qu'elle ne supportaient plus les hommes... Même si cela faisait deux ans, elle ne supportait toujours pas le contact physique avec l'un d'eux... et pourtant, elle demanda expressément à sa mère que son nouveau psy soit un homme. Pourquoi? Pour dépasser son traumatisme. C'était tordu comme façon de penser peut être, mais elle ne supportait pas cette peur qui lui serrait l'estomac à chaque fois qu'elle croisait un garçon, elle ne voulait pas voler la vie de sa mère en la privant de toute possibilité de romance parce qu'elle ne pourrait pas supporter un homme sous son toit... Et contre toute attente, Daisy réussit a aller un peu de l'avant. Oh, elle ne sautait pas au cou de tout le monde, elle ne le faisait plus depuis des années, mais elle n'angoissait plus autant, arrivait à tenir une journée de cours complète sans aller vomir ses tripes tellement elle stressait... C'était un tout petit mieux, mais sur l'ensemble, bien peu de choses...

Arriva l'entrée au lycée... Loin de l'enchanter... Pourtant, le jour de la rentrée, elle rencontra son ange salvateur, même si elle était loin de s'en douter. Une clope. Voila comment tout commença... Et à moitié consumé, ils échangèrent leurs prénoms. Gabriel... Elle était perdue, mais elle n'était plus seule... et ne le serait plus jamais.

Ce type... Il était aussi paumé qu'elle... Mais c'était son double, son égal, son âme soeur, son héroïne, son arsenic... Celui qui pourrait la faire vivre comme la faire mourir. C'était simplement... indescriptible entre eux... Mais elle ne voulait pas comprendre. Tout ce qu'elle savait, c'était que dans ses bras, elle se sentait en sécurité, alors que c'était un mec, une bite... Et pourtant, dieu sait qu'elle aimait être avec lui. C'était le seul. L'unique. D'ailleurs, sa vie sentimentale était inexistante, mais elle a eut quelques petites amies. Pas pour le sexe, non, pour la tendresse, pour sentir qu'on pouvait l'aimer... Mais elle finissait par les dégager méchamment, ne supportant pas le manque de liberté que ça impliquait.

Ils avaient presque 18 ans, ils n'étaient plus des enfants, pas encore des adultes. Ce soir là, serrés l'un contre l'autre, elle lui murmura qu'elle avait envie de lui. Il ne l'aurait pas forcée, jamais, il avait bien des défauts, mais pas celui là. Ce moment qu'ils partagèrent se grava au plus profond de l'âme de la jeune femme. Elle lui appartenait, en ce jour et à jamais. Mais elle ne put lui dire... Malgré qu'il lui dise, les yeux plantés dans les siens, qu'il l'aimait, qu'il ferait tout pour elle et qu'il n'avait besoin de personne d'autre qu'elle... Elle le regarda tristement et effleura doucement sa joue. Elle ne pouvait pas lui répondre. Par peur, par fierté, parce que c'était lui? Un peu de tout ça surement...

Malgré ça, il ne l'a pas lâché... et ne le fera jamais. Elle le sait au plus profond de son âme que c'est lui, The One... Mais elle savait également qu'on ne pouvait pas demander à deux pièces de puzzle identiques de s’emboîter. C'était leur tragédie, mais au fond... La conviction qu'ils seraient toujours deux, c'était suffisant.

Enfin... ça ne l'a pas empêché de déconner... Et joliment en plus... Drogue, alcool... un peu moins de baise que son compère... Mais pas d'amour. Jamais d'amour. Plusieurs grosses frayeurs concernant une possible grossesse, mais plus de peur que de mal, elle a toujours eu une chance insolente...

Elle a quitté le domicile familial dès qu'elle le put, sa mère n'appréciant pas du tout sa façon de vivre... Elle ne voulait pas faire du mal à sa maman, alors elle préférait lui cacher comme elle pouvait... Sa mère méritait d'être heureuse, et ce n'était pas de sa faute si sa fille n'avait jamais su vraiment se remettre... Oh, elle clame à tout qui veut bien l'entendre qu'elle est heureuse comme ça, que sa vie ne pourra pas être plus parfaite. Elle le pense, vraiment... Sauf quand elle y réfléchit. Et quand elle pense qu'elle est le mauvais génie de son ange... Il a du potentiel Gabriel... Il pourrait s'en sortir lui... Mais elle ne pourrait pas vivre sans lui... Elle ne pourrait pas le laisser partir, même pour le bonheur du jeune homme... Ils s'appartiennent, même s'ils ne le disent pas, et ça... Elle ne veut surtout pas que ça change. Il est son pilier et son repère... Elle n'en a pas beaucoup des repères, mais elle fait avec et elle mène sa barque comme elle l'entend. Elle se fout de ce que l'on peut dire d'elle, de lui, d'eux...
Le seul qui peut la mettre à terre, c'est Lui.