~ À QUOI RESSEMBLAIT TA VIE AU LYCÉE?
« regarde l’intello bourgeoise, elle a encore rendu son devoir avant tout le monde. » ils te regardent, ils rient. ils rient sans cesse quand ils te regardent. tu es cette fille à lunettes assise tout devant. ta table collée à celle du prof. cette fille toujours calme, qu'on n'entend jamais, qui travaille dur. eux, ils sont au fond de la classe. ils n'en foutent pas une. tu ne les regardes même pas. au fond, tu ne les hais même pas. non. au fond, tu les envies. ils font ce qu'ils veulent. s'ils ont des mauvaises notes, c'est pas grave. s'ils n'ont pas leur diplôme, c'est pas grave. toi, on t'oblige à travailler. on t'oblige à avoir ton diplôme. c'est vital. sinon, on te mettra à la rue. tu n'auras aucun avenir. toi, tu es obligée d'être celle qui n'a pas d'amis, qui vient au lycée pour travailler. rien d'autre. juste travailler. à la maison, ça recommence, tu travailles, tu travailles, encore et encore.

   ~ ES-TU HEUREUX PRÉSENTEMENT?
qu'est-ce que le bonheur ? le bonheur est relatif. tout est relatif. « je suis heureux. » celui qui dit ça l'est-il réellement ? est-ce que parce-qu'il sourit, on peut dire qu'il est heureux ? ton sourire est encré sur ton visage. tout le temps. tous les jours. peut-on donc dire que tu es heureuse ? sais-tu seulement si tu l'es ? chacun se fait sa propre définition du mot bonheur. as-tu une définition ? tu vis. c'est tout. puisqu'il faut vivre, pourquoi ne pas le faire bien ? tu as une vie, tu es en bonne santé, tu étudies. tu as réussi à échapper aux griffes de tes « parents ». tu as des gens qui t'entourent. ta réputation a disparu. si c'est ça être heureux. alors oui, tu l'es.

   ~ OÙ TE VOIS-TU DANS DIX ANS?
avant, tu te voyais déjà grande avocate. avocate ? pourquoi ? parce qu'ils te le mettaient dans la tête. ils te retournaient tellement le cerveau que ce dernier pensait tout le contraire de ce que tu voulais. avocate. quelle blague. toi, ce que tu veux, c'est devenir une grande journaliste. une journaliste réputée dans le monde entier. travailler avec des personnalités. faire des articles qui plaisent. c'est ça, ce que tu veux. pour le reste, tu préfères laisser le destin s'en charger. s'il y en a un.

PRÉNOM ET/OU PSEUDO: alicia. ÂGE: j'ai oublié. PAYS: france. PRÉSENCE: 5/7. COMMENT AVEZ-VOUS CONNU LE FORUM? en me promenant.  PERSONNAGE INVENTÉ OU SCÉNARIO? tout droit sorti de mon petit cerveau. AUTRE CHOSE À AJOUTER?  

13 ans. « ouais Rose, je sais, il faut que la vaisselle soit faite quand tu reviendras. » ta mère ne répond même pas. elle en a marre de la façon dont tu lui parles. le ton que tu utilises. les regards que tu lui lances. elle n'en peut plus. ouais Rose, c'est ta mère. tu ne l'as jamais appelée maman. tu préfères dire Rose. ça donne l'impression qu'elle n'est pas ta mère. « tu parles pas comme ça à ta mère. et tu l'appelles pas par son prénom. je te l'ai déjà dit mille fois, tu comprends quand je te parle ? » non. tu ne comprends pas. tu ne comprends rien. tu bouches presque tes oreilles pour ne pas l'entendre. lui. ce n'est pas ton père. elle l'a rencontré tu ne sais où. tu ne veux pas savoir, en fait. ce n'est pas ton père et il se permet de te donner des ordres. sans cesse. tu ne l'écoutes même pas. tu fais comme s'il n'existait pas. pourtant il continue. encore. il hurle, parfois. ça ne te fait même pas peur. tu t'en fous. les bonnes manières, à quoi ça sert, tout ça ? pourquoi tu dois toujours bien te tenir ? être assise droite à table ? parler correctement ? il se prend pour qui, lui ?

