~ À QUOI RESSEMBLAIT TA VIE AU LYCÉE?
Le lycée, c'était le bon temps. Tu n'avais pas de souci particulier, tu n'avais pas à te poser de question. Pourtant, tu es quand même heureux d'en être sorti. Tu n'as jamais aimé les cours, tu es un peu trop dans ton monde. Tu étais populaire auprès des filles, beaucoup voulaient sortir avec toi mais tu n'as jamais été trop attentif à ça. Pour toi les filles ne sont qu'un distraction. Tu ne sortais pas avec elle, non, tu ne faisais que les mettre dans ton lit de temps à autre. Tes parents voulaient te voir travailler, devenir un élève modèle. Ce n'est pas ce que tu as fait, mais étant assez intelligent, tu n'as pas eu besoin de faire grand chose pour avoir de bons résultats. Tu restais avec ta meilleure amie, vous étiez toujours ensemble, comme un couple, mais vous n'en étiez pas un.

   ~ ES-TU HEUREUX PRÉSENTEMENT?
Heureux ? C'est une bonne question. Non, pas vraiment. Cette liberté, tu l'as longtemps cherché et tu l'apprécies, tu en profites un max, tu sors souvent, avec ta meilleure amie, tu vis ta vie pleinement sans trop te poser de question, mais il te manque quelque chose. Tu lis beaucoup, tu visites d'autres mondes et tu ne constates que plus que ce monde-ci n'est qu'un tissu de mensonges, quelque chose qui te dégoûte. Tu ne vois plus que ta meilleure amie de ceux que tu connaissais autrefois, tu n'as plus de relation avec tes parents. Tu es riche, ils te payent tout, tu n'as pas besoin de travailler. Si tu as suivi des études, c'est seulement parce que tu le devais.

   ~ OÙ TE VOIS-TU DANS DIX ANS?
Tu ne cherches pas à savoir, tu préfères vivre comme ça, comme tu es maintenant, sans te poser trop de question sur l'avenir. Après tout, qui te dit que tu seras encore là dans dix ans ? Tu pourrais faire n'importe quoi, être n'importe où, avec n'importe qui. A quoi ça seert de regarder dix ans en avance ?

