07 JANVIER 2008. Il t'en a fait baver lui, il t'a fait découvrir les merdes de la vie. T’étais fou de lui, mais il t'a zappé de A a Z, et ça t'as tué, ça t'as réduit a néant. Mais tout l'monde s'en foutait après tout, t’était quoi ? Le geek de service, le nerd du bahut, le paumé dont tout l'monde se fout parce qu'il n'est rien du tout. Ils te connaissaient pas ces cons, ils le paieraient.
Je me souviens de notre première fois. Enfin de notre rencontre, du premier regard que nous avions échangé. J’étais assit a la terrasse d'un café avec des potes. J’étais jeune, j’étais con, et j’étais encore plein d’illusions. Puis je l'ai vu traverser la route juste devant moi, avec sa casquette, son tank top et son short moulant trop sexy. Les lunettes de soleil sur le nez pour parfaire le tout. Je sentis en un instant mon cœur se serrer avant de faire une violente embardée me privant de souffle et de mot. La perfection résumée en un seul homme. Il enleva alors sa casquette, se dirigeant vers le restaurant, passant les mains dans ses cheveux sombres et mettant ses lunettes sur son crane, casquette a la main. Il se dirigeais vers notre restaurant, demandant une place. Comme par hasard, la seule table de libre se trouvait a coté de la mienne, mouahaha. Il était seul et n'avait l'air d'attendre personne. Je profitais du fait qu'il inspecte la carte des boissons pour le reluquer en silence. Il était un peu plus vieux que moi, 18 ans peut-être. A force de le regarder, d'admirer sa beauté sans faille ni défaut, j'en oubliais le reste, et mes potes, et le monde autour de moi, et la vie. C'est alors que mon cœur s’arrêta : il venait de se tourner vers moi, plongeant son regard de braise dans le mien. OH MON DIEU. Je rêve ou il me fait un sourire ? Il détourna enfin la tête mais il me faut encore quelques secondes pour recouvrer mes esprits. Au bout d'un instant je me décide enfin a bouger et a m'asseoir en face de lui. « T'attends quelqu'un ? » Il me jauge du regard avant de sourire. « Oui. » Merde. Bon, on fera avec. « Tant pis alors... » Il haussa les sourcils avec une moue hypocrite et un rictus figé. J'inspire une fois, deux fois, il fallait que je me ressaisisse.« Bon... euh... ça t'dirait qu'on s'voit un d'ces jours ? » Il me sourit encore une fois, dieu qu'il est beau. Mais la sentence tomba. « Non. » BIM dans ma gueule. Ça fit mal. Je déglutissais avec difficulté, j'avais l'habitude de me prendre des vents, mais celui-la me fit particulièrement mal. « Ça va Aurel ? » Mon bel inconnu se retourna vers un second canon qui venait d'arriver. « Oui t’inquiètes Casey. On va aller voir ailleurs, ce resto m'inspire plus finalement. » Mais que l connard j'vous jure. Il se leva ensuite et se cassa, me plantant la tout seul comme un con. Il allait m'le payer.
10 JUIN 2013. C'est c'jour la qu't'as décidé de tout envoyer bouler et d'prendre ta revanche. De plus laisser les choses t'atteindre aussi facilement. T'avais plus envie d'te faire marcher sur les pieds en disant merci, t'avais plus envie qu'on t'traite comme une sous-merde. Alors t'as changé, t'as tout fait pour devenir meilleur. Non, pas meilleur. Pour devenir parfait, et lui faire fermer sa grande gueule.
Je devais me dépêcher, j'avais mon shooting dans cinq minutes et je n’étais pas encore parti ! Mon shooting ? Ah oui, j'ai oublié de vous dire. J'ai lâché mes manettes pour devenir mannequin. Pourquoi un tel changement ? Pour le faire chier, tout simplement. Pour faire chier Aurel. Oui vous savez ce connard de première qui m'avait envoyé chier devant tout le monde alors que j'avais vraiment eu un coup de foudre pour lui. J'voulais me rendre désirable par rapport a lui, j'voulais qu'il regrette de m'avoir un jour dit que j’étais pas assez bien pour lui, que j’étais une chiure d'oiseau sur le pare-brise de sa Porsche. Et franchement j’étais fier du changement. Contrairement a avant, je me sentais beau, canon même. Puis j'avais l'impression d'exister, de ne plus être le meuble devant lequel on passe sans s'en rendre compte. Les gens commençaient a s’intéresser a moi, les mecs mais également les filles, ce qui m'amusait assez. J’étais presque heureux. Je dis "presque" parce que je n'ai toujours personne. Enfin... c'est pas comme si j'avais personne en vue. Y a bien quelqu'un oui. Mon meilleur ami, Cesare. Mais... bon c'est mort, il est a fond sur un mec marier, enfin j'comprends pas son trip, j'essaye de le raisonner mais y a rien a faire, il est accroc. Alors j'ai plus qu'a aller m'branler seul entre deux défilés. Fait chier quoi. Mais j'peux pas m’empêcher de le draguer, de l'chambrer, c'est comme ça qu'ça fonctionne entre nous. On se chambre sans arrêt. Mais ça n'ira jamais plus loin. Malheureusement pour moi.