15 ans. un cauchemar. voilà ce que c'est. on ne peut pas trouver d'autre mot. il n'y a aucun autre mot qui convient. tous les soirs enfermée dans ta chambre, tu te demandes comment tu en est arrivée là. c'est de sa faute. c'est à cause de Rose. tu essaies de lui dire, tous les jours, tu lui envoies des signaux de détresse qu'elle reçoit mais auxquels elle ne répond pas. tu as perdu l'usage de la parole. tu ne peux plus, ne veux plus parler. tu restes muette. tout le temps. il t'a changée. du tout au tout. ton caractère fort s'est évaporé. tu ne dis plus rien. tu te tais. tu subis. comment a-t-il fait pour faire de toi une personne différente ? il a fait naître en toi la rage. tu le hais. tu les hais tous. et quand ta mère s'en va. le cauchemar continue. « tu as intérêt de réviser pour ton devoir de maths. » « pourquoi ta copine Chloé a appelé ici ? tu lui as pas dit que tu n'as pas le droit de sortir ? » « c'est quoi ce bordel dans ta chambre, tu vas me ranger ça maintenant avant que je m'énerve. » tu obéis. sans rien dire. même pas un mot, ni un regard. tu te sens séquestrée. emprisonnée. mais tu obéis. tu n'as plus la force de te battre, de contester. alors tu fais. c'est tout. si tu as le malheur de répliquer, il lève la main sur toi. comme il l'a fait l'année dernière, à plusieurs reprises. depuis, tu as compris. tu te tais. tu subis.  

18 ans. « je me casse. vous me reverrez pas. plus jamais ! » tu claques la porte. c'est la fin. la fin d'une vie. la fin du cauchemar. tu marches, tu pleures. pas de tristesse, non. tu pleures de soulagement. toutes les larmes que tu n'as pas versées pendant des années, elles sont là. elles coulent sur tes joues comme si elles étaient emprisonnées pendant toutes ces années, elles aussi. tu marches, tu cours, tu évacues. ça fait du bien. tu es libre. libre comme l'air. tu pars de Paris, pour toujours. tu vas n'importe où, tu trouves un job, un truc claqué mais qui te permet de vivre. tu t'en fous. tu vis dans une chambre d'hôtel, dans un village pourri près de Marseille. tu t'en fous. tu es bien, sans eux. sans lui. tu es libre. libre comme l'air.

20 ans. « pourquoi t'es venue à white oak station ? » il pose trop de questions. tout le temps. il t'aime bien, on dirait. tu n'avais pas d'autre choix que de trouver un colocataire. tu n'allais pas vivre toute ta vie dans un hôtel. tu as vu son annonce. tu as foncé direct. tu vis chez un inconnu, depuis un mois. un inconnu gentil, mais un inconnu quand même. « laisse moi, j'ai pas envie de parler. » à chaque fois tu lui dis la même chose. et à chaque fois il revient. tu ignores pourquoi. mais il revient. toujours. sans cesse. tu ne réponds pas. jamais.

23 ans. « je peux dormir avec toi ? j'ai peur de l'orage. » tu entres dans son lit. sous sa couette. tu te colles à lui et tout va bien. tu n'as plus peur de rien. tu l'aimes bien, même beaucoup. c'est ton ami. il t'aide financièrement. il t'aide moralement. il t'aime. il t'apporte de l'attention. comme un ami. ne dit-on pas que de l'amitié à l'amour il n'y a qu'un pas ? il en crève d'envie, de le franchir, ce pas. ça se voit. tu le sais. toi, tu ne dirais pas non. mais tu ne sais pas. tu ne sais rien. comment ça marche avec les garçons ? aucune idée. tu n'as pas d'expérience. ça ne te fait pas peur. mais tu hésites. pourtant tu l'aimes. dieu sait à quel point tu l'aimes.