Votre vie de richesse semble parfaite, elle fait rêver ceux qui n'ont pas les moyens de se payer tout ce que vous avez. Pourtant derrière cette perfection non dissimulée, on voit tout de suite apparaître un vide, un manque bien plus grand parfois que tout l'or du monde. Tu appelles ça la malédiction du riche. Souvent, tu te retrouves seul. Tes parents ne sont jamais là et quand ils sont là, c'est pour te réprimander. Il n'y a pas vraiment d'amour entre tes parents et toi. Ton père, tu ne l'as vu que rarement, toujours à voyager. New York, Paris, Tokyo, Londres, il fait le tour du monde sans jamais te prendre avec lui, sans jamais un mot. Tu l'appelles, mais il ne répond pas, tu laisses des messages, mais il ne les écoute pas. Tu es invisible à ses yeux, tu n'es rien. Pour ta mère, c'est un peu différent. Elle ne s'occupe que de ce qu'on pourrait penser de vous. Elle est obsédée. Elle ne veut surtout pas qu'on ait une mauvaise image d'elle et de sa famille. Elle fait comme si tout était parfait, comme s'il n'y avait aucun problème, comme si vous étiez heureux. Elle non plus n'est pas souvent là. Tu ne sais pas trop ce qu'elle fait à vrai dire, mais tu ne la vois que rarement. 
Depuis que tu es petit, depuis que tu sais lire, tu passes tous tes moments seuls à lire. Tu as lu des milliers de livres, c'est ce qui t'aides à tenir, tu t'évades en lisant ce que tu aimerais vivre. Tu rêves d'un autre monde où les gens ne seraient pas pervertis par l'argent, où la vie serait agréable, où les gens ne seraient pas faux. Tu es intelligent, tu remarques vite que tout n'est que masque, que tout n'est que mensonge. Tu n'es pas idiot. Comme tu es souvent seul, tu lis énormément. Ton roman préféré, c'est Le Seigneur des Anneaux, de Tolkien, tout bêtement. Tu adores ce live, tu l'as lu des centaines de fois. Tu ne sais pas vraiment pourquoi, mais il te fait un effet différent de tous les livres que tu peux lire. Tu as une immense bibliothèque chez toi, que tu rempli de livre un peu plus à chaque fois. Tu es le seul à lire. Bien sûr, tu ne fais pas que ça, tu sors aussi beaucoup, avec ta meilleure amie Candide, qui porte le nom magnifique du personnage de Voltaire. Tu passes énormément de temps avec elle, ce qui déplaît à tes parents. Elle est spéciale Candide, et c'est ce que tu aimes. Tu n'aimes pas les gens communs, tellement surfaits. C'est avec elle que tu commences à boire régulièrement, avec elle que tu fais la fête. Tu y prends goût aux fêtes. Tu sors de plus en plus souvent et tu ramènes souvent une fille avec toi. Tu aimes les filles aussi, tu aimes leur compagnie, tu n'as pas peur de le montrer. Tu es riche, tu es beau, tu sais que tu plais, alors tu ne te prives pas. Tu ne touches pourtant pas à Candide, elle, tu ne veux pas la détruire, tu ne veux pas lui faire du mal.
Petit à petit, tu commences à t'éloigner de l'idéal de tes parents. Tu ne veux pas finir comme eux, tu ne veux pas leur ressembler. Ta mère ne remarque rien au début, elle ne te parle presque pas, elle t'ignore presque et ça te fait rire. Tu ne l'aimes pas. Tu n'aimes personne toi. L'amour n'existe pas, le désir seul est bien réel. Tu n'as pas froid au yeux, tu aimes les défis, tu adores ça. Tu n'as pas peur de les relever. Tu n'as même pas peur de mourir, parce que tu sais bien qu'au final, la mort serait peut-être plus intéressante que ta vie. Tu t'écartes donc de l'idéal de tes parents, tu fumes, tu bois à outrance, tu n'as peur de rien. Et commencent les tatouages. Tu adores ça, te faire tatouer. Une petite douleur qui te fait te sentir vivant. Chacun de tes tatouages a une signification et personne ne comprend, tu es le seul à savoir. Tu as des tas de tatouages. Ca fait craquer beaucoup de monde, mais ta mère déteste ça. Elle dit que ça fait mauvais genre, que tu as l'air d'un délinquant. Ca te fait bien rire. Elle a peur pour son image, pour ce que tu renvoies, et toi, tu t'éclates à lui désobéir, à la faire rager. Ca t'amuse ça. Tu t'habilles d'une façon provocante aussi, elle n'aime pas, elle te le dit chaque fois qu'elle te voit. Quelle obstinée. Tu ne changeras jamais, tu es tellement bien comme ça. Pourtant, malgré le sourire que tu renvoies, malgré cette image heureuse que tu montres, quelque chose ne va pas. Tu es vide, tu souffres de cette vie de rêve, cette vie soit disant parfaite qui est bien trop facile, tu détestes ça. Tu lis, tu lis pour oublier ton vide, ton manque, tu t'échappes. Parce qu'en fait, ta vie ne t'amuse qu'un peu, tu n'es pas heureux, et tu n'aimes pas tant que ça la fête, le bruit, le monde, tu préfères te plonger dans un livre, au silence, ou rire avec ta meilleure amie, que tu aimes tant. Oui, elle tu l'aimes, tu l'adores. Tu fais tout pour combler ce vide, mais il ne disparaît jamais, alors tu fais toujours plus, tu t'autodétruis petit à petit. Tu n'es pas celui que tu parais être, toi aussi, tu es faux, tu gardes un masque. En réalité, tu es comme un petit garçon, tu a une âme pure, douce, tendre, mais tu la caches, parce que dans ce monde, on se fait bouffer quand on en montre un peu trop.
Ta mère n'en peut plus de toi, elle te pousse à faire des études. Tu acceptes, tu n'en peux plus de son entêtement. Tu suis des études d'art, parce que c'est ce en quoi tu es à peu près doué. Tu joues du piano à merveille, de la guitare aussi, et du violon. En plus de ça, tu peins. Tu peins assez bien, de mieux en mieux, tu aimes ça, mais ce n'est pas vraiment une passion, ce n'est pas une raison de vivre. Tu finis tes études et tu ne cherches même pas de travail. A quoi ça servirait ? Vous avez bien assez d'argent comme ça. Un compte en banque illimité. Tu pourrais gâter n'importe quelle fille, si tu le voulais. Mais personne n'a jamais réussi à avoir ton cœur. Jamais personne ne t'a fait craquer pour de vrai, personne ne t'a jamais atteint. Tu n'y crois pas vraiment. Tu profites de la vie, tant bien que mal, ton caractère autodestructeur prenant le dessus parfois. Tu ris de la vie sans aucune honte, en cachant ton mal-être, tu n'as pas d'espoir d'avenir, pas de rêve pour le futur. Tu es toi, ici, maintenant, la vie c'est ça non ? L'instant présent seulement. Tu es vide, mais tu ris. Tout le monde t'invite aux soirées huppées, ou même dépravées. Tout le monde veut te voir. Tu fais le malheur et le bonheur des femmes, tu es leur malédiction en même temps que leur bénédiction. Tu aimes cette sensation de pouvoir, même si ce n'est pas toi, même si ce n'est pas ce que tu cherches.
Tu ne vis plus chez tes parents, ils ont fini par te jeter dehors, en t’appâtant avec un luxueux et grand appartement, ça te va bien comme ça. Tu vis seul dans un appartement bien trop grand pour toi, mais c'est ça la richesse, avoir trop d'espace. Tu t'es même acheté un billard, pour faire genre, pour faire ton bourge de base. Oui, tout ça, c'est pas la réalité. L'humanité à perdu son humanité en inventant l'argent. En inventant cette société capitaliste. Les gens te trouvent parfois idiot, bizarre, en pensant que tu ris vraiment de tout, que tu es prêt à tout. Mais ils ne savent pas que les plus idiots, c'est bien eux, de penser que la richesse fait tout le bonheur. Ouais, la vie est une énorme blague, la vie, c'est ta malédiction. En vérité, tu es beaucoup plus calme que ce que tu montres.